Elle sait comment respirent les pierres
la pesanteur du temps sur la poitrine
le profond silence des mots l’érosion
la peau d’une main les ricochets du coeur
Si tu regardes vraiment le paysage
tu peux voir la vie sans toi
la présence de l’absence
apprivoiser la blessure de l’infini
Le jour a la blancheur aveuglante
d’une page sans toi
des oiseaux écrivent dans le froid
l’éternité du passage
Elle ne veut plus sortir des bras de la nuit
là où la forêt se jette à la mer
où la flamme monte jusqu’aux étoiles
où de partout le rêve nous lit
Le jour entier empreint de ta présence
flot d’images et de parfums
sentir sur sa peau le grain de ta voix
la simple résonance de l’air
Quand le bleu et le soleil brillent si fort
les branches scintillent
gorgées de feu et d’eau
nous avons l’éternité au bout des doigts
Les mots restent au bord des lèvres
pétrifiés dans la poitrine
comme si le moindre souffle d’air
leur ferait exploser le cœur
Il faudrait pouvoir écrire les seuls mots
que l’on rêve de lire à l’aube
plonger sa vie son visage dans le soleil
réfléchi par la mer et l’amour
Quels mots pourraient saisir l’éclair
le mouvement singulier de l’air
quand la flèche troue l’éternité
et libère le flot ininterrompu du désir
Cette indéfinissable présence
qui met soudain la vie en branle
ébranle toute certitude et touche
au point de donner sens au vide
En ces jours où survivre remplace vivre
souviens-toi de la plus infime parcelle de joie
de la première fleur la première impatience
du parfum d’un invincible printemps
La vie n’a de sens que la vie elle-même
grande roue de vertige d’extase
où parfois entre le lac et la forêt
une fille sauvage vit la beauté au présent