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> Des femmes à l’origine de l’art ?

3 février 2006, 12:22

Cher Georges,

Je ne sais pas si par ce "Chère madame", vous vous adressez à l’auteur de l’article ou à moi... Cependant, je ne peux résister à l’envie de répondre à votre délicieux courrier.

Comme vous le dîtes vous-mêmes, nous avons peu d’indices nous permettant de comprendre la vie sociale des groupes d’humains qui vivaient à ces périodes reculées. Vous parlez de "grotte-habitat". S’agit-il d’abris sous roche ou pensez-vous à un de ces rares exemples comme la grotte de Pair-Non-Pair par exemple, qui fut à la fois habitée et ornée ou encore à autre chose d’intermédiaire ?

Quels sont les éléments qui vous permettent d’affirmer que les femmes "ne voient jamais leurs mentrues et si elles les voient, on les fait soigner par le chaman du clan" ? Les règles auraient donc été considérées comme une maladie à éradiquer ? Dans cette perspective, il est en effet difficile d’imaginer que ces peuples aient pu, du moins pour certains, pratiquer le contrôle des naissances... Il était pourtant essentiel à ces groupes de rester en nombre limité pour assurer leur survie. A partir de quelle époque, pensez-vous alors, que la connaissance des plantes par exemple, et notamment de celles qui avaient des vertus abortives, a été usitée ? Il est certain qu’il est difficile d’imaginer pour "les générations de la pilule" que durant des millions d’années, les femmes, au risque de leur vie, ont pratiqué l’avortement, mais cela n’en reste pas moins une vérité. Je ne dis pas non plus que cela remonte à l’ère glaciaire (ou les plantes devaient être plus rares) mais après tout, pourquoi pas ?

Si je suis bien d’accord avec vous au sujet de l’hypothèse de l’ignorance des humains concernant le démarrage des grossesses (du moins pour les hommes), je vous avoue que je suis interloquée par votre remarque sur l’art pariétal et mobilier que vous citez comme "les rares oeuvres malhabiles qui sont arrivées par miracle jusqu’à nous". Vous pensez vraiment ce que vous dîtes ? Si c’est le cas, je vous propose de vous emmener en promenade un de ces jours avec moi dans une grotte ornée... Finalement, il n’y a que les imbéciles qui ne changent jamais d’avis !

Encore une fois, j’abonde dans votre sens quand vous parlez des pulsions sexuelles assumées sans honte ainsi que de notre animalité. Il paraît presque certain que la sexualité au Paléolithique supérieur était sans doute très différente de la nôtre, du moins dans les codes. Je suis ravie de constater que vous n’en excluez pas l’érotisme, ni je l’espère, la sensualité qui transparaît souvent dans les oeuvres d’art et qui semble totalement vous échapper.

Je vous suis bien moins concernant les cultes aux "déesses mères" qui auraient soi-disants eut lieu durant le Paléolithique supérieur. A mon avis personnel, ils sont bien plus récents. Parler de culte à la feritilité me semble complétement déplacé et un peu trop "facile" également. Seules les statues nommées "Vénus" nous donnent quelques indices à ce sujet. Ces petits bijoux d’une finesse exquise ne nous renseignent hélas pas vraiment quant à leur utilisation ou leur utilité.

Quant aux phallus, il en existe de très impressionnants. Je ne connais pas celui qui a été découvert en Allemagne mais celui de la grotte d’Isturitz, soigneusement dissimulé dans une vitrine, m’a laissé rêveuse, si je puis dire. Simple oeuvre d’art ou objet utilisé en sexualité ? Pour celle des hommes ou celle des femmes ? Par des hommes avec d’autres hommes, pour des femmes avec d’autres femmes ou pour des hommes avec des femmes ? Voyez-vous, je ne suis absolument pas certaine que les tribus se composaient de "quelques dizaines de couples avec enfants" comme vous. Le couple me semble une notion assez récente dans l’histoire de l’humanité. J’aurai plutôt dit "quelques dizaines d’individus adultes et enfants".

Notre environnement et notre survie sont directement menacés par Homo Sapiens Sapiens, je ne vous dirai pas le contraire. L’Homme Sage Sage qui a souvent tout du garnement et à qui on voudrait donner une bonne baffe de temps en temps pour lui rappeler qu’il devrait être plus humble et moins agressif vis à vis de ce qui l’entoure : nature, animaux, autres humains. A croire que notre destruction était déjà programmée dans nos gènes comme notre existence dès le départ.

Amicalement / Patricia MILAN
www.prehistoirepassion.com