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lundi 14 mars 2005 La commission parlementaire sur l’égalité vue par L’aut’journal
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Un article intitulé « Un nouveau ministère fourre-tout pour les femmes », publié dans l’édition de mars de "L’aut’journal", me laisse perplexe. L’auteure, Julie Tremblay, écrit que le remaniement ministériel « a mis une fin abrupte aux consultations publiques de la Commission des affaires sociales sur l’égalité entre les femmes et les hommes. Cette décision suscite des remous au sein des différents groupes qui ont déposé leurs mémoires ». Or, l’ajournement de la commission était prévu dès la première séance des auditions, le 25 janvier. Comme l’avait mentionné le président de la commission des affaires sociales, cette dernière devait faire place à un autre groupe au début de mars. Une double vérification, les 10 et 11 mars, auprès de la secrétaire de la Commission des affaires sociales, Me Denise Lamontagne, et de Sylvie Côté au Secrétariat à la condition féminine, confirme que la commission reprendra ses travaux, probablement en avril plutôt qu’en mars. Si ce délai s’explique notamment par l’arrivée d’une nouvelle ministre responsable des dossiers de la condition féminine, je n’ai pas senti de bien grands remous dans le mouvement des femmes. Dans les milieux gouvernementaux, il se peut que certain-es aient souhaité l’abandon pur et simple des auditions de la commission parlementaire en constatant que la majorité des mémoires présentés ne soutiennent pas la position du Conseil du statut de la femme et du gouvernement en faveur d’une approche intégrée de l’égalité et d’un conseil de l’égalité mixte (dont la ministre Courchesne avait finalement pris ses distances). Si c’est le cas, ces personnes devront prendre leur mal en patience en attendant que l’exercice amorcé en janvier se rende à terme. En lisant l’article de "L’aut’journal", on serait porté à croire que les groupes de femmes n’ont parlé que des masculinistes dans leurs analyses de l’Avis du Conseil du statut de la femme. L’article adopte le credo de Christine Fréchette, une membre du conseil d’administration du CSF, pour fil conducteur. Les propos rapportés dans "L’aut’journal" laissent croire que, pour C. Fréchette, les critiques des groupes de femmes à l’endroit du document de consultation se résument à la crainte de perdre des ressources financières au profit des masculinistes : « Je constate, enchaîne-t-elle (c’est-à-dire C. Fréchette), que ce qui motive souvent les groupes de femmes face au statu quo, c’est la peur de se faire enlever des ressources qui seront rédistribués à des groupes masculinistes. Il n’est pas question de cela et ce lien de cause à effet crée une dynamique improductive ». C. Fréchette n’a pas été mal citée puisqu’elle a tenu des propos semblables à quelques reprises, dans différents médias, depuis un an et demi. Bien que l’on puisse avoir des raisons de s’inquiéter de l’influence des antiféministes sur le gouvernement québécois et sur le Conseil du statut de la femme lui-même, réduire à des motifs mercantiles les réticences des groupes à endosser l’avis du CSF comporte quelque chose de méprisant ou, au mieux, indique une connaissance limitée du sujet dont on parle. Au sujet des mémoires des proféministes, l’article de "L’aut’journal" retient principalement ce qu’ils disent... des masculinistes, bien que certains aient élaboré une critique des trois approches proposées dans l’Avis du CSF. Il n’est mention nulle part des analyses rigoureuses des mémoires de la Fédération des femmes du Québec et de Relais-Femmes, du Regroupement des groupes de femmes de la région de Québec, du Regroupement des CALACS, des Tables de concertation de différentes régions, de la Chaire d’étude sur la condition des femmes de l’Université Laval, de la CSQ, de la CSN, du Barreau du Québec ou d’autres groupes. La commission en a tout de même entendu une cinquantaine. Non seulement ces mémoires, disponibles sur le site de l’Assemblée nationale, présentent-ils une critique exhaustive du document de consultation du CSF, mais ils fournissent beaucoup d’information sur plusieurs aspects de la condition des femmes au Québec. L’article de Julie Tremblay laisse entendre également que les réticences à l’approche sociétale seraient surtout le fait des jeunes féministes du groupe Salvya et du Centre Femmes d’aujourd’hui. Or, cette réticence est partagée par une forte majorité des groupes (de femmes, syndicaux, villes de Québec et de Montréal, groupes régionaux, proféministes) qui ont expliqué longuement en commission parlementaire les motifs de leurs réserves face à cet aspect du document de consultation du Conseil du statut de la femme. L’auteure cite Sisyphe parmi ses références, mais elle n’a probablement pas lu le dossier - à compléter - que j’ai publié sur cette commission parlementaire. Si elle l’a fait, elle n’a retenu que ce qui servait les fins de son article. Par exemple, un passage de la lettre que la présidente du CSF, Diane Lavallée, a adressée à Sisyphe, passage qui, sorti de son contexte, pourrait laisser entendre que les critiques à l’endroit de l’Avis du CSF constituent un « arrêt de toute réflexion et de toute tentative d’innovation ». (« Le Conseil du statut de la femme rectifie des propos à son égard »). Il est légitime, bien sûr, de choisir un angle particulier pour aborder un sujet, mais il est tout aussi légitime de se demander si un article informe ou désinforme. À la lecture de cet article, on ne saurait dire pourquoi l’ensemble du mouvement des femmes du Québec exprime des réserves importantes sur plusieurs aspects de l’Avis « Vers un nouveau contrat social entre les femmes et les hommes », notamment l’approche sociétale, l’approchée intégrée de l’égalité et un conseil de l’égalité mixte auxquels ce document voulait paver la voie. Saluons tout de même le retour d’une chronique sur la condition des femmes dans "L’aut’journal", après plusieurs mois d’absence, à la suite de la démission d’Élaine Audet (Voir le commentaire à la suite de l’article « Le sexisme très ordinaire de la gauche médiatique »). Mis en ligne sur Sisyphe, le 12 mars 2005. |