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Le marketing du voile islamique
21 décembre 2007
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Dans son livre Que pense Allah de l’Europe ?, l’iranienne Chahdortt Djavann demande : « Pourquoi les nombrils dénudés, les strings, le piercing et pas le voile ? » Hein ? Après tout, notre ardent défenseur du multiculturalisme, le juriste Julius Grey, n’a-t-il pas déjà dit « qu’au Canada, les gens sont libres de s’habiller comme ils le veulent. Quelqu’un peut même s’habiller en clown, si ça lui chante, et circuler sur la rue, sans que cela ne dérange personne. » Réponse de Djavann : « Jusqu’à ce jour, aucun régime n’a obligé à coup de kalachnikov toutes les femmes d’un pays à sortir nombril dénudé en été comme en hiver. » Alors, si vous choisissez l’Iran comme destination vacances cet hiver, et que vous êtes une femme, on vous obligera à vous déguiser en clown dès votre descente d’avion. C’est pour vous dire comme le voile n’a rien d’une tuque !
Dites, honnêtement, avez-vous déjà vu au Québec des manifestations pour ou contre le port de la tuque chez les femmes ? Et pourtant, le voile islamique, qu’on impose à des centaines de millions de femmes dans le monde, suscite partout de vives controverses, y compris dans le monde musulman lui-même. Depuis nombre de décennies, ce bout de tissu extraordinairement explosif enflamme hommes et femmes, qui, ma foi, sur cette question, semblent tout aussi islamophobes qu’un bon nombre de Québécois... Non, croyez-moi, notre tuque identitaire en pure laine d’habitants que nous sommes, n’est vraiment rien à côté de cela ! Faut croire que l’enjeu politique qui se cache sous ce voile n’a rien à voir avec une paire de bas de nylon.
Voile 101
Depuis l’Antiquité, on a toujours voilé les femmes, mais il n’y a que dans l’islam où cette pratique perdure encore. Pourquoi ? Pourquoi, par exemple, dans un régime totalitaire comme l’Iran ne peut-il exister de femmes non voilées ? Pourquoi les femmes chrétiennes et juives sont-elles obligées, elles aussi, de se voiler ? Et pourquoi les surveille-t-on, armé de kalachnikovs ? Pourquoi seules les femmes doivent-elles se voiler ? Et pourquoi voile-t-on aussi les fillettes de six et de sept ans ? Choix vestimentaire ? Élan de pudeur ? Expression d’une foi profonde ? Foutaises que tout cela. Les intégristes nous prennent pour des valises, des grosses à part ça.
Que signifie ce fameux voile ? Que cache-t-il et que montre-t-il ? On sait que les religions ne font pas bon ménage avec les sciences mais elles ont tout de même compris quelque chose à la biologie ; la paternité est toujours douteuse, la maternité, jamais ! Donc, la seule façon pour un homme de s’assurer que son enfant est bien le sien, et non celui de son voisin, c’est de contrôler l’hymen de la femme. En termes politiques, cela s’appelle le patriarcat, où les mâles contrôlent la circulation des ovules. Le plus simple, me direz-vous, serait de les enfermer à double tour avec des chips, du coke et un jeu de Parchési, de la puberté jusqu’à la ménopause, dans un gynécée ou un harem, une espèce de centre pour femmes. Mais cela ferait un peu archaïque sans compter qu’aujourd’hui, il y a l’ONU, le Haut Commissariat aux Droits Humains et ses ONG, qui ont tous l’œil de maman Arbour...
Alors, si on ne peut plus les enfermer dans du ciment, enfermons-les autrement ! Sous la tente ambulante qu’est la burqa ou en version plus décapotable comme le niqab, le tchador ou son plus “moderne“ cousin, le voile islamique. Rendons-les invisibles, anonymes, et détruisons en elles toute velléité d’avoir une vie à soi. Maintenant, mettez un peu de chair autour des ovules, et cela donne une femme, un “bien“ familial à contrôler pour garantir la filiation agnatique, parce qu’ici, les enfants n’appartiennent qu’aux mâles, et que la femme musulmane doit d’abord, et surtout, être une génitrice de petits musulmans. Même si elle fait un doctorat.
Et pour bien s’assurer de cela, voici le programme islamique, pour femmes seulement : l’interdiction pour une femme musulmane d’épouser un non-musulman, sauf s’il se convertit à l’islam (ce qui n’est pas forcément bon pour l’intégration, mais enfin...). Une législation (la Charia) qui, en matière de mariage, de divorce, de garde d’enfant, de succession et d’adultère, est à l’extrême désavantage des femmes (voir Les Rapports arabes sur le développement humain des Nations Unies publiés en 2002-2003). Une morale sexuelle patriarcale exigeant la chasteté pré-maritale, sur laquelle repose l’honneur des hommes et le respect de leur communauté, d’où l’étroite surveillance des jeunes filles, leur isolement, la violence, les crimes d’honneurs, souvent impunis, pour rendre ces femmes invisibles à tout jamais, comme cette jeune ontarienne, Aqsa Parvez, qui, il y a quelques jours, est devenue soudainement invisible, à seize ans. Le mariage précoce et arrangé qui minimise les dangers d’hymens déchirés, soulage du fardeau de la surveillance et met à l’abri l’honneur des mâles. Une véritable aubaine ! L’exigence de fidélité durant le mariage alors que la polygamie est permise pour les hommes, et une condamnation plus sévère de l’adultère féminin. Et finalement, l’exigence de la non-mixité qui transpose l’espace religieux des mosquées dans la sphère publique, afin de limiter les contacts des femmes avec d’autres hommes. Pas terrible pour rêver de Roméo, et même de Juliette...
Femmes infantilisées, humiliées, placées sous haute surveillance, subissant à chaque jour le marquage discriminatoire de leur sexe, sur la planète entière, là où les hommes du clan islamique délimitent leur territoire, justement par ce voile, qui est leur plus éclatant succès (rien qu’en Égypte, huit femmes sur dix le portent). Ce voile, qui ne diffère de la burqa qu’en degré, mais absolument pas en nature, et qui symbolise l’autorité du père, des frères, des oncles ou du mari, à toutes les fois qu’elles vont au dépanneur ou montent dans un autobus de l’Espace Public mixte. Rien à voir avec nos tuques !
Et évidemment, pour que la sauce prenne, pour rendre l’aliénation moins grossière, couler le tout dans le béton de la Parole révélée, par Dieu lui-même, en personne. Y a pas meilleure recette que la religion pour faire de la politique. Vous en doutez ? Lisez bien ceci : « Les hommes sont supérieurs aux femmes à cause des qualités par lesquelles Dieu a élevé ceux-là au-dessus de celles-ci, et parce que les hommes emploient leurs biens pour doter les femmes. Les femmes vertueuses sont obéissantes et soumises ; elles conservent soigneusement pendant l’absence de leurs maris ce que Dieu a ordonné de conserver intact. Vous réprimanderez celles dont vous aurez à craindre l’inobéissance ; vous les reléguerez dans des lits à part, vous les battrez ; mais aussitôt qu’elles vous obéissent, ne leur cherchez point querelle. Dieu est élevé et grand. » Le Coran, sourate IV, verset 38. Et une dernière citation pour les femmes voilées ayant un doctorat : « Voici le Livre ! Il ne renferme aucun doute ; il est une Direction pour ceux qui craignent Dieu. » S. II, v.2. Relisez maintenant la sourate IV, verset 38.
Alors, quand j’entends une militante politique du Forum musulman canadien dire « qu’il faut cesser de semer les amalgames en liant le hijab à la question de l’égalité des hommes et des femmes » et, dans un même souffle, Michèle Asselin, présidente de la Fédération des femmes du Québec, ajouter « que le port du voile ne contrevient pas nécessairement au principe de l’égalité hommes-femmes » (in Le Devoir du 11 déc.), vraiment là, c’est à vous écoeurer d’être féministe !
Le port des signes religieux à l’école
Pour que cette égalité hommes-femmes ne soit pas qu’un vœu pieux, il va falloir que nous soyons moins frileux, plus avisés et plus fermes avec les représentants de l’islam politique parce qu’il serait franchement odieux de brader en douce les droits des femmes pour acheter la paix sociale. En ce sens, je me réjouis et j’appuie la recommandation de la CSN et du Conseil du statut de la femme, faite à la Commission Bouchard-Taylor, exigeant la neutralité religieuse des agents de l’État dans les institutions publiques du gouvernement du Québec, mais je considère que celle-ci demeure insuffisante parce qu’elle laisse intacte l’épineuse question politique du port des signes religieux à l’école.
Nous ne pouvons pas prétendre que l’égalité hommes-femmes soit une valeur qui nous est chère et, en même temps, abandonner des jeunes filles musulmanes de nos écoles primaires et secondaires publiques qui, parce qu’elles subissent des pressions familiales, doivent porter le voile islamique. Une pareille indifférence à leur sort serait de l’hypocrisie et de l’irresponsabilité de notre part. Pour préserver notre confort... Quant à l’argument voulant qu’interdire le voile ne fasse que nuire à l’intégration de ces jeunes Québécoises, je réponds que ce sont justement ces jeunes filles musulmanes, qui souhaitent vivre comme nous, qui sont le gage le plus sûr d’une intégration réussie, et que de permettre le port du voile à l’école sera un encouragement à porter le voile au Québec. Et cela va, fort probablement, se passer en français...
Au nom du respect des droits de la personne, au nom du respect des droits des enfants, au nom de la protection des mineur-es, il faudrait que l’État interdise le port des signes religieux dans les écoles primaires et secondaires publiques du Québec.
Mis en ligne sur Sisyphe, le 17 décembre 2007