Depuis trop longtemps le fusil des injustes visait l’envol
Au fond des gorges au front du rêve au vif du chant
L’amour en vrac l’amour vandale vidé de sens
Se faisait du mauvais sang du sang de mort en série
Les grandes finalités éthiques roulaient dans les bouliers
Le courage se fourvoyait dans des bolides suicides
Mardi onze septembre 2001 neuf heures dix-huit le temps s’arrête
La haine sans visage troue les tours de l’indifférence et du mépris
Calcine le cœur sec de l’avidité qu’aucune mort n’a jamais ému
La haine chauffée à blanc la haine sans pitié jette la vie par les fenêtres
Depuis trop longtemps la terre perd ses eaux le ventre des mères
N’accouche plus que d’adultes sans enfance ridés de ressentiment
Ah vivre vivre enfin libre une trêve en eau douce
Le vent du lac comme un souffle de grand large
Plus de mépris plus d’orthodoxie plus de dépôts
Pour d’obscures rentabilités au creux des yeux
Dis-moi pourquoi mourir toujours et vivre si peu
Je vois des femmes indomptables pourvoir à la bonté
Leur anonymat serein troquer la veine de l’envie
Contre de chaudes cartographies voyageuses
Je vois des femmes audacieuses le cœur en proue
S’adonner pour rien à de multiples splendeurs
Je me lève de mon livre avec l’ivresse des mots
J’entre sans sommation dans l’oasis de l’amour
Mis en ligne sur Sisyphe en septembre 2002.
Ce poème est extrait de La Plénitude et la limite, paru en 2006 aux éditions Sisyphe.