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Charia au Québec - Des propos qui méritent d’être dénoncés

11 décembre 2011

par Collectif d’auteurs

Le 22 novembre dernier, le Téléjournal de Radio-Canada rapportait les propos ahurissants de l’imam du Centre communautaire de Brossard, Foudil Selmoune, propagandiste de la charia au Québec.

Ses déclarations ont de quoi alerter les autorités politiques et policières. Dans un état de sérénité totale, Foudil Selmoune explique que la charia commande de couper la main aux voleurs parce que « ça sert de leçon aux autres et ça crée une société et une ambiance où il y a la paix et la justice ». Mais l’imam sait faire preuve de discernement et précise qu’on ne doit pas couper la main « à celui qui vole pour manger, mais seulement à ceux qui ont de l’argent et qui volent ». Nous sommes rassurés !

Selmoune ajoute que la lapidation des femmes, « c’est aussi dans la charia. Il faut voir pourquoi Dieu a fait ces lois : c’est pour créer une société saine, pure, claire, équilibrée et balancée. C’est pour éviter les crimes, éviter les malentendus. [...] Ce n’est pas nous qui nous donnons ce droit ; ce sont des lois de Dieu et on ne peut pas les changer. »

En octobre dernier, l’annonce de la venue à Montréal des islamistes Abdur Raheem Green et Hamza Tzortzis, connus pour leur propos justifiant l’amputation des voleurs et la lapidation des adultères et des homosexuels, avait soulevé toute une vague de protestations, qui a amené l’Assemblée nationale du Québec à adopter à l’unanimité une motion exigeant du gouvernement fédéral « qu’il refuse l’entrée au Canada d’Abdur Raheem Green et d’Hamza Tzortzis considérant leurs propos homophobes et leurs discours banalisant la violence envers les femmes ». La même motion affirmait que « ces positions rétrogrades n’ont pas leur place dans une société démocratique et vont à l’encontre des valeurs fondamentales de la société québécoise, soit l’égalité entre les hommes et les femmes et le respect de l’intégrité physique des personnes ».

Danger à nos portes

En toute logique avec cette résolution, nous sommes en droit de demander une enquête sur Foudil Selmoune et, éventuellement, qu’il soit traduit en justice. Cela nous paraît d’autant plus impérieux que, dans le cas des deux Britanniques, le danger était encore à l’extérieur du pays alors que, dans le cas de l’imam de Brossard, le danger est dans nos murs.

Les propos rétrogrades, barbares et inhumains tenus par M. Selmoune surviennent au moment même où le Québec demande à être exempté de l’application de la loi canadienne sur les jeunes contrevenants parce qu’il juge trop sévères et contreproductifs les changements répressifs apportés à cette loi. Peut-on en même temps rechercher la réhabilitation des contrevenants et laisser se répandre dans les lieux de culte un enseignement qui nie l’égalité des personnes et qui prône le recours à la torture et la mise à mort sauvage et barbare pour punir des comportements moraux différents de ceux enseignés par leur doctrine religieuse ?

Entamer des poursuites contre M. Selmoune ne serait pas un précédent. En France en 2005, l’imam Abdelkader Bouziane a été condamné à six mois de prison avec sursis, après avoir fait face à une ordonnance d’expulsion, pour avoir tenu les mêmes propos que M. Selmoune considérés en France comme portant atteinte à la sécurité publique. En Espagne, en 2004, l’imam Mohamed Kamal Mustapha a été condamné à 16 mois de prison (peine commuée par la suite à 22 jours avec obligation de suivre une formation sur les droits de la personne) pour avoir expliqué, dans son livre La femme dans l’islam, comment battre sa femme sans laisser de marques.

Fixer les limites

Que ces imams et leurs émules croient que ces comportements non civilisés sont voulus par leur dieu les regarde. Mais une telle croyance ne fait que démontrer la nécessité de l’indépendance des États par rapport aux religions. Ce sont les lois civiles qui ont permis de freiner les ardeurs des intégristes religieux et d’assurer le progrès des libertés humaines. Se réfugier derrière la notion de « lois divines » ne saurait être un argument valable pour refuser les fondements de la démocratie que sont la laïcité et l’égalité des personnes. Lorsque des croyances religieuses menacent ces acquis, il est du devoir d’un État d’intervenir.

Le gouvernement doit savoir fixer des limites claires au-delà desquelles les propos diffamants et menaçant la sécurité publique ne sont plus acceptés. Les enseignements de Foudil Selmoune sont contraires aux droits de la personne et à nos lois ; ils vont au-delà de la liberté de religion et de la liberté d’expression et on ne saurait les tolérer dans une société démocratique et civilisée.

Ont signé ce texte : Bernard Andrès, professeur associé de littérature, UQAM ; Daniel Baril, anthropologue et journaliste ; Bernard Beugnot, professeur émérite, UdeM ; Francine Descarries, professeure de sociologie, UQAM ; Jean Fisette, professeur associé, UQAM ; Lucie Jobin, présidente, Mouvement laïque québécois ; Yvan Lamonde, professeur émérite d’histoire et littérature, Université McGill ; Jean-Pierre Lemasson, professeur retraité, UQAM ; Louise Mailloux, professeure de philosophie, cégep du Vieux Montréal ; Guy Rocher, professeur émérite de sociologie, UdeM ; Paul Sabourin, professeur de sociologie, UdeM ; Michèle Sirois, coordonnatrice, Coalition laïcité Québec.

Publié aussi dans Le Devoir, le 5 décembre 2011.

Mis en ligne sur Sisyphe, le 8 décembre 2011

Collectif d’auteurs


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