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Lettre ouverte aux féministes québécoises qui s’opposent à l’interdiction du niqab

21 novembre 2017

par Nassira Belloula, écrivaine, Nadia El-Mabrouk, professeure, Université de Montréal, Leila Lesbet, enseignante, Diane Guilbault, vice-présidente de PDF-Québec

En tant que citoyennes de toutes origines, en solidarité avec les femmes de culture ou de foi musulmane, nous nous sentons trahies par les féministes qui s’opposent à l’interdiction du voile intégral (niqab et burqa) et nous leur demandons de revoir leur position à la lumière des enjeux globaux sous-jacents.

Symbole politique plus que signe religieux

Premièrement, le voile intégral est bien plus un symbole politique qu’un signe religieux et il est même interdit pour le pèlerinage à la Mecque. Il est issu de l’extrême droite religieuse qui instrumentalise l’islam à des fins politiques. On ne peut tolérer une telle dérive. Or, la complaisance face au niqab ne fait que renforcer une version sectaire de l’islam, ainsi que les pressions, les violences et l’ostracisme à l’égard des musulmanes qui refusent de s’y conformer. Il faut donc cesser de banaliser le niqab et de le légitimer avec la caution de certains groupes féministes.

Division plus qu’intégration

Deuxièmement, il faut cesser de croire que les accommodements religieux accordés aux membres de groupes minoritaires favorisent leur intégration. Certaines revendications comme celle du niqab ne visent nullement l’intégration à la société, mais bien la division selon un clivage ethno-religieux, ce qui favorise l’emprise des chefs religieux et communautaires auto-proclamés.

Malaise dû non aux préjugés mais à la menace pour les acquis

Troisièmement, nous croyons que le malaise exprimé face au niqab et à d’autres revendications liées à l’islam ne résulte pas nécessairement de préjugés et de racisme, comme certains veulent nous le faire croire. Il tient surtout au fait que ces revendications menacent les acquis du Québec en opposant deux projets de société incompatibles : l’un fondé sur des valeurs universelles de laïcité, de liberté et de respect de l’égalité entre les femmes et les hommes, l’autre basé sur des valeurs religieuses intégristes qui menacent la liberté de conscience, l’égalité entre les sexes et la dignité des femmes.

De plus, le niqab constitue une barrière à la communication et au « vivre-ensemble », et c’est à ce titre que la Cour européenne des droits de l’homme a entériné son interdiction par plusieurs pays européens.

Peur nourrie par la complaisance

Quant à l’argument voulant que l’interdiction du niqab risque d’encourager l’islamophobie et les agressions à l’égard des femmes qui le portent, il ne tient pas la route. Nous croyons au contraire que c’est la complaisance face à ce symbole du patriarcat le plus oppressif envers les femmes, et face à d’autres accommodements religieux controversés, qui contribue à nourrir la peur de l’islam et les discriminations à l’égard des musulmans. Nous sommes en solidarité avec les femmes de culture musulmane, qui sont les victimes collatérales de ces provocateurs, minoritaires, mais très audibles de ladite « communauté musulmane », qui contribuent à nourrir un climat malsain entre musulmans et non musulmans.

Bien entendu, l’interdiction du niqab ne doit en aucun cas légitimer une agression physique ou verbale à l’endroit de celles qui le portent. Des lois existent pour pénaliser, comme il se doit, de tels comportements. Il convient de le rappeler et de sensibiliser l’opinion publique lors de la mise en application de la loi.

Choisir nos solidarités

C’est pourquoi nous demandons aux féministes québécoises et aux défenseurs des droits humains qui s’opposent à l’interdiction du niqab de revoir leur position. L’ouverture à la diversité culturelle et religieuse est certes une attitude positive qu’il faut encourager, à condition de ne pas perdre de vue les intérêts collectifs à long terme de notre société. La complexité des enjeux nous oblige à choisir nos solidarités et nos alliances, sans nous laisser leurrer par le discours fallacieux de certains représentants associatifs qui misent sur la division et la racialisation des rapports sociaux. Ce discours a pour effet de favoriser l’enfermement dans l’assignation identitaire et religieuse.

Une véritable solidarité féministe et antiraciste doit être fondée sur un plan d’action permettant de veiller, de façon proactive, à protéger les droits de toutes les femmes, chèrement acquis à la suite de chaudes luttes au Québec. Nos priorités devraient être axées sur la lutte commune contre l’influence croissante des intégrismes religieux de toutes origines, qui constituent un obstacle majeur au respect de nos droits fondamentaux.

 Suggestion de lectures de Sisyphe :
 "Il faut arrêter de prendre les propagandistes de l’islamisme radical pour de pauvres victimes parmi les plus vulnérables. Depuis toujours, les groupes islamistes ont fait des femmes le fer de lance de leur stratégie d’endoctrinement et d’expansion." Fatima Houda-Pepin, "Le Canada : paradis des islamistes", Le Journal de Montréal.
 "Quand le bon sens se perd sous la burqa", par Josée Boileau, Châtelaine.

 Les femmes qui veulent ajouter leur appui à cette lettre, peuvent envoyer un courriel suivante AVANT LE 30 NOVEMBRE 2017, en mentionnant prénom, nom, occupation (groupe s’il y a lieu) :
pourlesdroitsdesfemmes@pdfquebec.org

 Votre signature sera ajoutée dans les 24 heures.

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PREMIÈRES SIGNATAIRES

. Nassira Belloula, Écrivaine
. Nadia El-Mabrouk, Professeure, Université de Montréal
. Leila Lesbet, Enseignante
. Diane Guilbault, vice-présidente de Pour les droits des femmes du Québec


. Fatima Aboubakr, Directrice de garderie
. Lulwa Aburamadan, Enseignante
. Ahlem Ammar, Universitaire
. Amani Ben Ammar, Agente de gestion financière CIUSSS-Centre Sud de l’île de Montréal
. Leila Ben Amor, Pédopsychiatre
. Zeineb Ben Amor, Etudiante à la maitrise, UQAM
. Radhia Ben Amor, Coordonnatrice de recherche
. Katia Atif, intervenante communautaire
. Olfa Ben Mahmoud, Adjointe gestion de projets gouvernement fédéral
. Salima Ben Mustapha
. Lamia Ben Salah, Femmes en affaire, administratrice, gestionnaire
. Ahlem Brahmi
. Héla Ben Turkia, Technicienne de laboratoire
. Karima Bouabid, Agente au service à la clientèle bilingue à Air Canada
. Samira Boualem, Kinésithérapeute
. Emna Chaabouni, Massothérapeute
. Amel Chikhi, Ingénieure
. Imen Chikhi, Étudiante
. Farida Chemmakh, Adjointe, fonction publique québécoise
. Lamia Cherni, Technicienne en éducation spécialisée
. Nariman Derky, Poète et traductrice
. Jihène Farhat, Agente de service à la clientèle, Mouvement Desjardins
. Anissa Frini, Professeur UQAR
. Chiraz Ghozzi, Chargée de cours à l’UQAM
. Ines Hadjkacem, Étudiante en soins infirmiers
. Raja Haouet, Couturière
. Amel Haroud, Gestionnaire
. Hassiba Idir, Gestionnaire
. Fadhila Jebnoun, Éducatrice retraitée
. Thouraya Kallel
. Radia Kichou, Informaticienne
. Sabra Rezigue, Représentante en plans de bourses d’études
. Bahija Saidani, Directrice des services
. Ferroudja Si Hadj Mohand, Éducatrice
. Tayssir Souissi, Surveillante d’élèves
. Farida Zerar, Enseignante
. Djamila Zergane, Éducatrice
. Nacera Zergane, Conseillère financière
. Hakima Djermoune, Inspecteur au contrôle de la qualité en fabrication de médicaments
. Yasmina Chouakri, politologue
. Atif Sultana, éducatrice
. Fatima Achour, thérapeute
. Siham Kortas, enseignante à la retraite.
. Aïda Nader, actrice

Cette lettre est appuyée par :

. Pour les droits des femmes du Québec (PDF Québec)
. Vivian Barbot, présidente de la Fédération des femmes du Québec de 2001-2003
. Rosette Côté, présidente de la Commission de l’équité salariale de 2002-2007
. Me Christiane Pelchat, présidente du Conseil du statut de la femme de 2006-2011

 AUTRES APPUIS AJOUTÉS DEPUIS LE 8 NOVEMBRE

. Nicole de Sève, militante féministe
. Micheline Carrier, Sisyphe, un regard féministe sur le monde
. Élaine Audet, Sisyphe, un regard féministe sur le monde
. Lucie Martineau, présidente du Syndicat de la fonction publique et parapublique du Québec de 2008 à 2016
. Christiane Gervais, féministe
. Monique Michaud, à la retraite
. Johanne St-Amour, à la retraite
. Nicole Moreau, féministe
. Caroline Bouchard, professionnelle de la santé
. Françoise Rioux, enseignante
. Josée Charette, ex-cadre du gouvernement du Quebec à la retraite
. Nicole Tremblay, juriste
. Nicole Landreville, à la retraite,
. Diane Bastrash, à la retraite
. Joanne Cool, travailleuse autonome
. Suzanne Bernatchez, à la retraite de l’enseignement
. Michelle Pagé, citoyenne
. Francine Labrecque, à la retraite
. Louise Méthé, graphiste
. Germaine Boily, citoyenne
. Claire Jeffrey, enseignante à la retraite
. Pascale Despins, citoyenne
. Joanne Vleminckx, à la retraite
. Caro Dumoulin, à la retraite
. Martine Michaud, photographe
. Johanne Legault, enseignante
. Ghislaine Brouillette, à la retraite
. Chantal Abran, enseignante
. France Labrecque, citoyenne
. Claire Piché, PhD. Études et pratiques des arts
. Pauline Collin, à la retraite
. Louise Méthé, graphiste
. Claudine Roy / commis-réceptionniste
. Lynda Labrecque, à la retraite
. Julie Tremblay, Bc Sc M.A.P.
. Francine Trudeau, à la retraite
. Micheline Labrecque, entretien mėnager
. Francine Pelletier, instructeure FCDQ à la retraite
. Michèle Dessureault, analyste en informatique
. Denise Groulx, fonctionnaire fédérale à la retraite
. Andrée Lachance, citoyenne québécoise
. Genevyève Delorme, militante féministe
. Andrée Deveault, professeure à la retraite
. Genevieve Hut, entrepreneure
. Suzanne Cotte, chargée de communication
. Clémence Massicotte, secrétaire bénévole
. Danielle Soulières, à la retraite
. Sylvie Tanguay, technicienne en administration,
. Hélène Lamarche, à la retraite
. Claude Charbonneau, enseignante
. Danielle Trussart, écrivaine
. Marie Constantineau, féministe
. Ghisline Larose, militante féministe et laïque
. Colette Binet, professeure à la retraite
. Irène Doiron, à la retraite
. Nicole Roy, militante laïque
. Élise Bourque, femme
. Louise Malette, montréalaise
. Lise Fortin, pédagogue et créatrice.
. Lyse Frenette, à la retraite
. Ginette Beaumont, comédienne
. Anne-Marie Bilodeau, avocate à la retraite
. Lynne Jubinville, syndicaliste
. Manon Duguay, à la retraite
. Ginette Rousseau, gestionnaire
. Dorothée Leblanc, à la retraite
. Adele Rachid, juriste, fonctionnaire au fédéral
. Viviane Mukti, consultante
. Denise Tessier
. Claire Aubin, sculptrice, peintre
. Sophie Lyonnais, designer graphique
. Ariane Brunet, Centre for Secular Space, Londres, GB
. Suzanne Provost, Ph.D.
. Lorraine Carpentier, artiste
. Anny Gosselin, citoyenne
. Marie-Andrée Sabourin
. Mina Bessafa
. France Théoret, écrivaine
. Nadia Alexan, professeure à la retraite
. Jeanne Gagnon - PDF Québec
. Johanne Villeneuve, professeure, études littéraires, UQAM
. Nicole Vermette, féministe
. Sonia Houle, infirmière, gestionaire réseau de la santé.
. Diane Caron, retraitée
. Louise Filion
. Fernanda Bonatti - conseillère en employabilité
. Lucie Bourassa, professeure de littérature, Université de Montréal
. Lucie Jobin
. Louise Mailloux, philosophe
. Nawal Bouchareb, employée de la CSDM
. Caroline Codsi, présidente fondatrice de la Gouvernance au féminin
. Denise Tessier
. Oria Hamadi, professeure à la retraite
. Ann Longchamps, membre Afeas.
. Ghyslaine Thomas, à la retraite
. Anne Gauthier, technicienne en service de garde en milieu scolaire.
. Josée Cournoyer citoyenne
. Lorraine Lefebvre, à la retraite
. Huguette Fillion
. Marie-José des Rivières, éditrice et chercheuse
. Carole Aubry, professionnelle de la santé, à la retraite
. M. Giroux, à la retraite
. Marie-Lise Yoakim, fonctionnaire fédérale
. Micheline Rioux, féministe
. Christine Séguin, travailleuse autonome
. Michèle Tardif, féministe libre
. Chantal Faubert, fonctionnaire fédérale
. Ginette Drolet, adjointe administrative
. Ginette Moreau, orthopédagogue et ex-conseillère municipale
. Manon Giguère, technicienne en infographie
. Denise Giroux, citoyenne
. Michèle Barnabé, à la retraite
. Cécile Comeau, à la retraite
. Céline Bernard
. Angèle Dufresne, citoyenne
. Penka Tzvetkova, enseignante à la retraite
. Jacqueline Peltier, biologiste

Mis en ligne sur Sisyphe, le 8 novembre 2017

Nassira Belloula, écrivaine, Nadia El-Mabrouk, professeure, Université de Montréal, Leila Lesbet, enseignante, Diane Guilbault, vice-présidente de PDF-Québec

P.S.

Publié aussi dans La Presse, le 8 novembre 2017.




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