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Une étude de l’IRIS confirme les craintes du milieu communautaire : l’autonomie de plusieurs organismes est menacée

1er août 2013

par Table des regroupements provinciaux d’organismes communautaires et bénévoles

Montréal, le 11 juin 2013. La plus récente recherche de l’IRIS Les organismes communautaires au Québec : Financement et évolution des pratiques démontre que le milieu de l’action communautaire autonome a raison de craindre les effets de la gestion entrepreneuriale sur ses pratiques.

Formant les trois quarts des organismes communautaires autonomes du Québec, les 3 000 groupes du domaine de la santé et des services sociaux sont particulièrement touchés par les conclusions de cette étude, d’autant plus qu’elle paraît alors que se déroulent des travaux entre le MSSS et le milieu communautaire relativement au financement de ces groupes.

Ainsi selon l’IRIS, les « modalités du financement des organismes communautaires peuvent être garantes de leur autonomie, tout comme elles peuvent, à l’opposé, servir à les contraindre au point de les dénaturer. » Examinant les façons de faire de fondations privées (dont la Fondation Lucie et André Chagnon) et des partenariats public-philanthropie (PPP sociaux), l’équipe de l’IRIS relève que leur « logique descendante contraste avec l’approche ascendante privilégiée par les milieux communautaires, qui met plutôt l’accent sur l’identification par la communauté de problématiques, de priorités et de manières d’y répondre. Elle entrave la logique démocratique et participative que privilégie l’action communautaire autonome ».

L’IRIS critique aussi l’État qui applique au milieu communautaire des pratiques du secteur privé, affirmant que la « gestion entrepreneuriale ainsi que l’évolution vers un financement de ce type » réduisent la capacité d’action des organismes communautaires, augmentent leurs tâches administratives, notamment au niveau de la reddition de comptes, et même interfèrent dans les pratiques des organismes communautaires.

Questionnés pour savoir s’ils ont modifié leurs pratiques pour obtenir une subvention, 19% des organismes rapportent avoir effectué une ou plusieurs modifications, par exemple à leur mission ou à leur fonctionnement, ou s’être abstenu de prendre position publiquement. Les organismes créés il y a 10 ans et moins, de même que ceux dont le budget annuel se situe entre 50 000$ et 99 999$, sont ceux qui ont le plus modifié leurs pratiques. « Dans le contexte où une Politique gouvernementale reconnaît, et encourage, l’autonomie des organismes communautaires, il est anormal qu’autant de groupes aient dû faire des changements aussi importants. Qui plus est, l’IRIS estime qu’il ne s’agit que de la pointe de l’iceberg », de dire Marie Leclerc, porte-parole de la Table des regroupements provinciaux d’organismes communautaires et bénévoles.

Cette situation, déjà très sérieuse, est amplifiée par d’autres conclusions de l’IRIS quant aux pressions que ressentent les organismes communautaires. L’étude nous apprend que 80% des organismes sondés subissent, dans leur quotidien, l’influence de bailleurs de fonds qu’ils côtoient sur des tables de concertation. Pire encore, 70% des organismes jugent que ces bailleurs de fonds influencent leur plan d’action et leur type d’intervention, donc leur autonomie d’action. « L’existence de ce type d’influences, et l’ampleur du phénomène sont d’autant plus inquiétantes que c’est pour combler un financement gouvernemental insuffisant que les organismes communautaires doivent composer avec plusieurs bailleurs de fonds », de dire Sébastien Rivard, porte-parole de la Coalition des tables régionales d’organismes communautaires. La recherche démontre d’ailleurs que 61% des organismes communautaires estiment que la reddition de comptes a augmenté ces dernières années.

« Il est d’autant plus important de miser sur le financement à la mission globale lorsqu’on voit le degré d’importance que les organismes communautaires accordent aux éléments qui réfèrent le plus à ce qui caractérise l’action communautaire autonome : l’enracinement dans la communauté, l’autonomie, l’approche globale, etc. », souligne Sébastien Rivard.

La recherche devrait amener le gouvernement à prendre conscience des conséquences de la gestion entrepreneuriale sur l’autonomie des organismes communautaires autonomes. Il peut agir en ne plaçant pas les organismes communautaires autonomes en position de vulnérabilité financière et en ne calquant pas ses pratiques sur celles du secteur privé.

« Le MSSS doit faire sa part et les travaux en cours avec le comité de coordination de la campagne "Je tiens à ma communauté - Je soutiens le communautaire" peuvent lui permettre de le faire en soutenant davantage la mission globale des organismes communautaires autonomes et en mettant en place un véritable programme national qui y serait dédié », de conclure Marie Leclerc.

La campagne "Je tiens à ma communauté - Je soutiens le communautaire" est une initiative conjointe de la Coalition des tables régionales d’organismes communautaires (CTROC) et de la Table des regroupements provinciaux d’organismes communautaires et bénévoles (Table). La CTROC regroupe 15 Tables régionales d’organismes communautaires. La Table est quant à elle formée de 39 regroupements nationaux. Ces deux organisations nationales totalisent plus de 3000 groupes abordant différentes problématiques liées à la santé et aux services sociaux dans toutes les régions du Québec.

* L’Institut de recherche et d’information socio-économique (IRIS) est un institut de recherche sans but lucratif indépendant et progressiste.

Pour information :

Kim De Baene, Table des regroupements provinciaux d’organismes communautaires et bénévoles, 514-844-1309, site Web.

Mis en ligne sur Sisyphe, le 11 juin 2013

Table des regroupements provinciaux d’organismes communautaires et bénévoles


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