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L’obscurantisme ou les Lumières : le Québec doit choisir

31 décembre 2015

par Diane Guilbault, auteure du livre "Démocratie et égalité des sexes"

Dimanche, 14 novembre 2015. J’étais à la marche organisée par le maire Coderre en hommage à la France et à toutes ces personnes assassinées, froidement.

J’ai entendu la ministre des Relations internationales du Québec dire : « Nous ne plierons pas les genoux » (sic) et je me suis demandée qu’est-ce que cela voulait vraiment dire de la part d’une membre d’un gouvernement qui juge que l’intégrisme, c’est simplement « un choix personnel »….

Un gouvernement qui alimente toutes les confusions entre musulmans et islamistes par son cours d’Éthique et culture religieuse, inculqué de gré ou de force à tous les enfants du Québec.

Un gouvernement qui refuse d’entendre la voix des hommes et des femmes arabes qui veulent être reconnus d’abord comme citoyens plutôt que comme « paroissiens » musulmans.

Ce gouvernement a déposé un projet de loi (62) par lequel il veut légiférer sur les accommodements religieux.

Or, ces accommodements sont souvent les signes avant-coureurs de l’intégrisme religieux. On nous répète ad nauseam que ces accommodements facilitent l’intégration des nouveaux arrivants oubliant que ceux qui les demandent sont souvent nés ici.

Où sont les études qui démontrent hors de tout doute que ces accommodements religieux ont vraiment servi la cause de l’intégration ?

Je crois qu’au contraire de l’intégration, ces accommodements religieux ont divisé plutôt que rapprocher et que nos dirigeant-e-s ont appuyé, sous prétexte d’ouverture à la différence, la partie obscure des religions.

Quand des autorités scolaires acceptent de boucher les oreilles d’une petite fille pour ne pas qu’elle entende de la musique, c’est un point de plus pour le camp obscurantiste.

Quand on accepte que les dirigeants municipaux autorisent des horaires de piscine sur la base de la ségrégation sexuelle, c’est un autre point pour le camp de l’obscurantisme.

Quand on oblige des entreprises à accorder à des employés du temps pour faire leurs prières sur les heures de travail, c’est encore la joie chez les obscurantistes.

Et quand on accepte que des employé-es des services publics, qui doivent porter un uniforme, portent en plus leur uniforme religieux, on leur donne toute la visibilité voulue par les obscurantistes.

On nous explique que les demandeurs d’accommodements religieux doivent respecter certaines « obligations » religieuses.

Ces « obligations » religieuses n’ont de sens que dans une théocratie. En démocratie, ce ne sont que des choix personnels.

Et quelqu’un pourrait-il expliquer pourquoi un dieu imposerait des obligations à certains croyants (et surtout certaines croyantes) et pas aux autres humains ?

Les accommodements religieux ne sont pas des accommodements raisonnables : ils sont des dérogations au vivre-ensemble. Au nom de quoi l’État devrait-il faciliter ces dérogations ?

Si certaines règles ou lois semblent discriminatoires, qu’elles soient alors discutées démocratiquement et, au besoin, changées mais cette fois, pour tous les citoyens et toutes les citoyennes.

Au lieu de répéter comme une incantation « Nous ne plierons pas », le Québec doit agir et choisir son camp : l’obscurantisme ou les Lumières.

Mis en ligne sur Sisyphe, le 16 novembre 2015

Diane Guilbault, auteure du livre "Démocratie et égalité des sexes"

P.S.

 Diane Guilbault, Démocratie et égalité des sexes, Montréal, éditions Sisyphe, 2008.




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