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> Faire réussir les garçons ou en finir avec le féminisme ?

13 décembre 2002, 23:06, par Rhéa Jean

Je trouve dommage qu’on emploie dans ce texte le terme "masculiniste" comme synonyme d’anti-féministe. Au départ, pourtant, ce terme était utilisé par des hommes réfléchissant sur la condition masculine, non pas CONTRE les féministes mais AVEC elles, qui se posaient des questions sur le conditionnement social des hommes, responsable du comportement violent, misogyne d’une bonne partie d’entre eux. En associant le terme "masculiniste" à "anti-féministe", on retire à ces hommes de bonne foi un terme pour se désigner. On m’a dit l’autre jour : "que ces hommes anti-sexistes changent de terme !" Mais que dirait-on si des gens disaient aux féministes "changez de terme" à cause du fait que certains associent les féministes à des "extrémistes" ? Ou alors on affirme : que ces hommes voulant un réellement changement entre hommes et femmes se désignent par le terme "féministes". Mais là encore, c’est un problème : la plupart de ces hommes anti-sexistes se considèrent comme féministes, mais souhaitent également réfléchir sur la condition masculine, sur ce qui crée leur conditionnement, etc. N’est-ce donc pas essentiel qu’ils se désignent par le terme "masculinistes". Ne faut-il pas différencier les "anti-féministes" des "masculinites" ? Ne sont-ils pas le contraire l’un de l’autre ? Les premiers sont contre les féministes alors que les seconds travaillent avec elles.

Mis à part cette question importante des termes, j’adhère au point de vue de l’auteure et ne peut que m’attrister des réactions violentes lues plus haut. Les féministes ont le dos bien large quand on lit des réflexions aussi violentes que le jeune homme qui se désigne par son pénis et qui semble mettre tous ses malheurs sur le dos du féminisme. Une dame dit une connerie sur les hommes ? La faute aux féministes ! Une éducatrice sexuelle parle de la sexualité en la résumant à un rapport de pouvoir ? La faute au féminisme ! Pourtant, je me suis également révoltée contre cette vision réductrice de la sexualité, étant jeune,...je suis pourtant Féministe. Et pour avoir lu quantité de livres féministes (ce qui ne doit pas être son cas), je sais très bien que plusieurs féministes ont aidé les gens à mieux vivre leur sexualité. Ce sont les féministes qui ont déculpabilisé les femmes de leur sexualité, à l’explorer sans honte (ben oui, une femme aussi se masturbe, monsieur kleenex !) et à faire en sorte que les femmes exigent des davantage de respect envers leur sexualité (une femme, on ne lui dit pas : "couche-toi là, fais-ci, fais-ça", on doit avoir un rapport AVEC elle). Les féministes ont tant fait pour nous tous, hommes comme femmes. Si on l’enseignait davantage dans les écoles, peut-être les hommes sauraient davantage de quoi ils parlent. Que le féminisme n’équivaut pas à "discours anti-hommes" comme certains incultes le croient. Au contraire, s’il est possible aujourd’hui de se "cruiser" dans les bars, de se faire de beaux sourires parfois dans les rues, de se côtoyer dans nos cours, c’est grâce aux féministes. Les hommes qui accusent les femmes de ne pas être assez "disponibles" sexuellement oublient que ce sont les féministes qui se sont battuent contre la double mythologie féminine, la vierge et la putain, que les hommes ont eux-mêmes crée. Finalement, les hommes d’aujourd’hui reprochent aux femmes se qu’ils se sont eux-mêmes acharnés à créer pendant des siècle.

Monsieur "pénis" (comme vous vous appelez vous-même), si les femmes ont peur du viol, ce n’est pas à cause du discours féministe, mais bien à cause que, oui, les hommes continuent à violer des femmes, en plus de les prostituer et de les battre. Si vous respectez vraiment les femmes et que vous êtes contre le viol, la prostitution ou la violence conjugal pourquoi ne vous battez-vous pas pour faire changer cette situation ? Si vous êtes réellement tanné que les femmes aient peur du viol, pourquoi n’appuyez-vous pas les féministes, puisque (ça tombe bien), nous aussi on est tannées du viol ? Nous voilà avec au moins un point en commun, c’est déjà ça....

Monsieur "pénis" prend les féministes comme bouc émissaire parce que ça fait son affaire au fond. Ça évite de se poser des questions sur lui-même qui lui ferait peur.

Nous avons plus que jamais besoin de "masculinites" (les vrais, pas les anti-féministes) pour que les hommes réfléchissent sur la haine des femmes qu’ont leur inculque.

Quand on parle d’un Noir anti-raciste, on n’affirme pas qu’il est "anti-Blanc" : de la même façon, on n’a pas le droit de dire que les féministes sont "anti-hommes" quand elles sont "anti-sexistes". En tant que Blanche occidentale, je considère que les discours anti-racistes des Noirs ou des Chinois m’ont permi de me questionner sur mon propre conditionnement de colonisateur, d’essayer de ne pas avoir trop de préjugés. Il en est de même pour la plupart des Blancs occidentaux. Pourtant, je n’ai pas "honte. pour autant d’être blanche ou occidentale, je ne suis pas responsable des actes de mes ancêtres, mais je me dois d’essayer de ne pas tomber dans les mêmes pièges d’ethnocentrisme.

Pourquoi les hommes ne réagissent pas de cette façon ? Pourquoi ne prennent-t-ils pas enconsidèrations les critiques féministes sans pour autant avoir "honte" d’être des hommes ? Serait-ce parce que se serait se rabaisser que d’admettre que les féministes ont eu raison de leur reprocher leur domination ?

Rhéa Jean