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Peut-on accepter un féminisme anti-femmes au Québec ?

7 février 2021

par Annie-Ève Collin, féministe et philosophe

Le journal Métro publiait, le 4 février, un texte de Naomie Gelper (1) accusant l’organisation féministe Pour les droits des femmes du Québec (PDF Québec) de transphobie, en qualifiant également de transphobe une déclaration des droits des femmes basés sur le sexe (2) signée par PDF Québec, en plus de centaines de personnes et d’organismes.

Gelper reproche à PDF Québec d’avoir signé cette déclaration. Cela dépasse l’entendement : reprocher à une organisation féministe de signer une déclaration des droits des femmes ! Ce qui devrait étonner, c’est plutôt qu’une porte-parole de la Fédération des femmes du Québec (FFQ) qualifie cette déclaration des droits des femmes de « violente » !

Gelper écrit que « les signataires estiment que l’inclusion des femmes trans dans la catégorie femme dans la loi, les politiques gouvernementales et les pratiques constitue une discrimination à l’égard des femmes en nuisant à la reconnaissance des droits des femmes fondés sur le sexe biologique. »

Ce n’est pas l’inclusion de qui que ce soit qui est présentée comme un problème, mais la suppression du sexe comme critère pour revendiquer des droits (parce qu’on le remplace par le genre, alors qu’on pourrait plutôt ajouter le genre comme un autre critère au nom duquel on peut revendiquer des droits). Il est logique de dire qu’il est impossible aux femmes de revendiquer des droits sur la base de leur sexe face à des institutions qui ne reconnaissent pas le sexe !

Les signataires considèrent que le droit des femmes à des espaces sécuritaires et intimes réservés aux personnes de leur sexe est important. Elles accordent aussi de l’importance au droit des femmes à des compétitions sportives équitables, or c’est entre les sexes qu’il y a des différences pertinentes pour le sport, et non entre les genres.

D’ailleurs, le texte affirme que l’admission des femmes trans dans les sports féminins ne désavantage pas les femmes, et cite Julien Leroux-Richardson, qui affirme que la prise d’hormones a pour effet de diminuer la force et la masse musculaires des femmes trans, les plaçant à égalité avec les femmes. Il y a lieu de se demander pourquoi, en ce cas, les athlètes transgenre qui ont participé à des compétitions féminines ont surpassé de TRÈS loin les athlètes femelles. De plus, Leroux-Richardson néglige que ce ne sont pas toutes les femmes trans qui prennent des hormones, surtout depuis que la loi de plusieurs pays, dont le Canada, donne le droit aux citoyens majeurs d’être reconnus comme des femmes sur une simple déclaration de leur identité de genre, sans obligation d’avoir recours à des interventions médicales pour modifier leur corps.

Ni PDF Québec ni la Déclaration ne s’oppose à des droits, l’un et l’autre revendiquent des droits : ceux des femmes. Aussi longtemps que ceux qui prétendent lutter contre la transphobie vont présenter comme transphobe la demande de reconnaissance des droits des femmes, ils devront s’attendre à ce que des féministes s’opposent à eux.

Notes

1. Naomie Gelper, "Le féminisme transphobe, une position légitime au Québec ?", Métro, 4 février 2021.
2. Lireici

Mis en ligne sur Sisyphe, le 6 février 2021

Annie-Ève Collin, féministe et philosophe


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