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lundi 4 mars 2002 Séquestrations et assassinats Pièce à conviction numéro 2
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La discrimination contre les femmes, et même l’élimination pure et simple des femmes, sont choses courantes dans le monde. Qui s’en soucie ?
En 2001, plus d’un million de femmes afghanes sont séquestrées chez elles. Elles n’ont pas le droit de se déplacer seules dans leur ville ou village. On leur interdit de travailler, sauf dans le domaine de la santé (autrement, qui prendrait soin des hommes, n’est-ce pas ?), elles n’ont pas accès à l’éducation, et ont un accès limité aux soins de santé. (Voir témoignages ci-contre). Elles font face à la famine et à une mort précoce. Sans compter celles qui subissent divers sévices ou qui sont mises à mort pour s’être écartées du code de conduite que les hommes talibans ont défini pour elles. Par exemple, ceux - et surtout - celles qui ont des relations sexuelles avant le mariage sont battus, lapidés ou même tués en public. Le « spectacle » se déroule parfois dans un stade, comme à l’époque de la Rome ou de la Grèce antique. Et tout ça, au nom de la charia, interprétée par les talibans. Avec l’aide de l’Association révolutionnaire des femmes afghanes, plus connue sous le nom de RAWA, une journaliste anglaise qui a des origines afghanes, Saira Shah, a réalisé un documentaire clandestin sur la politique de répression menée par les talibans en Afghanistan. Vêtue de la tenue des femmes afghanes, entièrement recouverte du voile, la journaliste a filmé des scènes quotidiennes de la vie de ce peuple. Elle a assisté à des exécutions en publique, elle a été témoin des larmes d’une fille qui se cachait pour pleurer la mise à mort de sa mère par les talibans à laquelle elle assistait. La reporter témoigne de la terreur qui règne dans ce pays. Elle s’est retrouvée, par exemple, à côté d’une femme gravement malade, allongée sur une banquette arrière de voiture. On refusait de lui retirer son voile en dépit du fait qu’elle rencontrait des difficultés respiratoires. Saira Shah a pu expérimenter elle-même à quel point il est difficile de respirer et de voir « à travers les mailles serrées de la petite lucarne, collée au visage, ce qui rend les déplacements dans la ville périlleux. » Le tchadri, ce voile que les talibans imposent aux femmes, étaient fait en coton autrefois. Aujourd’hui, il est fabriqué en polyester, et il devient insupportable de le porter dans les mois d’été. Derrière la lucarne grillagée, le champ de vision est réduit au strict minimum. (« L’Express », 28 juin 2001). Les femmes sont contrôlées dans le moindre détail de leur vie privée. Elles n’ont pas le droit de porter des « chaussures bruyantes » ou aux « couleurs claires ». Pas davantage de vernis à ongle. Et tout ça, soi-disant au nom de la religion. Comme si les dieux se préoccupaient de la forme et de la couleur des habits ! Le film, dont le site FRATERNET.COM promet de nous transmettre bientôt les coordonnées exactes, montre également la lutte clandestine que mène l’association RAWA auprès des femmes afghanes adultes et des filles auxquelles elles apportent, au risque de leur vie, leur soutien en matière d’éducation et de scolarisation. Mauvaise foi et harcèlement Les talibans ne sont pas à cours de moyen pour rendre la vie difficile aux femmes et aux hommes afghans. L’une de leur tactique, depuis plusieurs des mois, est d’entraver la bonne marche des actions humanitaires en prenant des mesures restrictives à l’encontre des hommes et des femmes qui travaillent ensemble, sous prétexte qu’ils ne pouvent être en contact de manière prolongée. Quelques jours à peine après avoir autorisé certaines femmes afghanes à travailler dans les locaux du " World Food Programme " lancé par les Nations unies, la milice des talibans a ordonné à la mission spéciale de l’ONU basée en Afghanistan de quitter ses bureaux de Kaboul. Les talibans ont accusé la mission de l’ONU de ne pas avoir renouvelé son contrat auprès des autorités afghanes et ne pas avoir payé la location des locaux qu’elle occupe dans le cadre de sa mission. Plus récemment, au début du mois d’août, les talibans ont arrêté quatre hommes qui travaillent pour des organisations humanitaires, les accusant d’inciter les femmes et les hommes afghanistans à se tourner vers la foi chrétienne. Les talibans punissent de mort quiconque enseigne une autre confession que l’islam. Pourquoi les pays occidentaux, qui sont enclin à se conduire à la moindre occasion les gendarmes du monde, ne font-ils rien pour maîtriser ces fous furieux ? Probablement parce que leur intervention ne leur rapporterait rien dans le domaine économique. Sauver des millions de vies humaines, cela ne veut-il donc plus rien dire pour les bien nantis de ce monde ? © 2001 Micheline Carrier (Sources : WWW.FRATERNET.COM, 6 juillet 2001, Section Droits des femmes et Société Radio-Canada, 7 août 2001 ; Marc Epstein et Stephen Gladieu, « Voyage au coeur de la barbarie », L’Express, 28/06/2001, http://lexpress.fr/express/Info/Monde/Dossier/afghanistan/dossier.asp). Témoignages Les talibans ont fermé toutes les écoles de filles. Certaines se risquent à prendre des cours privés dans la clandestinité. Voici ce que raconte aux reporters de « L’Express » une femme mère de deux adolescentes : « Nous restons toutes les trois à la maison et nous regardons les murs. Il n’y a plus de télévision. Nous avons vendu le poste de radio. Et, si je dois sortir, je n’aime pas laisser mes enfants seuls : j’ai expliqué mille fois à mes filles qu’elles devaient s’éloigner des fenêtres, car personne ne doit les voir dévoilées. Cela peut-être très dangereux. J’ai même collé du carton sur les vitres... » Les femmes battues sont légion, les tentatives de suicide augmentent sans cesse, et même si elles n’y sont pour rien, les femmes qui n’ont plus le droit de travailler se sentent coupables parce que le revenu familial est diminué de moitié. Une médecin rapporte : « La plupart de mes patientes se plaignent de mal au dos ou de migraines. Mais dans 80% des cas, leurs souffrances sont d’origine psychologique. Et, sur ce registre, je suis impuissante ». Le reporter de L’Express demande pourquoi elle n’utilise pas des antidépresseurs. « À supposer que j’en dispose, au nom de quoi devrais-je les prescrire, demande-t-elle. Prenez mon cas. J’ai une cinquantaine d’années. je suis médecin. Chaque matin, je suis assise dans un bureau et je porte une blouse blanche. Je semble avoir un statut social. En vérité, c’est à mon frère que je dois de travailler ici tous les jours. Demain, s’il refuse que je vienne à la clinique, je n’aurai aucun recours. Alors, comme beaucoup de mes amies, je resterai chez moi toute la journée. Le quotidien des femmes en Afghanistan, aujourd’hui, c’est ça. Et les antidépresseurs ne changeront rien à cette vérité fondamentale. » (Source : Marc Epstein et Stephen Gladieu, « Voyage au coeur de la barbarie », L’Express, 28/06/2001) Liens utiles Liens utiles
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