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Mettons fin au massacre des femmes – Mettons fin à la lapidation !

4 janvier 2012

Le 23 novembre 2011, à Paris, dans le cadre des journées internationales de lutte contre les violences faites aux femmes, cette conférence à été dédiée à deux femmes et personnalités politiques qui ont longuement lutté pour la cause des femmes et aussi pour celle du peuple kurde : Danielle Mitterrand et Sirin Elhemhuli. Près de cent femmes et hommes ont participé à la conférence « Stoppons le massacre des Femmes – Stoppons la lapidation ! » La conférence qui a traité du féminicide et, plus particulièrement de la lapidation, s’est attachée à analyser cette question à partir d’exemples venant de pays comme l’Iran, le Kurdistan, l’Afghanistan ... Les débats ont permis de rappeler une réalité : la guerre de longue date et sans merci, qui est menée contre les femmes et dont l’existence est niée. Il faut que cette guerre qui sévit depuis 5 millénaires soit reconnue.

Les exécutions et les lapidations pratiquées dans différents pays sur la base de normes non écrites ou officielles sont la constante de politiques directement liées à la nature patriarcale des sociétés.

La laïcité nécessaire

Le massacre des femmes est commis sous le couvert du respect de la religion, de la culture et de la tradition. La situation de pays comme l’Iran ou l’Afghanistan souligne avec acuité l’urgence de définir clairement les exécutions et la lapidation des femmes comme une méthode d’anéantissement des femmes, la négation de leurs droits fondamentaux, de leurs droits sociaux et politiques, de leur droit à la vie… Elle met également en lumière l’importance de la laïcité.

Toutes les religions monothéistes magnifient la domination masculine et confèrent aux femmes un rôle de second rang. Elles renforcent ainsi les systèmes patriarcaux de pouvoir et contribuent à perpétuer l’esclavage que subissent les femmes, tout en lui assurant une justification au plan légal.

La religion a permis de limiter le rôle des femmes dans les sociétés et tend à la confiner dans le cadre de la famille patriarcale. Aujourd’hui, les ravages du capitalisme et de la mondialisation néolibérale font prospérer l’islam politique. Il a sous sa férule la Turquie et le Kurdistan où sévit un génocide politique dont sont victimes plus d’un millier de femmes détenues politiques. L’Irak et l’Iran appliquent l’islam politique qui est la légitimation de l’oppression et de la persécution des femmes, comme le sont tous les intégrismes religieux.

Dans tous les pays, les statistiques sont très loin de refléter la réalité. Les violences physiques à l’égard des femmes, commises dans les pays mentionnés plus haut, pourraient à elles seules justifier la qualification de massacre. Nous demandons que toutes les violences contre les femmes, à commencer par la lapidation et les crimes d’honneurs, soient définies comme des crimes contre l’Humanité.

Les moyens de lutter contre les massacres, les exécutions et la lapidation sont la mobilisation des mouvements de femmes contre le système patriarcal et les cultures et traditions qui s’en inspirent. L’importance du rôle des femmes dans le processus de démocratisation en cours dans les pays arabes met une nouvelle fois en lumière l’obligation vitale pour elles de s’unir pour faire émerger leurs propres organisations et mettre à l’ordre du jour des agendas politiques nationaux et internationaux, dénoncer la barbarie des exécutions et des lapidations, sans négliger la juridiction internationale qui, en la matière, est imprégnée de culture patriarcale.

La relation des diverses expériences de féminicide souligne l’importance cruciale en ce début du 21e siècle d’avoir un mouvement de femmes organisé, radical, déterminé et solidaire. Les résolutions internationales, les conclusions de la conférence de Pékin sont loin d’être partout appliquées et leur mise en œuvre requiert dans tous les pays la mobilisation des femmes. Pour cette raison, la conférence lance un appel à l’organisation d’un congrès mondial des femmes sur le féminicide, qui concrétisera la recherche d’une solution universelle à cette question, parallèlement au soutien et au renforcement des organisations locales. C’est dans un esprit de partage et de solidarité qu’il sera possible pour les femmes de lutter au plan international contre les massacres et la lapidation.

Fort de centaines d’années de lutte, le mouvement des femmes a une expérience riche, des acquis solides et des avancées importantes. Ainsi, les massacres et la lapidation sont sortis de l’ombre grâce au développement de la conscience de genre chez les femmes, même si le système patriarcal met tout en œuvre pour freiner cette évolution…

Le système capitaliste néolibéral s’attache à limiter les luttes des femmes en se présentant comme garant de leurs droits et de la démocratie. De nombreuses guerres impérialistes, légitimées par le motif de défense des droits des femmes, ont ouvert la porte à d’innombrables massacres dont les femmes sont toujours les premières victimes.

Le viol est utilisé comme une stratégie guerrière. On a notamment pu le voir dans le Darfour et en ex-Yougoslavie. Le viol et le massacre des femmes sont inhérents à la guerre et au militarisme qui normalisent la violence contre les femmes et légitiment les crimes, les coupables demeurant impunis.

La lutte contre les massacres, contre les exécutions et la lapidation des femmes englobe toutes les luttes visant à éradiquer les systèmes de dépendance et d’esclavagisme des femmes, à punir les coupables, à s’opposer à la spoliation des droits de la femme. Ce combat est partie prenante de la lutte contre la guerre et contre la militarisation du monde.

En conclusion, la conférence :

1 - Appelle à l’action des femmes pour la mise en place de contrats sociaux alternatifs aux systèmes étatiques patriarcaux qui légitiment toutes les atteintes aux droits des femmes.

2 - Appelle à la mise en commun des luttes menées dans les différents pays contre les exécutions et la lapidation pour mutualiser les expériences de résistance. C’est dans cet esprit que la conférence appelle à une rencontre mondiale de femmes sur ces questions.

3 - Appelle à la poursuite des efforts pour que le féminicide soit reconnu par le droit international comme un crime contre l’humanité au même titre que les génocides.

4 - Appelle à la création d’un système juridique alternatif pour lutter plus efficacement contre les exécutions.

5 - Appelle à redéfinir clairement la lapidation et les exécutions comme partie intégrante d’un génocide politique des femmes et à mettre en accusation les États qui exercent ou couvrent de telles exactions.

6 - Appelle à l’arrêt immédiat de toutes ces pratiques, au gel de toutes les décisions d’exécution ou de lapidation qui auraient pu être prises par un de ces pays et à leur abolition pure et simple.

7 - Appelle à la mise en place d’initiatives internationales afin de sauver des femmes condamnées à mort, comme Zeynep Celaliyan. Il est nécessaire et urgent de mettre sur pied des campagnes de soutien aux femmes détenues en Iran et en Irak.

8 - Appelle à la prise de sanctions contre les États qui perpétuent de telles pratiques.

9 - Appelle les mouvements et organisations de femmes à agir ensemble pour y mettre fin sur la base de plateformes communes.

Les participant-es à la conférence « Stoppons le massacre des Femmes – Stoppons la lapidation ! »

Paris, 23 novembre 2011

Mis en ligne sur Sisyphe, le 2 janvier 2012




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