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mardi 5 mai 2015 Transgenres - Le point de vue des femmes complètement occulté
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Le 7 mars 2015, la journaliste Jessica Nadeau présentait dans ’Le Devoir" le point de vue des personnes transgenres*. C’est intéressant, mais la journaliste fait la même erreur que bien des médias : elle ne présente qu’un seul côté des choses, le point de vue des hommes qui « se sentent » femmes. Sans jamais regarder ce que cela peut impliquer pour la majorité des femmes qui sont et se sentent des femmes. Litige et confusion autour d’un projet de règlement On sait que le Québec paie depuis 2009 les traitements et les opérations pour les personnes qui veulent changer de sexe biologique. Et c’est une très bonne chose. Comme certaines de nos membres transsexuelles nous l’ont expliqué, les personnes transsexuelles sont en effet passées par un long processus personnel et par un suivi professionnel pour en arriver à cette transformation physique et à leur nouvelle identité. Cependant, en décembre 2013, le gouvernement a adopté un amendement au Code civil qui permet aux personnes transgenres d’être déclarées de l’autre sexe sans opération et sans traitement médical. Et pour que cette modification puisse entrer en vigueur, le gouvernement vient de présenter en décembre 2014 un projet de règlement. Les personnes transgenres contestent le projet de règlement qui prévoit que les personnes aient vécu selon « l’apparence de l’autre genre » pendant 2 ans. Les transgenres exigent le droit à « l’autodétermination », c’est-à-dire que, sur leur simple parole, le directeur de l’état civil change le sexe sur leur extrait de naissance et autres papiers d’identité. Le règlement demande aussi que ce changement soit pour le reste de la vie. Les transgenres jugent que c’est inacceptable et veulent avoir le droit de changer de sexe quand bon leur semble. Ce dossier nage dans la confusion, le mot même de « trans » constituant le premier leurre, car il inclut les transsexuelles, c’est-à-dire personnes ayant changé de sexe après avoir subi une chirurgie de réassignation sexuelle, et les personnes transgenres, c’est-à-dire celles qui ne veulent pas subir d’opération. On parle des « trans » comme si toutes les personnes étaient dans la même situation et avaient la même position face à ce règlement. Or, les personnes transsexuelles ne sont pas concernées par ce règlement puisque leur situation est claire et déjà réglée : la loi leur permet de changer d’identité sexuelle après leur chirurgie. Inquiétudes légitimes quant à la sécurité des femmes Si le règlement est adopté, des hommes avec tous leurs attributs masculins auront désormais accès à tous les lieux réservés aux femmes la plupart du temps pour des raisons de sécurité comme les toilettes, les gymnases sportifs, les prisons, etc. Rien non plus ne les empêchera de demander d’être accueillis dans les maisons d’hébergement pour femmes victimes de violence, ou dans les centres de femmes. Qui demande des papiers d’identité pour vérifier votre sexe à la porte des toilettes ? À la porte des gymnases ? Personne. Nous sommes très nombreuses à ne pas vouloir nous retrouver dans un vestiaire sportif à côté d’hommes nus sous prétexte qu’ils disent se sentir femmes. Et comment fera-t-on pour distinguer ceux qui se sentent femmes de ceux qui ont juste envie de se retrouver dans un vestiaire pour femmes ? Avec des papiers officiels qui attestent que les hommes « transgenres » sont des « femmes », ceux-ci pourront-ils poursuivre pour discrimination les associations féministes qui auront fait le choix de la non-mixité et qui les refuseront ? Ce qu’on ne semble pas voir, c’est qu’en ouvrant aux hommes « transgenres » les portes des lieux d’intimité et de sécurité aménagés pour les femmes, on doit ouvrir la porte à tous les hommes, sous peine d’être accusé de discrimination sur la base de l’apparence. C’est d’abord pour cette raison que PDF Québec rejette le règlement et demande même l’abrogation de ce nouvel article du Code civil : pour des raisons de sécurité. Mais plus globalement, PDF Québec s’oppose à l’amendement apporté au Code civil parce que cela implique un recul par rapport à la lutte féministe contre les stéréotypes sexuels. La loi qui régit l’état civil n’est pas le réel problème des transgenres ; ce sont plutôt les stéréotypes. Si un homme veut s’habiller en femme, qu’il le fasse. Mais il n’a pas à être déclaré femme. Qu’est-ce qu’une femme, d’ailleurs ? Est-ce une simple question d’habillement ou de coiffure ? Il est remarquable de constater qu’il y a beaucoup plus d’hommes qui disent se sentir femmes que de femmes qui disent se sentir hommes. Serait-ce que le carcan dans lequel on enferme chacun des sexes est devenu moins rigide pour les femmes ? Les femmes ont en effet gagné de longue lutte le droit de s’habiller ou de se coiffer comme elles le veulent, et de pratiquer des activités autrefois réservées aux hommes. Nous nous sommes battues contre ces stéréotypes sans pour cela demander de changer de sexe. Aujourd’hui, nous ne voulons pas que la coquetterie redevienne une caractéristique de ce qui fait une femme, pas plus que la jupe, les souliers, les longs cheveux, etc. Laissons les jeunes garçons s’habiller « comme des filles » si tel est leur désir. Aller de l’avant avec le règlement viendrait renforcer les stéréotypes et envoyer un message aux hommes qu’ils doivent faire changer leur identité sexuelle sur leurs papiers officiels pour avoir droit à la jupe, au maquillage et à la coquetterie. Ce serait un retour en arrière inacceptable. Ne serait-ce pas plutôt le moment pour les hommes de miser sur la lutte aux stéréotypes sexuels pour sortir du carcan ? Sans doute parce que PDF Québec est une association mixte qui regroupe des femmes ainsi que de nombreux hommes, nous croyons que la lutte de libération des femmes peut aussi servir d’exemple aux hommes. * "Les transgenres luttent pour l’égalité juridique et sociale". Mis en ligne sur Sisyphe, le 12 avril 2015 |
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