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LA journée de LA femme : une hypocrisie ?

10 avril 2009

par Campus féministe

Pourquoi uniquement le 8 mars ?
La situation et les luttes des femmes
devraient être sujets de l’actualité 365 jours par année.


Le 8 mars 2009, un sondage Segma-La Presse indique que neuf Québécoises sur 10 estiment que les femmes ont encore des luttes importantes à mener pour obtenir la pleine reconnaissance de leurs droits. Toutefois, quand on les interroge sur les groupes féministes, pas moins de 47% des Québécoises les jugent soit dénués d’influence ou d’intérêt, soit totalement dépassés. Pourquoi ?...

Il ne se passe pas une semaine sans que la cause des femmes et le féminisme ne soient attaqués par les médias ou des personnalités publiques sauf… le 8 mars. Les victoires passées sont glorifiées car il s’agit de la meilleure façon de ne pas se questionner sur la situation actuelle. Quelle hypocrisie ! Ne cherchez plus pourquoi la moitié des femmes ne veut pas s’identifier au féminisme alors qu’on n’en parle de façon positive qu’une fois par année.

Nous souhaitons ici réaffirmer l’importance et la pertinence du 8 mars malgré la confusion qui entoure sa célébration. Comme son appellation le montre (Journée de LA femme plutôt que DES femmes), le 8 mars est pour plusieurs l’occasion de célébrer le féminin, l’essence de la femme – d’ailleurs, quelle est-elle ? – plutôt que de souligner le chemin qu’il reste à parcourir pour l’émancipation des femmes, partout dans le monde. Une journée par année pour célébrer la « beauté de la femme » et l’« être merveilleux » qu’elle est, en lui offrant des fleurs ou en faisant le ménage, n’est pas ce qui permettra d’atteindre l’égalité de fait.

Nous entendons déjà les protestataires s’écrier : « Mais nous l’avons l’égalité ! » En cette journée du 8 mars, nous nous remémorons avec admiration les luttes menées par le mouvement féministe et les femmes qui nous ont précédées. Toutefois, beaucoup oublient que le travail pour éliminer la discrimination systémique envers les femmes ne fait que commencer – comment un siècle et demi de luttes serait-il suffisant pour effacer toute trace de milliers d’années de subordination ? Il n’y a pas si longtemps, nous n’avions pas le droit de vote, pas de contraception, le viol conjugal n’était pas un crime et les pères ne demandaient jamais la garde des enfants. Aujourd’hui, l’objectification et la marchandisation du corps des femmes, les violences institutionnelles, économiques, conjugales, physiques et sexuelles, sont des problèmes majeurs à régler. Le partage plus équitable des tâches, une réelle conciliation travail-famille pour les deux parents et l’accession complète des femmes aux instances de pouvoir restent des projets à réaliser. Enfin, il ne faut pas oublier la remise en question constante du droit à l’avortement et les obstacles dressés par la droite néolibérale à la réalisation de l’équité salariale et au travail des groupes de femmes. Croyez-vous toujours pertinente une Journée de l’homme, alors qu’on ne penserait jamais, par exemple, célébrer un « Mois des Blancs » ?

Dans un monde idéal nous n’aurions plus besoin du 8 mars. Mais pour l’instant, il s’agit du seul rappel que nous avons de cette lutte inachevée, aussi imparfait soit-il.

À vous toutes et tous de continuer la lutte !

En solidarité,

Campus féministe – Université de Montréal

Mis en ligne sur Sisyphe, le 6 avril 2009

Campus féministe


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