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dimanche 21 mai 2006 Lettre à Marie Plourde, Journal de Montréal Mythes et faits sur la détresse "des" hommes
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Madame Marie Plourde Madame, Je suis surprise de la naïveté que reflète votre article intitulé « Le temps de changer ? » publié dans Le Journal de Montréal du 11 mai 2006. Surprise aussi que vous laissiez croire, à partir des démonstrations exhibitionnistes de quelques pères, que tous les hommes sont en détresse et laissés à eux-mêmes, et tous les pères discriminés. Pourriez-vous me dire sur quoi s’appuient les affirmations suivantes ? « Bien sûr, Morin n’est pas le porte-étendard des pères en crise, il n’est qu’une goutte d’eau de plus dans l’océan des hommes perdus et il s’agite. « On ne parle plus de cas isolés ; c’est symptomatique d’un grand malaise sociétal. Ça fait la une des bulletins télévisés, des journaux, mais ça ne va pas plus loin. Personne ne bouge, on attend d’autres gestes désespérés, on dirait. « Les hommes ne se retrouvent plus, ils n’ont pas de modèles positifs pour les inspirer, pas d’oreilles pour les écouter, pas de gouvernement pour les épauler, et on ne leur tend pas de perche. » LES hommes ? Lesquels ? Ce n’est pas parce que quelques hommes gueulent sur la place publique et que deux ou trois attirent l’attention sur des ponts que LES hommes en général sont en crise et ne savent plus comment se comporter. Et qui crée les modèles des hommes ? Les modèles de femmes sont-ils tous positifs et inspirants ? Certes, il faut s’occuper de la détresse chez les hommes comme chez les femmes, leur venir en aide, mais ce ne sont pas tous les hommes pas plus que toutes les femmes (tous les pères pas plus que toutes les mères) qui vivent cette "détresse" extrême. Vous reprenez à votre compte des lieux communs rabâchés par une poignée d’hommes comme si c’était là une évidence. Vous faites vôtres les lamentations de Content d’être un gars, dont le site propage la haine et le mépris, et de l’Après rupture, qui diffuse des faussetés, lorsque vous écrivez : « C’est peut-être pour cette raison que le gouvernement ne répond pas aux divers regroupements qui veulent aider les hommes en crise. Les demandes de rencontres avec les ministres de la Santé et de la Justice se multiplient pour tomber dans la filière 13 ». Pourriez-vous démontrer ce que vous avancez ? Que savez-vous de l’agenda de ces deux ministères ? Ne faites-vous que rapporter ce qu’une poignée de plaignards disent ou avez-vous vérifié si les ministères refusent vraiment de les rencontrer et, le cas échéant, pourquoi ? Qu’est-ce qui vous permet d’affirmer qu’il n’existe pas de ressources pour les hommes désespérés ou en difficulté ? Vous êtes-vous renseignée sur ces ressources auprès du ministère des Affaires sociales, du ministère de la Justice et des CLSC ? Si vous le faisiez, vous découvririez qu’il en existe beaucoup plus que vous ne le pensez. Il est plus facile de jouer la carte du mélo et de l’apitoiement - c’est aussi plus "glamour" auprès d’une partie de votre lectorat - que d’écrire en vous basant sur des faits. Toutefois, les journalistes et les chroniqueur-es n’ont-ils/elles pas la responsabilité de s’informer et de tenir compte des contextes au lieu de colporter des sornettes et des préjugés ? Plutôt de nous servir, réchauffé, le discours larmoyant sur les injustices et la détresse des hommes, discours qu’on retrouve partout dans les médias depuis quelques années, il serait plus utile, au strict plan de l’information - et n’est-ce pas dans ce domaine que vous oeuvrez ? - de documenter vos affirmations. Je vous envoie ci-dessous quelques liens d’articles que vous pourrez imprimer et lire, si cela vous intéresse d’en apprendre davantage sur le sujet que vous traitez. Ils contiennent aussi des références qui vous mèneront à d’autres ressources documentaires. Vous y apprendrez, entre autres, que la majorité DES hommes, divorcés ou non, ne sont pas désespérés et "perdus" ; que la grande majorité des divorces ou séparations n’aboutissent pas à des drames concernant la garde des enfants (lire la juge Dubé-L’Heureux sur le sujet) ; que la grande majorité des pères sont des pères responsables et capables de s’entendre sur la garde des enfants avec leurs ex-conjointes et ne ressemblent en rien aux quelques individus qui réussissent à attirer votre attention en grimpant en haut des ponts, exemple extrême à partir duquel vous généralisez. Vous pourrez constater, en lisant la documentation, qu’il y a parfois de très bonnes raisons de refuser la garde ou le droit de visite à certains pères, notamment lorsqu’ils ont un passé d’homme violent et irresponsable. Celui dont vous parlez entre dans cette catégorie. Son enfant est sous la protection de la DPJ qui a sans doute des motifs valables de lui refuser, pour l’instant, le droit de visite à son enfant. Les enfants ont aussi des droits, en premier lieu celui d’être protégés. Qui croira que cet homme pense d’abord au bien de son enfant ? Après le comportement qu’il a eu cette semaine, je souhaite ardemment que cette enfant soit protégée davantage si elle est un jour en contact avec lui. Pas vous ? La Revue canadienne VIH/Sida et Droit" rapporte que : "Québec - Le 6 juin 2001, Mario Morin a été condamné à six ans de prison pour voies de fait graves. (G. Gagnon, « Le juge et le sida », Le Nouvelliste, 8 juin 2001, 8 ; « Man sentenced to six years for HIV infection », Vancouver Sun, 7 juin 2001,A5 ; « Jail terms for pair on HIV charges », Edmonton Journal, 7 juin 2001, A12. » Selon le réseau Canoë "...le frère de Mario Morin a dit que ce dernier lui a confié être prêt à aller très loin pour qu’on se souvienne de lui. Il aurait de nombreux antécédents judiciaires (...) Depuis 1999, Mario Morin a été impliqué dans plusieurs causes de harcèlement, menaces et voie de fait." Sachant cela, vous n’hésiteriez pas à accorder un droit de visite à cet homme ou à un de ses semblables ? J’aimerais savoir quelle est votre attitude à l’égard des femmes qui essaient de protéger leurs enfants de pères violents après un divorce ou qui divorcent pour ce motif. Ce sont des cas plus fréquents que celui de pères privés, injustement ou légitimement, de leurs enfants. Par exemple, le jour précédant la publication de votre article, trois femmes ont été tuées par leur conjoint ou ex-conjoint au Québec (voir « Pourquoi cette violence ? »). Des femmes tuées par des conjoints, c’est tellement fréquent que c’en est devenu banal.. et toléré. Cela n’émeut pas autant que la "détresse" d’un homme qui grimpe sur le pont Jacques-Cartier et, quand on s’en émeut, c’est davantage pour s’attarder sur la "détresse" des meurtriers que sur le sort de leurs victimes, femmes et enfants. Vous savez sans doute que ces actes extrêmes ont parfois d’autre motivation que la détresse, notamment un désir de contrôle et de pouvoir. Le temps de changer, oui : le temps de renoncer aux clichés et aux préjugés. Bien à vous, Micheline Carrier P.S. D’intérêt public, cette lettre sera également publiée sur le site Sisyphe et diffusée dans différents réseaux communautaires. Adresse courriel de Marie Plourde : mplourde@journalmtl.com DOCUMENTATION * L’ex-juge Claire L’Heureux-Dubé réfute l’idée que les tribunaux discriminent les pères divorcés Accueil Sisyphe Mis en ligne sur Sisyphe, le 15 mai 2006 Adresse courriel de Marie Plourde : mplourde@journalmtl.com |