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La flûtiste Ariane Brisson reçoit le Prix d’Europe 2013
52e femme lauréate depuis 102 ans

20 juin 2013

par Micheline Carrier

La flûtiste Ariane Brisson est devenue samedi dernier la 102e lauréate du Prix d’Europe, un prix d’une valeur de 25 000$ offert par le ministère de la Culture et des Communications du Québec.

La jeune femme de 22 ans, qui a commencé l’étude de la flûte traversière à 7 ans, a complété un diplôme d’artiste en interprétation au Conservatoire de musique de Montréal. Elle passera les deux prochaines années à Chicago où elle étudiera avec le flûtiste français Mathieu Dufour, premier-pupitre du Chicago Symphony et professeur de flûte à l’école de musique de la DePaul University (1). Boursière du Domaine Forget et de l’Académie Villecroze en France, la lauréate a aussi été flûte solo de l’Orchestre symphonique du conservatoire et de l’Orchestre national des jeunes du Canada en 2010 et 2011. Elle a reçu en 2012 le premier prix du quintette à vents Pantaèdre et, la même année, le concours de l’Orchestre symphonique de Trois-Rivières l’a choisie comme grande lauréate.

L’Académie de musique du Québec, qui organise annuellement le concours du Prix d’Europe, a décerné une dizaine d’autres prix et bourses. (Voir la liste des récipiendaires sur le site Internet du Prix d’Europe.) Ariane Brisson a aussi remporté la bourse de 2 500$ remise au ou à la meilleur-e candidat-e de la catégorie vents/percussions. Quatre autres jeunes femmes se sont aussi mérité des prix et des bourses cette année.

Le concours du Prix d’Europe 2013 se tenait sous la présidence d’honneur du chef d’orchestre Yannick Nézet-Séguin. Le compositeur et interprète québécois Gabriel Thibaudeau présidait le jury de cinq membres.

Pour l’Histoire

Le Prix d’Europe a vu le jour en 1911 à l’initiative d’un homme d’affaires et organiste, J.-Arthur Paquet, alors trésorier de l’Académie de musique du Québec. Le premier ministre de l’époque, Sir Lomer Gouin, a fait adopter à l’Assemblée législative, le 24 mars 1911, une « Loi pour favoriser le développement de l’art musical », ce qui consacrait la pérennité du projet.

Depuis la création du Prix d’Europe, certains et certaines des meilleur-es instrumentistes, chanteurs et chanteuses, compositeurs (pas de compositrices jusqu’ici) ont pu, grâce à cette bourse, recevoir à l’étranger (2) l’enseignement des plus grands pédagogues.

Parmi les lauréat-es dont les noms sont bien connus : Wilfrid Pelletier, piano (1915) ; Raymond Daveluy, orgue (1948) ; Monik Grenier, piano (1954). L’Académie de musique du Québec décerne d’ailleurs un Prix Monik Grenier, que Mme Grenier elle-même a remis au récipiendaire, le pianiste Steven Massicotte, lors du gala à la Salle Bourgie samedi soir dernier.

Quelques autres lauréat-es du Prix d’Europe : Lise Boucher, pianiste de réputation internationale (1958), présidente actuelle de l’Académie de musique du Québec (fondée en 1868) et responsable du concours Prix d’Europe ; Jacques Hétu, composition (1961) ; Colette Boky, chant (1962), Chantal Juillet, violon (1979) ; Jean Saulnier, piano (1986) ; Wonny Song, piano (2003).

C’est une femme, la pianiste Clodilde Coulombe, qui fut la première lauréate du Prix d’Europe en 1911.

Par curiosité, j’ai relevé le nombre de lauréates et de lauréats de ce concours depuis sa création. J’y ai découvert une légère majorité de femmes (52 lauréates, incluant Ariane Brisson 2013).

Quelque peu étonnant que des femmes aient été lauréates dès les premières années de l’attribution du Prix d’Europe car l’époque très conservatrice de la première moitié du XXe siècle ne reconnaissait le talent des femmes que dans leurs rôles d’épouse et de mère. Mais à cette époque, aussi, la musique faisait partie de la formation générale des filles de bonne famille. Peut-être les filles étaient-elles plus nombreuses que les garçons à recevoir une formation musicale, donc nombreuses à présenter des candidatures de qualité pour le Prix d’Europe.

Les noms de plusieurs des lauréates de cette époque ne sont toutefois pas très connus du public aujourd’hui. Cela tient peut-être au fait, comme l’a mentionné Mme Monik Grenier lors du gala à la salle Bourgie, que la société de l’époque n’admettait pas facilement que les femmes fassent carrière. « Si j’avais été un homme, a dit Mme Grenier, lauréate en 1954, j’aurais probablement fait une carrière de pianiste ».

Fort heureusement, les temps ont changé.

Notes
1. Voir l’article de Claude Gingras, dans La Presse qui donne aussi la liste des récipiendaires des autres prix.
2. À l’origine en Europe, puis aux États-Unis et maintemant partout dans le monde.

* La photo provient du site de l’Orchestre symphonique de Trois-Rivières.

Mis en ligne sur Sisyphe, le 10 juin 2013

Micheline Carrier


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