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Le fantasme d’une femme de chambre : être violée par un puissant ?

19 mai 2011

par Dre Michèle Dayras, présidente de SOS-SEXISME

Depuis plusieurs jours, nous assistons à un véritable délire médiatique en France.

Dominique Strauss-Kahn aurait été victime d’un complot destiné à stopper sa progression vers la fonction suprême. Et cela, du fait d’une femme de chambre, sans doute émoustillée par sa nudité dévoilée et par la perspective d’une manne financière.

En tant que féministes, nous sommes étonnées de la différence de ton employée à l’encontre du présumé agresseur et de la présumée victime, et du manque total d’impartialité dans les écrits et les discours diffusés.

Certains journalistes et politiques usent et abusent de mots de sympathie, de solidarité, de bienveillance, voire de complaisance ou d’indulgence envers DSK. Et ils font des plaisanteries misogynes blessantes, manifestant une fraternité virile d’hommes toujours prêts à défendre leurs prérogatives sur leur terrain de chasse privilégié : les femmes.

Oui, DSK doit bénéficier de la présomption d’innocence, mais sans doute faut-il prendre en considération, si les faits qui lui sont reprochés s’avèrent exacts, l’extrême détresse dans laquelle peut se trouver la femme mise en cause, pour ne pas dire en accusation. Jeune, noire, immigrée, agressée sexuellement par un homme blanc, riche et âgé. Tous les ingrédients d’une tragédie sont présents : racisme plus sexisme, face au machisme patriarcal tout puissant.

Nous demandons un peu de tact, de décence et d’humanité vis-à-vis de cette présumée victime, qui a eu le courage de porter plainte, ce que très peu de femmes violées sont capables de faire, souvent empêchées d’agir pour d’obscures raisons, familiales, sociales, professionnelles ou autres.

Cette jeune Guinéenne, qui risque la prison en cas d’accusations mensongères, mérite notre solidarité féministe et sororale, en attendant que la justice établisse la vérité.

Les viols ne sont pas la traduction de pulsions masculines. Ils sont la forme extrême du mépris, de la haine et de la peur que les hommes ont des femmes.
Le comportement prédateur que s’autorise le sexe masculin est facilité par la banalisation de la violence faite aux femmes dans notre société, et par une législation inexistante, ou souvent laxiste, ou bien non appliquée pour leur venir en aide.

Ce qui prime alors, c’est la loi du plus fort ! La France, machiste, ne protège-t-elle pas un cinéaste pédophile et n’a-t-elle pas accepté qu’on laisse sortir le meurtrier d’une femme, après quatre petites années d’emprisonnement ?

Souhaitons que la justice américaine soit moins sexiste.

Mis en ligne sur Sisyphe, le 18 mai 2011

Dre Michèle Dayras, présidente de SOS-SEXISME


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