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L’idéologie prend aujourd’hui le pas sur la science
Tout le monde devrait s’inquiéter de la censure du reportage "Les enfants transgenres" par le réseau CBC
Traduction : TRADFEM

19 décembre 2017

par Debra W. Soh, Ph. D. en neurosciences

La semaine dernière, le réseau CBC devait diffuser le documentaire controversé de la BBC « Transgender Kids : Who Knows Best ? »*, mais il a reculé le jour même, en alléguant des commentaires du public et son propre « examen plus approfondi du document ». Des activistes avaient soutenu que le film était « nocif » et allait « alimenter la transphobie ». En réalité, ce documentaire offre une perspective rare et factuelle sur la politisation actuelle des thérapies de genre, en interviewant, entre autres, le Dr Kenneth Zucker, un psychologue et expert international de la recherche sur la dysphorie sexuelle chez les enfants. (Zucker se trouve également à être un de mes anciens collègues.)

Bien que sa recherche et son approche de la thérapie soient scientifiquement fondées, elles contrarient l’orthodoxie transgenriste de diverses manières que je détaille ci-dessous.

L’approche de Zucker

Mais d’abord, certains éléments de contexte : en décembre 2015, Zucker a été congédié de son poste au Center for Addiction and Mental Health de Toronto, où il dirigeait depuis longtemps la Clinique de l’identité sexuelle des enfants, des jeunes et des familles. De nombreux activistes qui avaient réclamé son expulsion ont alors crié victoire.

Qu’est-ce que l’approche de Zucker avait d’aussi controversé ? En bref, il n’adhérait pas aveuglément au nouveau dogme populaire de soutien absolu aux enfants qui disent vouloir changer de sexe. Au lieu de cela, la thérapie de Zucker s’inspirait de la recherche qui montre que la majorité des enfants présentant une dysphorie sexuelle dépassent ce sentiment à la puberté.

En effet, selon les 11 études menées au sujet de ce processus de « désistance », dont certaines publiées au cours des cinq dernières années, environ 60 à 90 % des enfants dysphoriques se reconnaissent homosexuel·le·s à l’âge adulte, plutôt que transgenres.

L’approche de Zucker ne consistait pas à « guérir » les enfants transgenres ou à mener une thérapie « réparatrice » ou « de conversion », comme le prétendent certains de ses détracteurs. Elle consistait plutôt à reconnaître qu’il est tout simplement insensé pour un·e enfant d’affronter les défis d’un changement de sexe social ou physique si elle ou il est susceptible de se sentir un jour à l’aise dans son propre corps. Voilà la vision qualifiée de « nocive » qui trouve place, entre autres, dans ce documentaire.

Pour être clair, Zucker n’était pas contre toute transition pour des personnes transgenres ; il a publié des études universitaires à l’appui du recours aux bloqueurs hormonaux et aux hormones sexuelles pour les jeunes patient·e·s à partir de la puberté. Il a simplement contesté la notion que chaque enfant qui dit « être du mauvais sexe » est réellement transgenre.

Pour être clair, Zucker n’était pas contre toute transition pour des personnes transgenres ; il a publié des études universitaires à l’appui du recours aux bloqueurs hormonaux et aux hormones sexuelles pour les jeunes patient·e·s à partir de la puberté. Il a simplement contesté la notion que chaque enfant qui dit qu’il est du mauvais sexe est réellement transgenre.

Le film aborde également la question de la désistance, un processus par lequel les personnes ayant vécu un « changement de sexe » en viennent à le regretter et souhaitent retrouver leur sexe de naissance. Il met également en lumière la théorie selon laquelle on risque de confondre la dysphorie sexuelle avec certaines conditions sous-jacentes, y compris l’autisme et le trouble de la personnalité borderline.

Lors de la diffusion du film « Transgender Kids » plus tôt cette année, au Royaume-Uni, j’ai perçu un sentiment de soulagement parmi mes collègues sexologues à constater que quelqu’un était finalement prêt à remettre en question l’approche dite « affirmative du genre », particulièrement d’une manière adaptée à une grande diffusion.

De nos jours, les clinicien·ne·s subissent une incitation extrême à endosser le modèle de transition précoce pour leurs jeunes patient·e·s, même si ce n’est peut-être pas la meilleure solution dans leur cas. C’est certainement le message que leur a adressé le congédiement de Zucker, et cela explique d’autant plus pourquoi ce film avait besoin d’être diffusé.

Controverse au Royaume-Uni

Ce n’est pas la première fois que « Transgender Kids » rencontre une controverse. À sa première diffusion au Royaume-Uni, le film a fait l’objet d’une levée de boucliers et a depuis disparu du site Web de la BBC. Ce n’est pas tout à fait surprenant : on a même vu des militants transgenristes harceler et intimider des sexologues dont les résultats contredisent leurs objectifs politiques. C’est une des principales raisons pour lesquelles vous aurez du mal à localiser les nombreuses nouvelles études défavorables à l’approche de transition précoce.

Plus récemment, ce militantisme a influé sur la politique canadienne en forçant l’adoption du projet de loi 77 en Ontario – la Loi de 2015 sur l’affirmation de l’orientation sexuelle et de l’identité sexuelle –, qui confond à tort les approches thérapeutiques comme celles de Zucker avec des tentatives inacceptables de modifier l’orientation sexuelle d’une personne. Il en est de même du projet de loi 89, déposé plus tôt cette année, qui inscrit l’idéologie du genre dans les lois sur la protection de l’enfance et justifie l’intervention du gouvernement si un parent n’adhère pas à l’identité de genre ou à l’expression de genre d’un enfant.

Le militantisme atteint maintenant notre radiodiffuseur national, financé par les fonds publics, qui a choisi de ne pas diffuser d’opinions dissidentes sur cette question. Cette censure devrait inquiéter tout le monde, des deux côtés du débat.

Soutenir les personnes transgenres, y compris leur droit à la dignité, au soutien et à l’intervention médicale, n’est pas incompatible avec l’adoption d’une approche scientifiquement guidée pour déterminer les meilleurs résultats pour le bien des enfants. Mais comme c’est généralement le cas avec les mouvements politiques, ces nuances ont surtout tendance à compliquer le débat et à offrir aux activistes des occasions de gagner du terrain.

Ceux qui se sont rendus complices de la censure d’analyses scientifiques légitimes ont perdu de vue l’essentiel. La question a cessé d’être ce qui protège le mieux l’intérêt de ces enfants, pour devenir l’objectif de gagner, à tout prix, une guerre idéologique.

. Ce texte a paru le 18 décembre dans la section Opinion du site Web de la CBC.

L’auteure : Debra W. Soh écrit sur la science et la politique du sexe et détient un doctorat en neurosciences du sexe de l’Université York. Elle coanime le prochain podcast de la CBC, Wrongspeak, avec Jonathan Kay. Suivez-la sur Twitter à : @DrDebraSoh

• On trouve le documentaire ici : http://www.dailymotion.com/video/x58s24i
• et une version sous-titrée en français de ce documentaire au http://partage-le.com/2017/12/8516/

 TRADFEM.

Lire aussi :

. "Le réseau CBC annule sous les pressions un documentaire sur les enfants présentés comme transgenres"

. "Les enfants et les jeunes face à l’idéologie transgenre".

. "En Angleterre, remettre en question la fluidité du genre est devenu le nouveau blasphème".

. Un homme devient-il une femme dès lors qu’il dit en être une ?

Mis en ligne sur Sisyphe, le 19 décembre 2017

Debra W. Soh, Ph. D. en neurosciences


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