| Arts & Lettres | Poésie | Démocratie, laïcité, droits | Politique | Féminisme, rapports hommes-femmes | Femmes du monde | Polytechnique 6 décembre 1989 | Prostitution & pornographie | Syndrome d'aliénation parentale (SAP) | Voile islamique | Violences | Sociétés | Santé & Sciences | Textes anglais  

                   Sisyphe.org    Accueil                                   Plan du site                       






jeudi 14 septembre 2006

Écoles hassidiques illégales - L’État doit être ferme

par Yves Casgrain






Écrits d'Élaine Audet



Chercher dans ce site


AUTRES ARTICLES
DANS LA MEME RUBRIQUE


Faut-il jouer à la guerre pour être un garçon ?
Faut-il que les jeunes s’éloignent des écrans pour reprendre leur vie en main ?
La réussite scolaire des garçons vue de plus près
Agressions à l’université, radicalisation, harcèlement : phénomènes isolés ?
Sciences - Les tablettes, à éloigner des enfants
Alice Miller et les racines de la violence dans l’éducation de l’enfant
Un défi à l’école : apprendre à se passer des écrans
Éducation et féminisme : beaucoup de chemin à parcourir
Réduire la violence en milieu scolaire : des efforts méconnus
Colloque "Les écrans : libération ou esclavage ?" à Trois-Rivières
Éducation ou catastrophe : l’heure de se débrancher
Réduire le temps-écrans aujourd’hui, un véritable sport extrême
Des technologies modernes fantastiques... pour servir les enfants ou les asservir ?
À l’égalité il faut ajouter la liberté
Qui a peur des professeur-es ?
Décrochage scolaire - Complément d’information à propos de "À l’école, p’tit gars !"
La langue française à l’école - Mont tex es-ti lizib ? J’ai cri !
Les jeux vidéo ont des effets néfastes sur les jeunes
Une femme, Marylin Vos Savant, a le QI le plus élevé au monde
L’intégration des jeunes en difficulté d’apprentissage
Drelin, drelin ! Parents : à vos devoirs !
La marchandisation des enfants et le port du G-string
Étudiants en grève. Intransigeants, dites-vous ?
Grève étudiante ou choc des générations ?
Apprendre aux filles à se soumettre aux garçons
Les garçons et l’école : les prétentions masculinistes réduites à néant
L’école québécoise et les garçons : l’apprentissage de la domination
La mixité scolaire n’a pas d’effet sur la motivation
Obstacles et réussite des filles à l’école
Profils contrastés d’un groupe de garçons québécois de 15 ans
Les difficultés scolaires des garçons : débat sur l’école ou charge contre le féminisme ?
Renforcer les stéréotypes masculins ne résoudra pas les difficultés des garçons à l’école
Comment limiter le décrochage scolaire des garçons et des filles ?
Identités de sexe, conformisme social et rendement scolaire
La non-mixité en milieu scolaire nuirait aux garçons
Décrochage scolaire : remettre les pendules à l’heure
La non-mixité à l’école : quels enjeux ?
Faire réussir les garçons ou en finir avec le féminisme ?
Les garçons à l’école - Pour en finir avec le XVIIIe siècle
Quand les garçons échouent à l’école







Dans des reportages saisissants, la Société Radio-Canada a mis au jour l’existence d’« écoles » religieuses illégales, dont une est intégrée au sein des murs d’une institution scolaire d’enseignement primaire tout à fait légale.* Ces pseudo-institutions scolaires sont fréquentées par environ 800 jeunes entre 13 et 16 ans.

Selon Radio-Canada, les jeunes hassidiques qui fréquentent l’« école » Toldos Yakov n’apprennent presque rien d’autre que les lois de la Torah et le Talmud, livres religieux juifs. Pas de sciences, pures ou humaines. Pas de nouveaux cours d’histoire des religions. Exit le français. Exit l’anglais. Exeunt les cours optionnels. Pour expliquer cette situation, le directeur de l’école Toldos Yakov affirmait sereinement, comme s’il s’agissait là d’une vérité universelle, que la philosophie religieuse importe plus que tout le reste !

Ces « écoles » parallèles fonctionnent au su et au vu du gouvernement depuis plusieurs années. Étonnant ? Pas vraiment ! Les personnes qui suivent de près l’évolution des relations entre les religions, sectaires ou non, et l’État québécois savent à quel point les fonctionnaires et les élus sont incapables d’avoir une pensée logique en cette matière. Pourquoi ? Une des raisons de cette absence de cohérence réside sans aucun doute dans la peur. Peur du pouvoir politique de ces mouvements et des communautés qui les appuient. Peur de brimer leurs libertés accordées par la Charte québécoise des droits et libertés.

Peu de réactions

Certes, le gouvernement clame à qui veut bien l’entendre que cette situation est inacceptable et que tous doivent obéir à la Loi sur l’instruction publique, qui stipule à l’article 14 que tout enfant qui est résidant du Québec doit fréquenter une école jusqu’à l’âge de 16 ans. Pour que la communauté hassidique respecte cette loi, le gouvernement préfère le dialogue à la répression. Cette démarche a semble-t-il été à la base de l’ouverture d’écoles primaires privées ayant un permis délivré par le ministère de l’Éducation.

Cependant, le dialogue entre le gouvernement et les communautés hassidiques perdure depuis de très nombreuses années. Le gouvernement et la société doivent se montrer plus fermes devant cette volonté de sectarisme et d’isolement manifestée par certains groupes religieux.

À cet égard, il est symptomatique que très peu d’intervenants du monde de l’éducation, de sociologues, de religiologues et de syndicalistes se soient manifestés afin d’apporter leur contribution à la réflexion suscitée par l’existence de ces écoles parallèles. Dans une société qui se veut laïque et ouverte sur le monde, une telle situation aurait normalement dû susciter un torrent de réactions diverses.

Au lieu de cela, on se contente de suivre de loin les actualités en spectateurs, comme si le fait que près de 800 jeunes hassidiques de 13 à 17 ans ne reçoivent qu’un enseignement religieux n’était qu’un vulgaire fait divers. Il est dès lors facile de comprendre pourquoi les familles hassidiques et leurs leaders ne soient pas pressés de changer certaines de leurs coutumes qui sont en décalage complet par rapport aux exigences de notre société laïque et ouverte sur le monde.

Une vision de l’éducation

La position du directeur général de l’Association des écoles juives, Charley Lévy, illustre d’ailleurs très bien ce décalage. Le site Internet de Radio-Canada rapportait ainsi sa réaction dans ce dossier : « Est-ce qu’il y a éducation malgré tout ? Est-ce qu’il y a une éducation poussée et quand même de qualité ? Je crois qu’on devra convenir que oui. »

À l’évidence, M. Lévy possède une autre vision de l’éducation que celle du ministère de l’Éducation. En effet, sur son site Internet, ce dernier écrit : « L’école doit aider l’ensemble des jeunes à développer les habiletés qui leur permettront d’être des individus cultivés, des citoyens engagés, des travailleurs compétents, et ce, tout en continuant de leur donner accès aux savoirs des générations précédentes. »

Le refus des communautés hassidiques d’accorder à leurs adolescents la même éducation que celle reçue par ceux qui fréquentent les institutions scolaires québécoises prouve leur fermeture. Le fait que les jeunes adultes hassidiques éprouvent de la difficulté à se trouver un emploi (ils ne possèdent pas les exigences nécessaires) et qu’ils préfèrent travailler au sein d’entreprises juives, comme le révélait un sondage effectué en 1997 dans les communauté hassidiques, est une autre preuve que l’éducation dans ces « écoles » ne répond pas à ce que la société et le gouvernement demandent aux écoles reconnues.

Vie en parallèle

Dans toute cette affaire, d’une très grand importance, il ne faut pas perdre de vue un point fondamental : des écoles parallèles permettent à des microsociétés parallèles de survivre. Et c’est justement ces microsociétés qui font éclore des sentiments d’incompréhension, voire de haine.

Si notre société a le devoir sacré de respecter les différentes cultures qui forment la nation québécoise, ces mêmes cultures doivent à leur tour faire du respect des lois et des coutumes de la nation un devoir sacré. Pour y arriver, le gouvernement et la société québécoise doivent affirmer sur toutes les tribunes ce qui constitue pour eux des piliers que personne ne doit abattre sous peine de voir s’écrouler la culture québécoise. Ils doivent également se montrer intraitables devant les gens qui forment leurs enfants à devenir des citoyens d’une société parallèle !

Et le meilleur moyen de contrer les propagandistes sectaires est la création d’un État pleinement laïque et respectueux des différentes cultures, y compris religieuses. Bien que catholique et pratiquant, je crois fermement qu’il n’y a pas d’autres issues viables et démocratiques pour sauvegarder la paix mondiale, déjà fortement affaiblie par les visées antidémocratiques de sectaires qui n’hésitent pas à se servir de la violence pour arriver à leurs fins.

***

M. Casgrain participe au congrès mondial « Les religions après le 11 septembre 2001 », qui se déroule au Palais des congrès de Montréal du 11 au 15 septembre 2006.

* L’auteur parle d’une situation touchant des écoles de Montréal.

Publié également dans Le Devoir, 13 septembre 2006. Merci à l’auteur de publier cet article sur Sisyphe.

Mis en ligne sur Sisyphe, le 13 septembre 2006.



Format Noir & Blanc pour mieux imprimer ce texteImprimer ce texte   Nous suivre sur Twitter   Nous suivre sur Facebook
   Commenter cet article plus bas.

Yves Casgrain

L’auteur est consultant en mouvements sectaires et en nouvelles religions et auteur du blogue « Le journal d’un antisectaire ».



    Pour afficher en permanence les plus récents titres et le logo de Sisyphe.org sur votre site, visitez la brève À propos de Sisyphe.

© SISYPHE 2002-2006
http://sisyphe.org | Archives | Plan du site | Copyright Sisyphe 2002-2016 | |Retour à la page d'accueil |Admin