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Iran : Ahmadinejad usurpe le pouvoir par le viol, la torture et l’assassinat

8 septembre 2009

par Élaine Audet

Dans les médias et parmi la gauche, il y en a qui semblent sceptiques concernant la vraisemblance des nombreuses allégations de viols de prisonnières avant leur assassinat dans les prisons de la République (sic) d’Iran. Selon eux, le seul témoignage d’un milicien iranien au Jerusalem Post, ne suffirait pas à accréditer l’histoire de ces viols. Certains écrivent : "Depuis quand un seul témoignage suffit-il pour accréditer un fait (1) ?"

On se demande où ils et elles étaient ces trente dernières années. Dès les premiers jours de la République islamique d’Iran, le viol préalable à l’exécution de jeunes Iraniennes luttant pour la démocratie était généralisé, sous prétexte que, selon l’islam, les vierges seraient assurées d’une place au paradis. Pour contourner un tel risque, le régime les faisait, et continue à les faire, violer par des gardiens de prison. Le caractère systémique de l’utilisation du viol par le régime islamique d’Iran, comme moyen de châtiment et d’intimidation, a été dénoncé par de nombreux organismes de défense des droits fondamentaux (2).

Grâce aux documentaires de Pantéa Bahrami et de Réza Allameh-zadeh, on dispose sur You Tube (3) du témoignage de militantes iraniennes violées en prison, il y a une vingtaine d’années. Aujourd’hui, il y a escalade dans la répression car les personnes arrêtées, qui subissent tortures et viols, ne sont pour la plupart même pas membres d’un parti d’opposition, mais sont de simples manifestant-es pacifiques protestant contre la fraude électorale.

Les événements, depuis les élections du 12 juin dernier, montrent la détermination de couches importantes de la population iranienne, notamment des femmes et des jeunes, d’en finir avec la dictature intégriste qui leur barre tout avenir et les étouffe avec des préjugés moyenâgeux, la négation des droits démocratiques, la violence, la misogynie, la censure, la torture et l’assassinat légalisé et sanctifié afin de se maintenir au pouvoir.

Pour ceux qui qualifient d’islamophobie ou d’appui à l’impérialisme toute critique de l’Iran ou d’un pays arabe, comme le président vénézuélien Chavez, on a l’impression que les horreurs commises par la dictature intégriste au pouvoir en Iran ne seraient que des rumeurs non-vérifiées. Ils acceptent que, dans les cas de viol, le fardeau de la preuve appartienne aux victimes. Dans le cas de l’Iran, c’est encore plus injuste et impossible à réaliser que partout ailleurs, car qui pourra assurer les victimes qu’elles ne seront pas liquidées comme tant d’autres avant elles, si elles tentent de prouver leur innocence. D’ailleurs, les milices d’Ahmadinejad viennent de perquisitionner et de s’emparer de tous les documents dans les locaux d’un des candidats écartés, Karoubi, avant de mettre des scellés sur les lieux dans le but évident de tenter de faire disparaître les témoignages irréfutables de leurs crimes.

En ce moment, devant la sinistre prison d’Evin, des centaines de personnes sont dispersées brutalement parce qu’elles s’entêtent à venir y réclamer quotidiennement des nouvelles de leurs parents ou ami-es disparu-es. C’est le cas des proches de Taraneh Moussavi, qui aurait été transférée dans l’hôpital de la prison avec l’utérus et l’anus défoncés et qui a, depuis, disparu, ou d’Atefeh, la fille d’un réformiste connu, retrouvée nue dans un cimetière, arrêtée et torturée, comme tant d’autres hommes et femmes de toutes les générations à travers l’Iran.

Même les ultra-conservateurs au pouvoir ont été obligés d’admettre l’existence d’"abus" dans les prisons du régime, tout en les attribuant à l’opposition ! Dommage que le ridicule ne tue pas, ainsi, peut-on lire dans Le Monde du 28 août que, dans son prêche de vendredi, Ahmadinejad a accusé les opposants d’être derrière ces sévices. "Ce qui est arrivé dans les (...) centres de détention faisait partie du plan de l’ennemi mis en application par les agents du mouvement de renversement" du régime (4).

La répression sévit, les initiatives populaires se multiplient

Pendant que le régime profite de la rentrée universitaire pour arrêter les étudiant-es soupçonné-es d’avoir participé aux manifestations post-électorales ou pour leur interdire à jamais de poursuivre leurs études, la résistance populaire réinvente sans cesse ses moyens d’action. Ainsi, des slogans anti-régime sont écrits sur des billets de banques et passent de mains en mains, sans que la milice islamique ne puisse les détruire.

Des poèmes de résistance sont aussi échangés tels celui-ci du grand poète du Xe siècle Ferdôssi ° :

    L’ennemi nous a dominés depuis le jour
    Où l’ombre a couvert notre esprit et notre sagesse
    Quand le lâche gouverne le village
    Le paysan est obligé de mendier
    Mieux vaut te livrer corps et âme aux flammes
    Que d’être en vie et continuer ainsi
    Si l’esclavage est l’essence de la vie
    Mieux vaut mourir deux cents fois
    Allons réagissons avec courage
    Secouons ce fardeau d’infamie

À l’étranger, les Iranien-nes lancent des pétitions demandant à l’ONU de ne pas reconnaître l’usurpateur Ahmadinejad comme président, d’annuler sa participation à l’Assemblée générale du 23 septembre et si, toutefois, on ne peut l’empêcher de parler, de quitter la salle en signe de protestation (5). D’autres réclament qu’on l’arrête et qu’il soit jugé pour crimes contre l’humanité.

Lors de la soirée de clôture du Festival des films du monde de Montréal, des manifestant-es portant des t-shirts et des ballons verts ainsi que des photos des victimes de la répression ont manifesté le long du tapis rouge en apostrophant le réalisateur iranien Panâhi, président du jury, accompagné de la ministre de la culture Christine St-Pierre, qui les ont écoutés et se sont fait filmer avec eux. Un autre moyen d’attirer l’attention des médias sur les crimes commis impunément par la République islamique d’Iran à la face du monde, en pure violation de la Convention de Genève.

L’amie m’écrit d’Iran : "Ce soir après trois ou quatre jours on entend de nouveau la voix de Téhéran sur les toits. Tu sais que, dernièrement, ils ont saccagé les appartements de ceux qui élevaient la voix. Ils ont pénétré dans les maisons et ont jeté les occupants du haut du 3e ou 4e étage. A Téhéran, à Mashad, à Ispahan. Malgré cela, on entend leur coeur qui bat, qui bat, qui bat... Te souviens-tu dans le film Les visiteurs du soir ? Le diable transforme les amoureux en statue, mais soudain il entend un bruit. Leur coeur bat. Il fouette furieusement la statue et répète : il bat, il bat il bat..." À nous d’entendre ce cœur et de manifester notre solidarité par tous les moyens à notre disposition !

Notes
1. Lire le blog d’Alain Gresh du Monde diplomatique.
2. Tarek Fatah, The National Post, le 22 juillet 2009 et lire la traduction.
3. Témoignages de femmes violées I et 2.
4. "Mahmoud Ahmadinejad veut punir les chefs de l’opposition".
5. Pétitions contre la présence d’Ahmadinejad à l’Assemblée générale de l’ONU.

Élaine Audet


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