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La publicité sexiste et violente en France

30 juillet 2002

par Micheline Carrier

En France, un groupe d’étude constitué d’une dizaine de spécialistes vient de déposer un rapport sur l’image des femmes dans la publicité. Il demande au gouvernement Jospin d’adopter de nouvelles mesures afin de mettre fin aux excès des publicitaires. Le rapport remis à Nicole Péry, secrétaire d’Etat aux droits des femmes, propose de renforcer la loi et de donner le droit de poursuivre les publicitaires aux associations de lutte contre la discrimination et pour le droit des femmes.



En France comme ici, il existe déjà des lois que peuvent invoquer les personnes qui se sentent lésées. "Il n’existe pas de jurisprudence parce que personne ne monte au créneau, individuellement », constate un expert. « Pour qu’un contre-pouvoir s’exerce activement, il faudrait donc transférer la compétence aux associations qui, pour l’instant ne peuvent pas, en raison de leur statut, saisir la justice. » (Le Monde, 11 juillet 2001).

Le groupe d’étude se défend bien de vouloir imposer des critères de « pudeur », « partir en guerre contre la nudité » ou « sauver un ordre moral ». Son objectif est de lutter contre la discrimination. Il n’est pas question « de laisser s’installer dans les villes des images qui invitent à la violence contre les femmes ou à la discrimination entre les sexes », affirme une porte-parole du groupe.

Une publicité vengeresse ?

« Depuis quelques années et avec une fréquence accrue au cours des derniers mois, la publicité a présenté des images de femmes jugées par beaucoup comme humiliantes et dégradantes », souligne le rapport. Parmi les publicités étudiées, « on trouve celles qui montrent des corps salis, enchaînés, des images qui font adopter aux protagonistes des postures animales, celles où les visages sont contusionnés, couverts d’hématomes ou encore celles qui contiennent des allusions au viol ou aux violences conjugales. »

Il semble que la population française réagisse de plus en plus négativement à cette forme de violence et de sexisme. D’autant plus que cette publicité va à l’encontre des réformes engagées par le gouvernement Jospin. Le programme "l’égalité en marche", en place depuis mars 2000, a en effet défini de nouveaux principes d’égalité entre les sexes dans les domaines de la vie politique et de la vie professionnelle. « Tout se passe comme si l’inégalité se déplaçait dans le discours de l’entreprise, comme une sorte de vengeance », commente Brigitte Grésy, porte-parole du groupe d’étude.

Le groupe recommande que les dispositions du Bureau de vérification de la publicité (BVP), qui datent de 1975, soient rafraîchies pour répondre aux réalités nouvelles. Il recommande que le BVP ait plus de pouvoir pour intervenir de façon préventive : la publicité lui serait soumise pour approbation relativement à sa conformité à la loi. La loi devrait également être modifiée, selon le groupe, pour étendre les motifs de sanctions prévues à « la discrimination de sexe, de handicap, d’âge ou d’orientation sexuelle ».

Enfin, le groupe d’étude sur l’image des femmes dans la publicité voudrait que l’État favorise un débat public en créant une ligne téléphonique à l’usage des personnes qui veulent réagir aux images choquantes. Des forums de discussion pourraient également être créés sur le sujet. Le Bureau de vérification de la publicité pourrait utiliser son site Internet à cette fin.

La secrétaire d’Etat aux droits des femmes, Nicole Péry, a bien accueilli l’ensemble des propositions. Elle souhaite y associer ses collègues Catherine Tasca, ministre de la Culture et la Communication, et Marylise Lebranchu, ministre de la Justice. (Source : Le Monde, 11 juillet 2001).

Eh bien ! Eh bien !

En vérité, un vent nouveau souffle sur la France ! Il y a 20 ans - oui, oui 20 ans ! - plusieurs de nos « cousines et cousins » regardaient, avec un certain sourire, les mesures non coercitives contre le sexisme et la violence dans la publicité proposées par le gouvernement du Québec.

Je me rappelle également que le même gouvernement Jospin a mené, au grand dam de l’Académie française, un débat sur la féminisation des titres à l’Assemblée nationale, il y a quelques années. Le débat a gagné l’ensemble des médias français et dépassé les seuls titres professionnels. On se souvient sans doute que la vénérable Académie, qui attribue le titre de Monsieur à ses rares membres féminins, avait alors gratifié les féministes québécoises d’une attention particulière en leur attribuant le leadership mondial de ces dérogations au sacro-saint code masculin du langage. Un leadership que les Québécoises ne renient pas !

Salut cousins, cousines !

Publié pour la première fois en juillet 2001

Micheline Carrier

P.S.

P.S. Que s’est-il passé depuis ? Où en êtes-vous dans ce cheminement ? J’aimerais bien que vous me répondiez par le forum.

À LIRE ABSOLUMENT
« La publicité, un instrument du patriarcat », par le Collectif contre le publisexisme (France)




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