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Le printemps est une saison féminine

31 janvier 2012

par Tine Danckaers, MO

Les femmes sont bonnes pour les révolutions, mais les révolutions ne sont pas bonnes pour les femmes, a écrit un (ou une) journaliste du Times, alors que le printemps arabe ne faisait que commencer. Après la révolution iranienne, les femmes ont dû se couvrir du tchador. Dans la société palestinienne, l’Intifada – à laquelle les femmes ont participé massivement – après coup, n’a pas apporté aux femmes le bonus de l’égalité.

Le visage du Printemps arabe n’était pas seulement jeune mais remarquablement féminin. De la Tunisie à l’Égypte jusqu’au Yémen et le Bahreïn, les femmes ont manifesté pour des droits démocratiques, soit dans des manifestations séparées, soit côte à côte avec les hommes, avec ou sans foulard.

Au Yémen, qui est pointé comme le pays le plus défavorable aux femmes dans le rapport Fossé global des genres du Forum économique mondial, les femmes qui manifestaient ont rompu les normes sociales. Pour la première fois, des femmes pouvaient exprimer leur mécontentement face à leur exclusion de la vie publique et politique, ai-je lu dans un rapport.

Ailleurs aussi les femmes de la révolution se sont appropriées de nouvelles libertés. Ce qui est en jeu maintenant est de les consolider.

En Tunisie, le pays le plus favorable aux femmes parmi les dictatures arabes rejetées, les femmes ont obtenu 24% des sièges parlementaires après les élections. Très joli, mais les gens se font tout de même du souci, surtout au sujet du programme d’égalité du Parti islamiste Ennahda. Il ne peut pas se limiter à la garantie que le parti n’imposera pas aux femmes les prescriptions islamistes pour les tenues vestimentaires. Dans cette période post-révolutionnaire, ce ne serait pas trop de décider légalement comment donner aux femmes une voix au chapitre citoyen auquel – aussi au nom d’Allah – elles ont droit.

Dans l’Égypte d’après Moubarak, les femmes se sont étouffées avec leur thé quand elles ont appris que le conseil consultatif citoyen pour les réformes avait été baptisé « Le Conseil des hommes sages ». Les femmes n’ont pas reçu voix au chapitre dans le processus de réformes, on n’a pas tenu compte de toutes ces femmes qui avaient peuplé la Place Tahrir.

L’Égyptienne Samira Ibrahim a été arrêtée par l’armée et a été soumise à des tests très humiliants de virginité. Un général a plus tard admis sans gêne à CNN que ces tests ainsi que des incidents semblables avaient eu lieu, « en premier lieu pour prouver que ces jeunes femmes n’étaient absolument pas vierges, donc pas des filles comme vous et moi en avons ».

Cette réponse révèle ce que pense une partie de la population masculine égyptienne de femmes « trop » émancipées. D’abord un changement politique, ensuite les droits des femmes suivent d’eux-mêmes, cela ne marche pas. Ce serait tout de même absurde de ne pas lutter dans des mouvements démocratiques contre l’oppression des femmes au sein d’une société.

C’est aussi ce que déclare fermement la lauréate iranienne du Prix Nobel, Shirin Ebadi : « Si les femmes ne reçoivent pas plus d’égalité et de libertés individuelles, dans ce cas, il ne peut pas être question d’une vraie révolution qui conduit à une vraie démocratie » ?

Synthèse parue dans le mensuel altermondialiste flamand, Moyen Orient*, janvier 2012. Traduction : Édith Rubinstein, liste de diffusion Femmes en noir, le 28 janvier 2012.

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Mis en ligne sur Sisyphe, le 28 janvier 2012

Tine Danckaers, MO


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