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Permettez une petite intrusion

10 septembre 2008, 22:06, par Mélanie Lemay

Re-bonjour Jean-Yves,

Vos questions sont les bienvenues. Je me suis mal exprimée avec le marxisme-léninisme. L’idée derrière ma phrase n’était pas de comparer cette idéologie avec le féminisme. Mon point, c’est plutôt que le féminisme est une idéologie (je ne dis pas mauvaise en soi) et qu’elle est au centre de toutes les positions du CSF. Or je m’étonne qu’on s’en accommode, alors que l’intégration dans le gouvernement de tout autre mouvement idéologique passerait très mal. Ma question n’était qu’un exemple. J’aurais pu vous demander si vous voudriez d’un Conseil de l’altermondialisme, d’un Conseil du sionisme ou tenez, d’un Conseil du kantisme, où toutes les questions sociétales seraient abordées à travers le prisme de la Morale de Kant ?

Quant à la lutte des classes, l’idée même d’égalité en est imprégnée. Depuis que les questions de droit sont largement réglées, tout est concentré sur "ce qui empêche la femme de devenir l’égale de l’homme malgré son égalité en droit". Bien sûr, ce sont les thèmes de l’asservissement, du sexisme, de la dévalorisation, de la mysoginie et des "relans de patriarcat" qui servent d’explication. En contexte conjugal, les gentilles femmes que nous sommes sont victimes de monstrueux monsieurs violents. En matière de publicité, nous serions dépossédées de notre dignité et de notre volonté devant les suggestions avilissantes des gros empires prêts à nous considérer comme des choses fût-ce cela payant. Au travail et en politique, nous heurterions le plafond de verre sournoisement maintenu par la classe des hommes.

Et j’en passe. Mais que retenir ? L’homme, classe des gagnants, des exploiteurs, des dominateurs. La femme, classe des opprimées, des bafouées, des dépossédées.

À mon tour de vous poser une question, cher prof, le puis-je ? De quel homme devrions-nous être l’égale ?

Votre 2e question : L’ennui n’est pas que des femmes se prononcent sur les problèmes des femmes. Si c’était cela, j’en serais heureuse. Mais ce sont plutôt des féministes qui le font. Les féministes ont une façon de définir les problématiques qui leur est propre. Je ne dis pas qu’elle est foncièrement mauvaise. Mais elle ne peut être la seule qui vaille.

J’ai une autre question pour vous. Quelle différence voyez-vous entre un/une féministe et une personne non-féministe favorable à l’égalité ?
Vous vous dites féministe : c’est bien qu’il doit y avoir, à votre avis, une différence substantive entre "féminisme" et "non féminisme". Et s’il n’y en avait pas, sur quoi se baseraient alors les féministes pour traiter d’autres femmes d’antiféministes (comme on l’a fait envers Elizabeth Fox-Genovese dans sa fin de carrière) ?

Enfin, vous me demandez quels autres facteurs que le sexisme pourraient expliquer la sous-représentation des femmes dans les lieux de pouvoir. Essayons quelques hypothèses : les exigences de la maternité (j’entends : la "gestation"), un intérêt moins marqué pour le pouvoir, la capacité parfois supérieure des hommes à "donner un show" pour s’attirer la popularité et vanter leurs compétences, le manque d’assurance.

Mais je pense surtout que l’association "femme et pouvoir" devait passer dans les moeurs. Il faut toujours atteindre une masse critique pour déclencher un phénomène. Et plus il y a de femmes en lieux de pouvoir, plus il est facile pour elles de socialiser, de se sentir à l’aise, voire de se coopter.

J’en suis une preuve, si cela vous intéresse. Ironiquement d’ailleurs, ce sont la plupart du temps mes collègues masculins qui défendaient mes candidatures. Et mes amies qui refusaient de s’impliquer, ce n’est pas le sexisme ambiant qui les inhibait, croyez-moi.

Voilà. J’espère que mes réponses vous apportent des précisions utiles.