source - http://sisyphe.org/article.php3?id_article=3754 -



Des mesures concrètes pour Intégrer les femmes aux grands choix économiques, sociaux et environnementaux
Avis du Conseil du statut de la femme portant sur le 2e plan d’action de la Politique gouvernementale pour l’égalité entre les femmes et les hommes

12 février 2011

par le Conseil du statut de la femme du Québec

Québec, le 19 janvier 2011 — « Contrairement à l’idée trop répandue que l’égalité entre les femmes et les hommes est déjà atteinte, les inégalités perdurent. Nos indicateurs le montrent clairement. Les acquis sont menacés et les dangers de recul sont nombreux. » C’est ainsi que la présidente du Conseil du statut de la femme, Mme Christiane Pelchat, a sonné l’alarme lors des consultations de l’Assemblée nationale portant sur le deuxième plan d’action de la Politique gouvernementale pour l’égalité entre les femmes et les hommes.

« Aujourd’hui, les femmes travaillant à temps plein reçoivent un salaire annuel moyen de 39 100 $ comparativement à 51 400 $ pour les hommes. Contrairement à la croyance populaire et malgré l’application de la Loi sur l’équité salariale, les femmes ne gagnent encore que 76% du salaire des hommes », a expliqué Mme Pelchat.

« Les progrès effectués par les femmes sont récents et encore très fragiles. Dans le nouveau plan d’action, le gouvernement doit réitérer fermement son engagement en faveur de l’égalité et proposer des mesures concrètes pour corriger les situations où persistent les inégalités », a ajouté la présidente du Conseil du statut de la femme.

En effet, les indicateurs montrent que l’atteinte de l’égalité entre les sexes demeure un défi important :

  • Les femmes restent confinées dans les 10 professions traditionnellement féminines, souvent moins bien rémunérées. Elles sont encore, 20 ans plus tard, principalement secrétaires, vendeuses, caissières ou commis de bureau ;
  • Cela n’est pas étonnant puisque le choix d’études et de carrière des filles s’inspire du rôle traditionnel des femmes au sein de la famille. À la formation professionnelle au secondaire, les 10 programmes les plus féminins, dont le secrétariat, l’assistance et les soins infirmiers, la coiffure et l’esthétique, attiraient 64,6% des étudiantes (2008-2009) ;
  • Les femmes sont absentes du sommet de la hiérarchie des entreprises et des lieux de pouvoir ;
  • Les femmes passent moins de temps à gagner de l’argent que les hommes parce qu’elles doivent se consacrer à des activités gratuites. Elles allouent 54,1% de leur temps aux tâches domestiques, comparativement à 34,2% pour les hommes (2005), et plus du tiers d’entre elles (34,1 %) dévouent 15 heures ou plus par semaine aux soins des enfants, ce qui est le cas de 21% des hommes seulement (2006) ;
  • C’est pourquoi les femmes sont plus exposées au risque de la pauvreté que les hommes, en particulier les femmes chefs de famille monoparentale, celles qui vivent seules et les femmes âgées. Elles sont les plus pauvres dans toutes les catégories d’âge.

    L’avis du Conseil présente, en cinq volets, les enjeux actuels de la Politique gouvernementale pour l’égalité entre les femmes et les hommes et cible les domaines d’intervention prioritaires : une stratégie pour atteindre l’égalité entre les femmes et les hommes, les inégalités économiques, le financement des soins de santé et des services sociaux, l’accès des femmes aux postes de responsabilité et le développement durable.

    Une stratégie pour atteindre l’égalité entre les femmes et les hommes

    Le Conseil rappelle qu’une stratégie gouvernementale efficace pour réduire ou éliminer les inégalités doit miser sur l’approche spécifique et l’utilisation de l’analyse différenciée selon les sexes (ADS) afin d’éliminer la discrimination systémique.*

    Le Conseil du statut de la femme fait cinq recommandations à la ministre de la Condition féminine relativement aux approches.

    De plus, la production ou la reproduction des stéréotypes constitue une manifestation de l’inégalité entre les sexes. Pour le Conseil, le Québec gagnerait à mieux cerner ce processus, s’il veut parvenir à ce que les rapports entre les femmes et les hommes deviennent égalitaires dans les faits.

    Le Conseil du statut de la femme formule neuf recommandations visant à éradiquer la discrimination systémique dont les femmes font encore l’objet, notamment à cause de la persistance des stéréotypes sexuels.**

    Les inégalités économiques

    Non seulement les femmes sont-elles toujours moins nombreuses que les hommes à occuper un emploi, mais elles consacrent en moyenne moins de temps qu’eux au travail rémunéré. Elles sont beaucoup plus nombreuses à travailler à temps partiel que leurs collègues masculins (75% des travailleuses à temps partiel sont des femmes). La présence d’enfants pénalise davantage leur taux d’emploi que celui des hommes.

    De plus, les dispositions fiscales et les programmes sociaux, basés sur le revenu familial, ont souvent pour effet de rendre peu avantageuse financièrement la participation au marché du travail des femmes mariées.

    « La société n’a pas intérêt à reléguer les femmes à un statut de main-d’œuvre d’appoint. Au contraire, on a avantage à favoriser leur pleine intégration économique afin de profiter de leur expertise et de leur potentiel », a précisé Mme Pelchat.

    L’autonomie économique des femmes est essentielle tout au long de leur vie. Puisque les politiques macroéconomiques influencent les conditions de cette autonomie (emploi bien rémunéré, partage équitable des responsabilités familiales, congés et interruptions de carrière), le Conseil propose que tout mémoire déposé au Conseil des ministres comprenne une nouvelle section décrivant l’influence de la mesure envisagée sur l’égalité entre les femmes et les hommes.

    Le Conseil du statut de la femme propose l’adoption d’un budget sexospécifique qui prenne en compte les priorités et les besoins différents des femmes et des hommes, autant dans la perception des revenus que dans l’allocation des dépenses.

    Pour rencontrer les objectifs d’égalité, en contexte de relance économique a fortiori, le Conseil propose d’effectuer l’ADS lors de l’investissement des fonds publics afin de s’assurer que les femmes bénéficient également des retombées économiques publiques.

    Le Conseil insiste également pour que les entreprises en relation d’affaires avec le gouvernement soient tenues de respecter le programme d’obligations contractuelles, notamment en proposant un plan d’accès à l’égalité pour une plus grande présence des femmes dans l’entreprise. Actuellement, seulement 11% des entreprises s’y conforment.

    Pour briser les inégalités économiques entre les femmes et les hommes, le Conseil du statut de la femme propose 30 recommandations.

    Le financement des soins de santé et des services sociaux

    Dans le secteur de la santé et des services sociaux, les femmes forment la majorité de la main-d’œuvre rémunérée et des bénévoles. Elles représentent la majorité des personnes qui portent assistance à leurs proches lorsque ceux-ci sont malades ou en perte d’autonomie. Elles sont aussi, plus souvent que les hommes, amenées à consulter des spécialistes de la santé en raison de leur système reproductif, des maternités et de leur longévité. Pour toutes ces raisons, mais aussi parce qu’elles ont généralement une capacité de payer inférieure à celle des hommes, les femmes sont particulièrement concernées par l’organisation et le financement des soins de santé.

    À ce sujet, la présidente du Conseil du statut de la femme est formelle : « S’attaquer à l’accès universel du système de santé ne peut qu’atteindre directement les femmes. Le gouvernement doit stopper la croissance de l’utilisation des services privés de santé et faire respecter la Loi sur les services de santé et les services sociaux ainsi que les lois québécoises sur l’assurance-hospitalisation et sur l’assurance maladie. »

    Par ailleurs, la contribution santé prévue annuellement par l’entremise de la déclaration de revenus des particuliers constitue une taxe régressive qui pénalise plus durement les femmes.

    Pour le Conseil, les lois québécoises en matière de santé et de services sociaux doivent continuer à s’inspirer des principes de gestion publique, d’intégralité, d’universalité, de transférabilité et d’accessibilité inscrits dans la Loi canadienne sur la santé. Le Conseil du statut de la femme émet 11 recommandations en ce sens.

    L’accès des femmes aux postes de responsabilité

    Le pouvoir, qu’il soit économique, politique ou scientifique, demeure difficilement accessible aux femmes. On constate en effet que les femmes sont largement minoritaires parmi les titulaires de revenus élevés et à la tête des entreprises. Elles ne représentent que 30,3% du corps professoral universitaire et 15,8% des membres aux conseils d’administration des 100 principaux employeurs privés du Québec. Elles ne forment que 29,6% de la députation à l’Assemblée nationale, 29,2% des conseillers municipaux et 16% des personnes élues à la mairie.

    « Pour participer pleinement aux débats et avoir une réelle influence, il faut que les femmes élues occupent au moins 40% des sièges. Cet objectif de mixité égalitaire doit s’inscrire dans les fondements démocratiques et électoraux du Québec. Il faut adopter des règles capables d’amener les instances démocratiques à une représentation égalitaire des deux sexes », a insisté la présidente du Conseil du statut de la femme.

    Pour favoriser l’accès des femmes aux postes de responsabilité, le Conseil du statut de la femme propose cinq recommandations.

    Par ailleurs, le Conseil a publié un avis important sur ce sujet en décembre dernier, La gouvernance des entreprises au Québec : où sont les femmes ?

    Le développement durable

    Le développement ne peut être durable sans l’objectif de l’atteinte de l’égalité entre les sexes.

    La pleine participation des femmes et le principe de l’égalité entre les femmes et les hommes sont visiblement présents dans les travaux des organisations internationales en matière d’environnement et de développement durable. « Cette préoccupation fait défaut à la démarche québécoise et le moment est venu de réviser cette lacune. L’égalité entre les femmes et les hommes n’est pas qu’une question de justice, mais elle est un indicateur de la capacité de développement d’une société », a indiqué Mme Pelchat.

    Pour que l’égalité des sexes devienne une réalité de fait et que le Québec soit à l’avant-garde en matière d’égalité entre les femmes et les hommes et de développement durable, il est fondamental que la dimension environnementale et, plus globalement, la dimension du développement durable fassent partie du prochain plan d’action en matière d’égalité. Le Conseil du statut de la femme a formulé deux recommandations dans ce sens.

    * La discrimination systémique

    L’une des sources d’inégalité réside dans la discrimination systémique envers les femmes. Il s’agit d’une forme de sexisme qui n’est pas volontaire, mais qui se reproduit parce que le système, basé sur la tradition patriarcale, n’est pas remis en question.

    La discrimination systémique repose sur la socialisation des genres et l’intégration de rôles différenciés selon le sexe. En maintenant les femmes et les hommes dans des rôles socialement prédéterminés, la division sociale des sexes défavorise les femmes lorsqu’elles veulent se réaliser en dehors de leur rôle traditionnel et exercer pleinement leurs aptitudes et leurs droits.

    ** Les stéréotypes, témoins dérangeants de l’inégalité

    Les stéréotypes sexuels sont omniprésents, ils habitent chacun d’entre nous. Nous les appelons en renfort pour classer ou mémoriser de l’information, se faire une opinion, comprendre une personne ou encore pour se définir, se distinguer des membres de l’autre sexe et interagir avec eux. Malgré cela, les attentes traditionnelles (stéréotypées) sur la façon dont les femmes et les hommes doivent se comporter peuvent avoir de graves conséquences sur la santé et sur le bien-être des femmes et des hommes.

    Pour contrer efficacement les stéréotypes, il importe que tout le monde, quels que soient son âge, son sexe et sa fonction, en prenne conscience, les repère et sache les décoder. Il faut aussi s’assurer que les jeunes générations pourront développer des rapports sociaux de sexe exempts de stéréotypes et basés sur le respect de l’égalité.

    On peut télécharger ces documents en format PDF

     Avis. 
     Résumé.
     
    Liste des recommandations.
     L’égalité en chiffres.

     Voir aussi cette page, qui présente une vidéo.

    Profil d’organisation

    Le Conseil du statut de la femme est un organisme gouvernemental de consultation et d’étude qui veille, depuis 1973, à promouvoir et à défendre les droits et les intérêts des Québécoises.

    Dans un objectif d’atteinte de l’égalité entre les femmes et les hommes, le Conseil du statut de la femme :
      Conseille la ministre et le gouvernement du Québec sur tout sujet lié à l’égalité et au respect des droits et du statut de la femme.
      Fournit de l’information pertinente aux femmes et au public.

    Mis en ligne sur Sisyphe, le 19 janvier 2011

    le Conseil du statut de la femme du Québec

    P.S.

     Voir "La vision de Christiane Pelchat", sur RDI.




    Source - http://sisyphe.org/article.php3?id_article=3754 -