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> Question "irrévérencieuse" (ou raisonnable) ?

14 avril 2005, 11:05, par Pennac

Je ne connais pas la situation (je suis française), donc les lignes qui vont suivre se cantonnent au registre du questionnement.

Je n’ai par ailleurs pas d’opinion virulente, ni en faveur, ni à l’encontre de ce couvre-feu. Tout dépend de divers paramètres (réalité, fréquence, brutalité de la dite délinquence, caractère temporaire du couvre-feu, modalité d’exécution de celui-ci, etc).

Je me pose seulement des questions. Le couvre-feu semble tirer sa légitimité d’études sur le comportement vandale des jeunes. Ces études sont-elles genrées ? Je m’explique, en France, l’écrasante majorité des actes de violence et de vandalisme exercées par les "jeunes" terme qui a l’avantage d’être neutre, le sont par des garçons et des jeunes hommes.

J’ai conscience du bouleversement des consciences et de la résistance instinctive qu’une mesure, sitôt jugée discriminatoire (*), comme l’établissement d’un couvre-feu provisoire différencié selon les sexes ou réservée à un seul sexe provoquerait. Mais si l’on s’en tient à l’analyse et la logique, et si les chiffres de la délinquence française sont similaires à ceux de ce petit village du Québec, pourquoi faire peser sur les filles (en France, ce sont aussi les principales victimes) une solution pour endiguer, en attendant d’en traiter les causes, une hausse de la violence ?

(*) Sans fondement, le critère n’étant pas le sexe mais un seuil de délinquance, si les études invalident le caractère fondamentalement masculin de la délinquance, je serai la dernière à envisager une telle mesure.

De plus, cela pourrait avoir un effet secondaire intéressant : pour la première fois, les filles et les jeunes femmes auraient un accès privilégié par rapport à leurs pairs de l’espace public, et la portée symbolique d’une telle mesure pour la confiance en elle des filles et des jeunes femmes et leur affirmation à exister en dehors de la sphère privée s’en verrait du même coup renforcée.

Ensuite, les écueils sont nombreux, quasi-inévitables, et je ne suis pas sûre d’être convaincue moi-même du bien fondé d’une telle mesure. Je suis contre toute idée de guerre des sexes, je suis contre la ségrégation des sexes et contre la culpabilisation par principe d’un sexe. Ceci dit, ca n’engage à rien de commencer par genrer les études concernant la délinquence qui sont le fondement du couvre-feu, non ?

En espérant que ce message ne sera pas mal interprêté (en fait je ne suis même pas sûre d’être partisane d’un couvre-feu, comme expliqué plus haut), ni censuré (ce que je ne reprocherai pas pour autant aux modérateur-rices.