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Journée internationale des femmes
Interpellation de l’ambassade d’Iran à Paris

12 mars 2011

par Des militantes des droits des femmes

Il y a 32 ans, la veille du 8 mars, l’ayatollah Khomeiny a conditionné la présence des femmes dans les lieux de travail au port du voile islamique. Les manifestations de femmes contre cette mesure ont été réprimées et, rapidement, les femmes iraniennes, de toutes religions, convictions et origines, ont été obligées de se voiler dans les lieux publics.

En même temps, par l’idéologisation de la religion et l’instauration de la charia, vous, les gouvernants, vous avez confirmé le statut inférieur des femmes en tant que deuxième sexe, et, du mariage au divorce en passant par la garde des enfants et d’autres champs, vous avez sacralisé les discriminations sexistes.

Vous avez affirmé le droit des hommes à posséder 4 épouses permanentes et des dizaines d’autres femmes par le mariage temporaire ; ce qui est censé leur apporter le bonheur ici et dans l’au‐delà.

Vous avez obligé les filles à porter le voile à l’école dès l’âge de 6 ans et vous avez limité leur accès à l’université par des quotas sexués.

Vous avez imposé des doubles discriminations aux femmes appartenant aux minorités ethniques et religieuses, et à celles qui ont des convictions différentes des vôtres.

En tant que gouvernants, vous avez tiré un trait sur toutes les luttes des femmes iraniennes d’avant la révolution et considéré toutes les personnes qui défendent l’égalité des sexes comme des antirévolutionnaires, blasphématrices, occidentalisées et vendues aux ennemis.

Vous avez repoussé violemment les revendications des droits des femmes sous divers prétexte comme la guerre Iran‐Irak, puis la reconstruction du pays et enfin la lutte contre l’occidentalisation. Ainsi, les défenseurs de l’égalité des sexes, tout comme les autres militant‐e‐s des mouvements sociaux et citoyens, font l’objet de vos constantes répressions.

En dépit de cela, dans leur lutte contre des lois misogynes, les femmes iraniennes ont tout fait, dans la mesure du possible, pour affirmer leur présence dans les champs sociaux, culturels, artistiques et scientifiques. Leur présence est si visible et leur voix si sonore que vous avez désigné la défense de l’égalité des sexes comme une menace contre la sécurité du pays et un délit. Les militant‐e‐s de la campagne « Un million de signatures pour l’abrogation des lois discriminatoires envers les femmes » ont été condamné‐e‐s à la prison, à la flagellation et à des sanctions financières.

Dans les révoltes populaires de juin 2009, les femmes ont été, à côté des hommes, très présentes dans les rangs des manifestants, et ont revendiqué leurs droits humains. Depuis le début de l’année, au moins 3 de ces manifestant‐e‐s ont été tué‐e‐s par balle dans les rues, des dizaines blessé‐e‐s et des centaines arrêté‐e‐s.

L’année dernière, Nasrine Sotoudeh, l’avocate des prisonnier‐e‐s politiques et la défenseuse des droits des femmes, a été condamnée à 10 ans de prison, à 20 ans d’interdiction d’exercice de son métier et à 20 ans d’interdiction de sortie du territoire.

Bahareh Hedayat, militante du mouvement étudiant, a été condamnée à 9 ans de prison.

Les prisonnier‐e‐s politiques sont privé‐e‐s de la visite de leur famille et quotidiennement mis‐e‐s au secret.

Les militant‐e‐s politiques et civiques sont obligé‐e‐s de quitter l’Iran ou réduit‐e‐s au silence.

Shirin Alam Holi, militante kurde active, a été exécutée. Le nombre des personnes qui sont sur la liste d’exécution, s’accroît chaque jour et nous n’avons aucune nouvelle des condamné‐e‐s à la lapidation.

Depuis 2 semaines, Mesdames Rahnavard et Karoubi, les épouses de Moussavi et Karoubi, les candidats protestataires de la dernière élection présidentielle, sont enfermé‐e‐s dans leur propre maison, sans aucun contact avec le monde extérieur : même les femmes qui, pendant des années, ont participé à votre système, ne sont pas à l’abri de votre répression.

En ce 8 mars 2011, les femmes tunisiennes et égyptiennes fêtent la fin de la dictature, pendant que les femmes iraniennes crient pour la liberté et l’égalité. Elles savent que la démocratie est impossible sans l’égalité des sexes et que la seule voix pour garantir la dignité humaine réside dans le respect des droits humains universels dont font partie l’égalité et la liberté des femmes. Or, tout cela n’est réalisable qu’avec la séparation de la religion et du politique.

La lutte pour l’égalité et la liberté est internationale.

En cette journée de mobilisation pour les droits des femmes, nous, militant‐e‐s des droits des femmes, intimons l’État iranien de :

. respecter les conventions internationales dont il est signataire ;

. cesser les importantes atteintes aux droits humains et à l’égalité des sexes ;

. abroger les lois discriminatoires sexistes ;

. mettre fin aux violences faites aux femmes, notamment celles exercées au nom de la charia ;

. supprimer l’obligation du port du voile ;

. libérer sans condition les prisonnier‐e‐s politiques ;

. garantir la liberté d’opinion, d’expression et de revendication.

Manifeste publié à l’occasion de la manifestation féministe du 5 mars 2011, pour la Journée internationale des femmes.

Mis en ligne sur Sisyphe, le 6 mars 2011

Des militantes des droits des femmes


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