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Rapport de la Commission québécoise de solidarité avec les femmes de Ciudad Juárez

12 mai 2004

par Rita Acosta, Gisèle Bourret, Marie-Hélène Côté, Marie-France Labrecque et Lucie Lortie

Depuis 1993, des centaines de jeunes femmes ont été enlevées, violées, torturées et assassinées dans la région de Ciudad Juárez, au Mexique sans que les nombreuses missions des organisations de défense des droits humains sur les lieux aient permis d’élucider ces crimes. Entre le 5 et le 15 février 2004, une Commission québécoise de solidarité avec les femmes de Ciudad Juárez a effectué un séjour dans les villes de Juárez et México. Voici le rapport de cette commission dont nous vous présentons sur Sisyphe l’avant-propos et l’introduction. On peut télécharger le rapport intégral en format rtf en cliquant sur l’icône en bas de la page.



Avant-propos

Nous voulons d’abord remercier tous les organismes d’ici qui, par leur appui financier, nous ont permis de faire un séjour à Ciudad Juárez, de même que toutes les organisations mexicaines (la liste de ces organisations apparaît en annexe) qui nous ont accueillies, nous ont aidées à mieux saisir les problèmes entourant le féminicide et ont accepté de partager avec nous leur vision des choses et les luttes qu’elles mènent.

La Commission québécoise de solidarité avec les femmes de Ciudad Juárez a effectué un séjour dans les villes de Juárez et México entre les 5 et 15 février 2004.

Le rapport que nous présentons est essentiellement organisé autour de deux chapitres présentant une synthèse du contenu des rencontres que la Commission a réalisées avec divers représentantes et représentants des autorités ainsi que des groupes de la société civile. Ces deux chapitres sont précédés d’une introduction qui rappelle l’origine de la Commission ainsi que des éléments contextuels qui aideront à comprendre l’ensemble de la situation. Notre interprétation des faits ou notre compréhension de la réalité figure dans la conclusion du rapport.

Les pistes d’action envisagées suite au séjour de la Commission se retrouvent en annexe. Apparaissent également en annexe, le nom des membres du Comité québécois de solidarité avec les femmes de Ciudad Juárez, des membres de la délégation, la liste des organismes subventionnaires ainsi que celle des organismes rencontrés au Mexique.

Origine de la Commission

La création d’une Commission québécoise de solidarité avec les femmes de Ciudad Juárez a été suggérée par madame Miriam Martínez Méndez qui, lors de son séjour au Québec à l’automne 2002, a donné de nombreuses conférences sur la situation de violence que connaissent les femmes de Ciudad Juárez et a fait la promotion de la campagne " Ni una muerta más " (Pas une morte de plus) . Plusieurs groupes de femmes ainsi que des syndicats québécois ont alors soutenu cette campagne qui a connu un grand succès.

Madame Méndez était invitée à Montréal à titre de coopérante Sud/Nord par l’organisme de coopération internationale, CUSO Québec. Alors directrice du Centro de Apoyo à la Mujer Margarita Magón (Centre d’appui aux femmes victimes de violence), situé à Mexico, elle avait pour principal mandat de collaborer au travail du Secrétariat de la Marche mondiale des femmes dont les revendications dénoncent les situations de pauvreté et de violence que connaissent les femmes à travers le monde entier.

Depuis lors, un comité coordonnateur, composé de femmes issues de divers milieux, a travaillé à la mise en place de la Commission de solidarité et à l’organisation d’activités de sensibilisation destinées à faire connaître au grand public la situation d’impunité à l’égard des coupables de ces crimes contre les femmes.

Mandat de la Commission

Dans le but de maintenir vivante la solidarité internationale et de consolider le rapport de forces existant entre les différents paliers gouvernementaux et les organisations non gouvernementales, la Commission s’est donné pour mandat :

 d’exprimer la solidarité des divers groupes québécois préoccupés par cette situation intolérable de violence envers les femmes et d’impunité à l’égard des coupables ;
 de faire pression (par des rencontres et conférences de presse) sur les autorités concernées afin qu’elles mettent véritablement en œuvre les recommandations faites par les différentes organisations internationales ayant enquêté sur place ;
 de sensibiliser l’opinion publique québécoise et d’alerter nos gouvernements (provincial et fédéral) quant à la situation qui règne à Ciudad Juárez, afin que ce problème de négligence et d’impunité qui défie le droit international soit porté à l’ordre du jour des rencontres entre les représentants des gouvernements canadien et mexicain.

Tout au long de leur séjour au Mexique, les membres de la Commission québécoise de solidarité ont rencontré, dans les villes de Juárez et de México, des représentantes et représentants d’organismes qui luttent contre l’impunité et la violence envers les femmes, qui travaillent à faire connaître leurs droits aux travailleuses des maquiladoras. Les membres ont aussi entendu les témoignages de mères de victimes regroupées en associations pour réclamer la justice et la fin de l’impunité. Elles ont été reçues par des représentants et des représentantes des autorités oeuvrant aux niveaux municipal et fédéral. Enfin, elles ont rencontré des défenseurs des droits humains qui demandent le respect des droits les plus fondamentaux et l’application de mesures efficaces pour que cesse l’impunité à Juárez. Au cours de ces diverses rencontres, la Commission avait notamment comme objectifs :

 d’appuyer le travail entrepris par diverses ONG mexicaines et par les familles des victimes ;
 de vérifier, si possible, la mise en place des mesures visant à mettre un terme à l’impunité et à contrer la violence envers les femmes à Ciudad Juárez ;
 de réclamer de meilleures conditions de sécurité dans les maquiladoras et dans les lieux environnants en référence, notamment, au récent rapport d’Amnistie internationale ;
 d’échanger sur les façons d’exprimer, à son retour, la solidarité en rapport avec les luttes menées pour contrer l’impunité et la violence envers les femmes.

Autour du féminicide à Ciudad Juárez

Ciudad Juárez présente une situation aiguë et inusitée de violence envers les femmes. Dans son rapport datant du mois d’août 2003, Amnistie internationale, suite à une enquête effectuée sur le terrain, fait état d’environ 370 femmes assassinées dont au moins 137 auraient subi des sévices sexuels avant d’être tuées. En outre, plus de 400 autres jeunes femmes manqueraient toujours à l’appel . Certaines n’ont pas été revues depuis dix ans.

Une majorité de victimes avaient en commun d’être jeunes et jolies, âgées pour la plupart entre 15 et 25 ans. Elles étaient minces et avaient les cheveux longs. Toutes étaient issues de familles pauvres et plusieurs d’entre elles n’étaient pas originaires de Ciudad Juárez. À la recherche de meilleures conditions de vie, elles y étaient venues pour y travailler comme ouvrières dans l’une des nombreuses usines d’assemblage (maquiladoras) que compte la ville. D’autres étaient employées domestiques, étudiantes, vendeuses, secrétaires, réceptionnistes, etc.

Dans la majorité des cas, les corps retrouvés portaient les traces des violences extrêmes qui leur ont été infligées : viol, morsures aux seins, marques d’étranglement, coups de poignard, crânes fracassés. Souvent les visages étaient démolis et parfois les corps calcinés. Dans la plupart des cas, ce sont des habitants de la ville qui ont fait les macabres découvertes, alors que les corps semblaient avoir été abandonnés dans des fossés, sur des terrains vagues au milieu du désert, tandis que d’autres avaient été enterrés à la hâte.

Depuis 1998, plusieurs organisations de défense des droits humains ont fait un séjour à Ciudad Juárez afin d’examiner la situation en rapport avec les crimes systématiques commis envers les femmes depuis 1993. Suite à leur visite, la plupart ont formulé des recommandations. Voici la chronologie de ces visites :

1998 : la Commission nationale des droits humains (CNDH) au Mexique fait une première enquête sur les meurtres de 81 femmes à Ciudad Juárez. Elle émet la Recommandation 44/98 comportant plusieurs aspects et qui conclut que plusieurs paliers gouvernementaux se sont rendus coupables de négligence. On reproche aussi aux autorités de considérer les meurtres comme des événements isolés et on demande que des enquêtes criminelles soient menées contre le bureau du procureur de l’état de Chihuahua.

1999 : la Rapporteuse spéciale sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires de la Commission des droits de l’homme de l’ONU fait un séjour du 12 au 24 juillet et soumet son rapport en novembre de la même année.

2001 : le Rapporteur spécial sur l’indépendance des magistrats et des avocats de la Commission des droits de l’homme de l’ONU y séjourne à son tour du 13 au 23 mai et présente son rapport en janvier 2002.

2002 : la Rapporteuse spéciale de la Commission interaméricaine des droits de l’homme pour les droits des femmes de l’OEA (Organisation des États américains) est présente à Juárez et à Mexico du 11 au 13 février. Son rapport, rendu public en mars 2002, s’intitule : " Les femmes de Ciudad Juárez (Mexique) et le droit à la protection contre la violence et la discrimination ".

2002 : le 28 novembre, la Directrice exécutive du Fonds de développement des Nations unies pour les femmes (UNIFEM) se rend à Ciudad Juárez.

2003 : en juillet, la Rapporteuse sur la violence contre les femmes de la Commission des droits de l’homme de l’ONU fait un séjour à Ciudad Juárez.

Également, en juillet de la même année, Amnistie internationale fait enquête sur les assassinats et disparitions de femmes. Son rapport, rendu public en août 2003, s’intitule : " Mexique : Des assassinats intolérables. Depuis dix ans à Ciudad Juárez et Chihuahua, des femmes sont enlevées et assassinées ".

Enfin, en septembre 2003, un groupe d’experts (6) du bureau des Nations Unies contre la drogue et le crime vient prêter main forte pendant quelque temps à la police de la ville.

© Commission québécoise de solidarité avec les femmes de Ciudad Juárez, 2004.

 Lire le texte intégral en téléchargeant le document ci-dessous.

Rita Acosta, Gisèle Bourret, Marie-Hélène Côté, Marie-France Labrecque et Lucie Lortie

P.S.

ISBN 2-9808502-0-9
Dépôt légal - Bibliothèque nationale du Québec, 2004
Dépôt légal - Bibliothèque nationale du Canada, 2004

© Commission québécoise de solidarité avec les femmes de Ciudad Juárez, 2004.

Ce document peut être reproduit, dans la mesure où les auteures sont citées et que le titre du document est clairement identifié.

Pour recevoir une copie électronique du document, écrire à l’une des adresses suivantes : info@ffq.qc.ca</a. - femmesjuarez@yahoo.ca




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