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lundi 29 septembre 2008 Lettre à Mme Lise Ravary – Nous savons, nous, à quelles femmes s’adresse le CSF
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L’article que vous avez écrit dans lequel vous suggérez l’abolition du Conseil du statut de la femme nous a fait bondir. Il nous semble à nous que le Conseil du statut de la femme a de plus en plus son importance, et contrairement à vous, nous reconnaissons qui est LA FEMME à qui s’adresse le CSF. Peut-être que notre imagination est plus florissante que la vôtre mais je vois bien qu’il s’adresse à la jeune femme qui vit de la violence, à la femme enceinte qui vit de l’appauvrissement, à la femme âgée seule et malade, à la femme qui travaille et qui n’a pas les mêmes perspectives d’avenir professionnel, à la femme autochtone qui n’a pas les mêmes droits que la femme blanche, à la femme de 50 ans qui cherche un emploi, et à la jeune fille qui subit une pression pour être maigre et porter un string. Dans une société individualiste où le conservatisme religieux et de droite semble apporter une certaine sécurité, on connaît bien les rôles traditionnels remis en question par le mouvement féministe, c’est peut-être une réponse à la très grande instabilité face à la mondialisation, etc. C’est comme si on disait : comme on a plus de contrôle sur notre politique, sur notre démocratie et sur la pression économique extérieure, on va resserrer le contrôle au sein de la micro-société, donc de la famille et de l’individu. Il est tellement plus facile de s’installer dans une zone de confort conservatrice que de viser le changement et, donc, par définition une période d’instabilité. Il est alarmant de constater à quel point les droits des femmes sont fragiles, on a qu’à penser à l’avortement qui reste encore d’actualité et qui est en péril plus que jamais. Et votre discours me fait également bondir parce que vous semblez ne pas être consciente de cautionner des idées et des valeurs antiféministes, tout en vous définissant féministe. Être féministe, ce n’est pas nécessairement être une femme. Avant de regarder la paille dans l’œil du voisin, il faut regarder la poutre qu’on a dans le visage. Ainsi, dans votre édito, vous faites le lien avec l’abolition du Conseil du statut de la femme en parlant des femmes d’aujourd’hui qui sont en pleine possession de leurs moyens. Savez-vous qu’à l’heure où nous sommes en pleine possession de nos moyens, les femmes sont davantage fragilisées à tous points de vue ?! D’abord elles sont généralement plus pauvres que les hommes, et elles s’appauvrissent tout au long de leur vie. Ensuite, leur santé mentale est plus fragile, entre autres, du fait que reposent encore sur leurs épaules de très grandes responsabilités. Également, elles n’ont pas toutes accès à l’avortement et ne peuvent pas non plus accoucher comme elles l’entendent. Où sont les sages-femmes qui, en passant, pratiquent le plus vieux métier du monde ? D’ailleurs, en vous lisant, les femmes sont responsables du fait que les jeunes filles portent des strings, la pression sociale et médiatique n’a certainement rien à voir avec le fait que ces mêmes jeunes filles se valorisent de la sorte. Elles sont également responsables de l’échec scolaire des garçons. Elles sont responsables du fait que les enfants sont mal élevés, bref, elles seraient responsables des grands problèmes de la société. Le sexisme n’existe plus dans votre monde, ni les publicités sexistes, cependant vous vous targuez d’être le seul magazine féminin qui ne retouche pas les photos, pourquoi donc est-ce si important pour vous de ne pas retoucher les photos si le sexisme n’existe plus ? Sans oublier que votre magazine féminin regorge de pages pour vendre des crèmes et autres « cossins » pour rendre la femme (très mince et aux très longues jambes) toujours plus belle et plus désirable. S’il n’y a plus de sexisme, c’est donc que les femmes ne subissent pas plus de pression que les hommes. Une pression si évidente et persistante qu’on en oublie les retombées. C’est comme un gaz incolore et inodore, je dirais donc, Madame, que vous dormez au gaz. Comment une femme qui se dit féministe et qui, donc, par définition souhaite que les femmes puissent jouir des mêmes perspectives d’avenir que les hommes peut-elle dénoncer le salaire d’une femme ? Comment peut-on vouloir l’équité salariale et du même souffle dénoncer le salaire de la présidente du CSF ? J’ose vous dire que j’espère bien un jour avoir le même salaire qu’elle et je suis très heureuse pour elle, tant mieux. Pour moi, elle représente un but à atteindre et non une cible à détruire. Également, comme travailleuse d’un groupe de femmes à qui vous suggérez si généreusement de se répartir le salaire de Madame CSF, je vous demande : Comment pensez-vous que nous pourrons remplir l’important rôle du CSF avec un gros budget de 100$ de plus par année ? C’est facile de déshabiller Paulette pour habiller Pierrette mais des miettes, ça reste des miettes et c’est pas avec des miettes qu’on fait du pain. En suggérant de transférer ces fonds dans les groupes de femmes, vous suggérez d’augmenter la prestation de services du communautaire (milieu où l’on retrouve une grande proportion de femmes) à moindre coût pour palier aux manques du système de santé. Vous remettez donc sur le dos des femmes le fait de prendre soin des personnes nécessitant des soins, vous renforcez donc le bien-fondé des aidantes naturelles et donc valorisez le don de soi au détriment de soi-même. Également, vous retirez du mouvement féministe un grand pan de sa force et de son action collective. Comment un groupe de femmes, un groupe local, un groupe terrain peut-il avoir un impact sur l’appareil gouvernemental ? Un-e citoyen-ne n’a pas de pouvoir sur ses élu-es, sauf en période d’élection, on sait qu’après les élections plus rien n’existe ! Peut-être, en fait, que vous pourriez faire partie de la Conférence des évêques, leurs valeurs étant plus proche des vôtres. Ah, non, c’est vrai, en tant que femme vous ne pouvez pas être évêque !!! Mis en ligne sur Sisyphe, le 23 septembre 2008 – Pour signer en ligne la lettre à la ministre Christine St-Pierre : "Ne laissez pas l’ignorance saper les acquis des Québécoises". |