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Abolition de la Commission de l’équité salariale : un recul inacceptable pour les femmes !

20 juillet 2010

par Carole Poirier, députée d’Hochelaga-Maisonneuve, Monique Richard, députée de Marguerite-D’Youville

Le dernier budget du gouvernement Charest comportait une bien triste nouvelle pour les femmes, soit l’abolition de la Commission de l’équité salariale. Cet organisme, créé lors de l’adoption de la Loi sur l’équité salariale en 1996 et votée à l’unanimité par l’Assemblée nationale, veillait à assurer l’application et le maintien de l’équité salariale dans les entreprises du Québec. La création de cet organisme, dédié exclusivement au respect du droit des femmes à l’équité salariale, était une innovation québécoise dont nous pouvions être fiers et elle a été nombre de fois citée en exemple dans le monde.

Par ailleurs, la Commission de l’équité salariale avait développé, au fil des ans, une expertise extrêmement fine et unique en ce domaine. Différentes sources proches du dossier nous confirment que plusieurs employé-e-s, qui avaient développé une expertise importante, ont quitté la Commission ou sont en voie de le faire. Ils et elles seront difficilement remplaçables et le gouvernement devra investir temps et argent afin de former de nouvelles personnes qui devront veiller à ce que la loi soit appliquée. Voilà qui nous apparaît comme une perte de temps et d’argent injustifiée pour un gouvernement qui veut rationaliser ses dépenses.

Cependant, ce qui est le plus absurde dans cette décision, c’est que le gouvernement, lors de la révision de la loi en 2009, n’avait cessé de vanter les mérites de la Commission, et avec raison !, en allant jusqu’à augmenter substantiellement son budget et son personnel, en plus de créer un comité des partenaires afin d’accompagner la Commission dans son mandat. Le premier ministre avait même déclaré publiquement à ce moment, alors que la crise économique occupait toutes les tribunes : « Il ne s’agit pas de dire aux Québécois : c’est l’égalité ou c’est l’économie, parce que c’est les deux. Et traiter de manière équitable un citoyen et une citoyenne du Québec, c’est un droit. Un ne s’oppose pas à l’autre et ça n’a jamais été le cas ». Aujourd’hui, la réalité est toute autre et le premier ministre a laissé tomber le droit des femmes à l’égalité.

L’abolition de la Commission de l’équité salariale et le transfert de son mandat à la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse provoquent un recul important, soit un retour avant l’adoption de la Loi sur l’équité salariale de 1996. En effet, le fonctionnement de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse est basé sur le dépôt de plaintes par un individu. La mission de la Commission de l’équité salariale avait été élaborée afin de répondre à plusieurs personnes à la fois. Ce qui ne sera plus possible dans l’avenir. Pour les femmes qui devront reprendre le combat de façon individuelle, le gouvernement crée un recul important en matière de droit à l’équité.

Ce qui est encore plus surprenant, c’est que nous ne connaissons nullement le montant des économies qui seront réalisées en abolissant cet organisme. Lorsque nous les avons interpellés à ce sujet lors de l’étude des crédits budgétaires, tant la ministre responsable de la Condition féminine, Christine St-Pierre, que le ministre du Travail, Sam Hamad, ont été incapables de chiffrer ces économies, même pas le début du commencement d’une approximation ! Nous concluons que le gouvernement a pris la décision d’abolir cet organisme dans la plus complète improvisation, sans même avoir fait une évaluation complète des économies projetées !

On nous rétorquera sans doute qu’il n’y a pas de petites économies dans le contexte budgétaire difficile que connaît le Québec, c’est vrai. Mais les véritables économies sont celles qui sont dûment réfléchies, planifiées et dont on a mesuré les impacts et les conséquences sur le long terme. Rien de tout cela ne nous a été démontré jusqu’à maintenant. Nous disons donc haut et fort que jamais nous n’accepterons que des économies de bouts de chandelle se fassent au détriment des droits des femmes, sur le dos des femmes. Jamais !

Carole Poirier
Députée d’Hochelaga-Maisonneuve
Porte-parole de l’opposition officielle en matière de condition féminine et d’habitation

Monique Richard
Députée de Marguerite-D’Youville
Porte-parole de l’opposition officielle en matière d’emploi et de solidarité sociale

* NOTA BENE

Sisyphe a ajouté l’illustration publiée à ce lien.

Mis en ligne sur Sisyphe, le 14 juin 2010

Carole Poirier, députée d’Hochelaga-Maisonneuve, Monique Richard, députée de Marguerite-D’Youville


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