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Golf : "Gentlemen only, ladies forbidden" ?

6 février 2007

par Michèle Bourgon

Le mois de décembre exceptionnellement doux que l’on a connu a réveillé les instincts sportifs assoupis. Foulards, tuques et gants chauds, et hop ! on tape sur la balle !

Les origines du golf sont mystérieuses et se perdent dans la nuit des temps. Chose certaine, on entend parler de ce sport vers les seizième et dix-septième siècles, principalement en Écosse. Une certaine histoire raconte que ce sont les pêcheurs écossais qui, s’en allant rejoindre leurs bateaux, frappaient des cailloux avec des épaves de bois.

Quoi qu’il en soit, depuis longtemps, le golf cause des problèmes. Au XVIIe siècle, on avait réprimandé Marie, reine d’Écosse, pour avoir joué au golf peu de temps après le décès de son mari. C’est donc dire que les femmes jouaient au golf. Toujours en Écosse, on interdira le jeu de golf parce que l’engouement pour ce sport est tel que les archers ne pratiquent plus le tir à l’arc et qu’ils perdent ainsi plusieurs batailles contre des armées ennemies. L’Écosse est menacée.

Au Québec et au Canada, ce sport s’est développé à une vitesse supersonique et presque tout le monde joue au golf maintenant. C’est un sport de détente, mais c’est aussi une occasion de parler affaires dans un contexte d’intimité, de compétition amicale, dans un décor naturel. Puis, il y a le dix-neuvième trou... qui favorise les réunions autour d’un pot de bière.

Pendant longtemps, ce sport a été interdit aux femmes dans les clubs privés. Mais comme pour les tavernes, l’interdiction est tombée ; ce qui en a perturbé plus d’un. Ce faisant, on ouvrait la porte à l’invasion féminine et une autre menace apparaissait : la possibilité pour les femmes de s’intégrer plus facilement, plus rapidement dans les milieux d’affaires et d’entrer en compétition réelle avec les hommes.

L’an dernier, un club de golf de Laval avait fait les manchettes parce que l’interdiction pour les femmes d’accéder à un certain salon n’avait pas été levée. Un club de prestige, quoi...

Tout récemment, un tribunal de la cour d’appel de la Colombie-Britannique a rejeté la cause de 36 golfeuses qui demandaient d’obtenir accès au Salon réservé aux hommes. On mentionne bien au salon, non pas au vestiaire (1).

A prime abord, il est facile de se dire que les hommes se sentent mieux entre eux après un effort sportif. Mais quel est l’intérêt réel d’interdire l’accès aux femmes à un salon de discussion ? Ces messieurs peuvent blaguer, jouer aux cartes, parler d’affaires sérieuses, discuter d’actualité, prendre un verre, relaxer, quoi d’autre ?

Alors pourquoi interdire cela aux femmes ? Pourquoi ces 36 golfeuses veulent-elles accéder au Saint des saints ? Et en quoi leur présence nuirait-elle aux hommes ? Que leur enlèveraient-elles ?

Parce qu’on interdit à des femmes de se retrouver là où sont les hommes et que l’on crée ainsi une ségrégation et deux catégories d’êtres humains : l’une qui a accès à tout (sauf les vestiaires des femmes) et l’autre à qui on interdit certaines entrées. Tout simplement. Ces golfeuses sont considérées comme des citoyennes de deuxième classe. Elles n’ont pas accès à un endroit réservé jusqu’à ce jour uniquement aux hommes et il faut tenter de comprendre pourquoi ? Pourquoi cette chasse-gardée des hommes en 2007 ?

Va falloir faire mentir la légende : gentlemen only, ladies forbidden...parce qu’ici, au Canada, les hommes et les femmes sont égaux en droit.

1. Cyberpresse, 12 janvier 2007.

Mis en ligne sur Sisyphe, le 4 février 2007

Michèle Bourgon


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