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Je vous écris de Kaboul... Aidez Aïna !

13 juillet 2005

par Reza

Kaboul, le 26 juin 2005

Chers amis, chères amies,

Je vous écris de Kaboul.

Nombreuses sont les routes qui mènent à Kaboul, ville symbole d’un pays dont on ne sort pas sans y avoir laissé une partie intime de soi. Sans doute, il y a de cette attirance particulière dans cette route que j’ai tracée depuis 25 ans en Afghanistan, témoin que je suis des combats de ce peuple pris dans la tourmente des guerres et des répressions. Sans doute, c’est cette attirance là qui me pousse à y être aujourd’hui encore, alors que l’intérêt de la communauté internationale est déjà ailleurs.

Aux lendemains de la libération de Kaboul en 2001, fort des conflits que j’ai couverts dans le monde, sachant que les blessures ineffables sont celles de l’âme, sachant que les guerres brisent l’identité culturelle d’un peuple, sachant que les répressions emprisonnent la liberté de dire et de penser, j’ai compris l’importance de créer Aïna, organisation humanitaire. ONG de la troisième génération, elle participe au développement des médias indépendants et de l’expression culturelle, fondements des démocraties naissantes et de l’émergence des sociétés civiles.

Que restera-t-il des maisons reconstruites, des routes asphaltées, des écoles et des hôpitaux bâtis, sans société civile animée par un peuple en marche vers la démocratie, et éduqué à la paix ?

Vous avez été sensibles à cette idée.

Depuis 4 ans, au sein de ses 8 centres des médias et de la culture installés en provinces et à Kaboul, Aïna forme des professionnels (femmes et hommes) et soutient des initiatives locales de médias indépendants, dans des domaines aussi différents que le documentaire vidéo, le photo-reportage, la radio, la presse, le cinéma itinérant éducatif dans les provinces les plus reculées...Jusqu’à un passé récent, quelques 300 Afghan-es bénéficiaient de formations et participaient à la production de films, d’émissions radio, de reportages photos, de magazines et touchaient ainsi quelques millions d’auditeurs, de spectateurs ou de lecteurs...

Aujourd’hui, je vous écris afin de ne pas réduire à néant la volonté de ces journalistes qui ont perdu leur travail et leur espoir de participer à l’émergence d’un Afghanistan pacifié et libre, et ce, par manque de fonds.

Quant aux enfants...Ceux-là même qui, grâce au soutien d’Aïna espéraient que la mendicité dont ils vivaient était bien derrière eux ...! Ceux-là même qui survivaient en vendant à la criée les publications soutenues par Aïna, tout en s’alphabétisant par la même occasion...!!! Beaucoup de ces enfants-là sont retournés à leur collecte d’ordures et au geste humiliant de la main tendue, car nombre des publications qu’ils vendaient n’existent plus.

Quant au magazine Parvaz (l’Envol), ce bijou de la presse afghane de tous les temps, l’unique magazine pour enfants lancé par Aïna et distribué gratuitement dans tout le pays, véritable fenêtre sur le monde, éducatif, ludique, pédagogique ; cette pierre à l’édifice d’un futur Afghanistan où les acteurs de demain (que sont les enfants d’aujourd’hui) seront ouverts, tolérants, démocratiques, s’arrêtera dès le 1er juillet.

Une obligation morale envers les Afghan-es, au nom des citoyen-nes d’un monde libre que nous sommes, me pousse à partager cette situation alarmante, voire désespérée, pour l’ensemble de ces projets qui manquent de financement pour accéder à une autonomie nécessaire.

Aujourd’hui toute l’équipe d’Aïna, de Kaboul à Paris, se bat pour préserver le souffle de la liberté...à répandre partout.

Je vous écris de Kaboul puisque aujourd’hui vous êtes les seul-es à pouvoir aider Aïna par votre réaction et votre implication.

Ces projets ont besoin de vous parce qu’ils nourrissent l’âme meurtrie et bâillonnée d’un peuple en marche vers la paix.

Je reste dans l’attente de vos nouvelles, de vos actions et je vous en remercie.

Reza

Aidez Aïna en adressant cette lettre à tous vos amis
et en leur demandant de la faire circuler à leur tour.

Soutenez Aïna en adressant vos dons par chèque :
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Lettre aux membres du Jury Albert Londres

Chers Amis,

Je rentre d’Afghanistan où je suis allé ouvrir le chantier de mon film de fiction (L’Étoile du soldat), dont le tournage va enfin se dérouler dans la vallée du Panjshir en août et septembre prochains.

En Afghanistan, comme vous le savez, la paix demeure fragile.

A la suite de manipulations diverses et variées, du jeu malsain des Pakistanais, de l’étonnante capacité des Américains à cumuler les erreurs, les Taliban reviennent, souvent en costumes cravates, la même folie nichée dans leurs cervelles. On en trouve jusque dans les nouveaux Ministères...

Partout, pourtant, une démocratie tente d’exister. Le 18 septembre prochain, pour la première fois, des élections législatives vont se dérouler à travers toutes les provinces du pays.

Si je m’adresse à vous tous aujourd’hui, c’est pour vous transmettre l’appel au secours de notre confrère Reza Deghati, photographe ô combien célèbre et talentueux qui, comme je l’ai été, s’est trouvé proche de Massoud et des Afghans. Après l’assassinat de Massoud, Reza s’est engagé dans la reconstruction de cet Afghanistan dont rêvait cet homme pour qui nous avions tant d’estime.

Reza, en 2001, a donc créé Aïna, une ONG de développement de médias. Grâce à cette initiative, et à son énergie, il a pu rassembler autour de lui des Afghanes et des Afghans qui ont pu donner vie à des journaux (pour enfants, pour femmes et pour tous publics), mais aussi des radios et quantité d’autres initiatives utiles pour le développement d’une démocratie (voir les documents ci-joints).

Aujourd’hui, à la suite de plusieurs difficultés, Aïna est menacée de disparition. Les seuls journaux libres d’Afghanistan risquent alors de mourir, les radios de céder la place au silence et, pire, aux imprécations de fous d’Allah bien décidés à prendre leur revanche sur les Américains et notre monde occidental qu’ils vomissent.

Il faut aider Aïna afin que rien de ce qui a été créé ne meure. J’ai rencontré Reza, il y a quelques jours à Kaboul. Il ne baisse pas les bras. Si, les uns et les autres avez des idées pour faire parler de ce qui se trame, Reza vous dira comment le soutenir. L’Afghanistan a besoin d’une presse indépendante, avec des journalistes afghan-es dignes de notre métier, témoins privilégiés de l’évolution de leur société sorti d’un long cauchemar qu’ils ne souhaitent pas vivre à nouveau. Les aider, c’est nous aider aussi.

Florence Aubenas est libre. Les soutiens ont été précieux.

Aïna doit continuer à vivre. Je laisse à chacun de voir comment soutenir Reza et son magnifique engagement.

Je m’étais engagé à vous transmettre son appel. Si vous le désirez, si vous en avez les moyens, je vous passe le relais. Merci.

Confraternellement.

Christophe de Ponfilly

Reza


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