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mardi 12 décembre 2017 Défense de la réalité dans un monde post-vérité Un homme devient-il une femme dès lors qu’il dit en être une ? Traduction TRADFEM
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Cet article débute par une simple affirmation. Veuillez la lire et prendre un moment pour en peser la valeur : Un homme est une femme dès qu’il dit en être une. Vous pouvez, si vous le voulez, interpréter cette phrase comme la prémisse de ce qui va suivre : c’est la racine à partir de laquelle tout le reste se développe. Un bébé naît garçon, un garçon sans ambigüité, avec un système reproducteur masculin, des organes génitaux masculins. Il est reconnu comme un garçon par toutes celles et ceux avec qui il entre en contact, qui le traitent sur cette base dès le moment de sa naissance. À la maison, à l’école, dans la rue, il est un garçon. Il n’a jamais été autre chose qu’un garçon, et la masculinité est tout ce qu’il connaît. Avec le temps, le garçon devient un homme : sa voix devient plus grave et il grandit, acquérant plus de force physique. Mais à un certain moment de sa vie – peut-être plus tôt, peut-être plus tard – il dit : « Non... attendez. En fait je sens que je ne suis pas du tout un homme, mais, au fond de moi-même, une femme. » Et à ce moment, tout s’efface. Tout ce qu’il avait de distinctement masculin : la pomme d’Adam, les testicules produisant des spermatozoïdes, les années passées en préparation à l’exercice de la domination sexuelle – tout cela est censé faire place au féminin. La constitution physique et les antécédents ne comptent plus pour rien, les yeux et les esprits ont fait erreur durant tout ce temps. Le garçon n’a jamais été un garçon. Ses sœurs, malgré leur peu d’espace personnel, doivent apprendre à lui faire encore plus de place. C’est à partir de cette affirmation que découle tout le reste. Les journaux témoignent de querelles à propos d’espaces sûrs, comme des toilettes et des vestiaires. Des emplois et des fonds censés être réservés à celles d’entre nous qui sont nées de sexe féminin – et défavorisées pour cette raison – sont maintenant la prérogative de toute personne susceptible de les réclamer. En l’espace de deux courtes minutes, comme résultat direct de l’ouverture des compétitions sportives féminines à quiconque ressent intérieurement qu’il a le droit d’y participer, un homme bat si sauvagement la boxeuse MMA Tamikka Brents que son arcade orbitaire est brisée et qu’on doit lui poser sept agrafes à la tête. Bien que chacune de ces questions mérite d’être envisagée séparément et examinée de façon approfondie, il est clair que tout cela tient en fin de compte à cette affirmation : un homme est une femme dès qu’il prétend en être une. En d’autres termes, les transfemmes sont des femmes, peu importe leur aspect, leur statut hormonal ou chirurgical, ou si elles ont revendiqué leur féminité il y a vingt ans ou il y a vingt minutes. Pas de débat, pas de questions. C’est là que réside le principe de base de l’auto-identification du genre : la base sur laquelle sont proposés tous ces nouveaux amendements au Gender Recognition Act, la loi britannique sur la reconnaissance du genre. C’est de là que partent toutes les argumentations, et c’est leur conclusion inévitable. Et donc peu importe la compassion que nous souhaitons avoir, notre désir de faire des compromis, ou notre inclination à avancer sur la pointe des pieds, il reste que si nous voulons mener une défense claire et hardie des droits des femmes, nous devons trouver un espace dans lequel pouvoir déclarer – sans ambigüité et avec confiance – que cette phrase n’est simplement pas vraie. Pas de précautions oratoires, pas de fleurs – ce n’est simplement pas vrai. Permettez-moi de m’expliquer. Reconnaître que ce n’est pas vrai ne signifie pas que je ne reconnais pas votre identité de genre. Cela ne signifie pas que je vous déteste. Le fait que ce ne soit pas vrai ne signifie pas que je refuse la réalité de la dysphorie de genre ou que je n’ai pas d’empathie avec la souffrance humaine qui l’accompagne. Cela ne signifie pas non plus que je mets en doute le droit d’exister de quiconque, ou que je conteste son droit aux mêmes prérogatives humaines que tout le monde. Cela signifie seulement que je n’accepte pas la prémisse qu’un homme est une femme dès qu’il dit en être une. Je ne crois pas en cette affirmation parce qu’elle est fausse. Si notre garçon de tout à l’heure rencontre un médecin et se fait prescrire certaines hormones, il peut probablement développer certaines caractéristiques sexuelles secondaires associées au féminin. Il peut choisir de s’habiller ou de se comporter conformément au stéréotype féminin s’il le veut, ou s’identifier fortement à des rôles sociaux associés au genre féminin. Il peut, à tout moment, modifier chirurgicalement son corps dans l’espoir de soulager sa dysphorie et de mieux s’aligner physiquement avec l’identité de genre dans laquelle il se sent plus à l’aise. Et dans la société tolérante où nous voulons toutes et tous vivre, rien de tout cela ne devrait susciter les manchettes de journaux. Bien sûr, nous devrions adopter des lois qui le protègent de la discrimination et qui lui garantissent un accès égal au logement, à l’emploi et à la justice. Utiliser les pronoms qu’il préfère est, je crois, la chose polie et décente à faire, et nous devrions créer des tiers espaces, neutres à l’égard du genre, pour lui permettre de se changer, d’utiliser les toilettes et d’être en sécurité s’il doit être incarcéré. En effet, nous reconnaissons le danger que les hommes qui imposent les règles du genre représentent pour les personnes trans-identifiées. Mais notre garçon n’est pas de sexe féminin. Et étant donné que les femmes sont déjà désavantagées par leur sexe et ne disposent que d’espaces limités, il est déraisonnable de s’attendre à ce que nous nous tassions pour lui faire encore plus de place. Et dans notre confusion et notre colère à voir contesté le droit des femmes d’être inquiètes de devoir partager leurs espaces avec des porteurs de pénis, il est très facile de perdre de vue le mensonge de base sur lequel repose tout cet édifice : "Un homme est une femme dès qu’il dit en être une". Il incombe à quiconque affirme son engagement envers les valeurs de rationalité, de justice et d’égalité, de se demander s’il ou elle croit sincèrement que cette affirmation est vraie. Et surtout, nous devons nous demander quel pourcentage du grand public se dirait d’accord avec cette affirmation si elle lui était présentée clairement ? Un conseiller du Parti travailliste, Tris Osborne, a récemment déclaré sur Twitter qu’en ce qui concerne son parti, la question avait été tranchée. Les transfemmes étaient des femmes, et avaient donc droit aux emplois, aux espaces et aux fonds réservés aux femmes, un point c’est tout. « Vous avez perdu », a-t-il persiflé à l’égard des femmes qui exprimaient leur consternation sur son fil Twitter. Mais où, comment et par qui cette décision a-t-elle été prise ? Considérant que c’est une décision qui renverse tout ce que nous avons toujours su vrai au sujet du sexe et de la biologie de la procréation, à quels spécialistes le Parti travailliste s’est-il adressé ? Quelles consultations et discussions ont eu lieu et, enfin, où est la preuve que la phrase « les transfemmes sont des femmes » est quelque chose de plus qu’un article de foi, comme affirmer l’existence de Dieu ? On aurait pu penser que si l’on avait découvert une preuve concluante au sujet d’une capacité humaine à passer d’un sexe à l’autre, ou du caractère purement imaginaire d’un dimorphisme sexuel chez l’être humain, alors nous serions tous et toutes à saluer cette avancée comme la percée scientifique la plus révolutionnaire de notre temps. Il y aurait des décorations, des titres de journaux, la célébrité et la gloire pour les scientifiques responsables. Et pourtant, nous avons réussi, d’une manière ou d’une autre, à en venir au point où déclarer son désaccord avec cette phrase est terriblement controversé et peut mener à des conséquences négatives, aux plans social et professionnel. Et cela malgré le fait que la plupart des gens savent parfaitement que cette phrase est fausse. Face à ce déni et à cette intimidation, une question plus intéressante se pose alors : si vous savez qu’il n’est pas littéralement vrai que les hommes sont, ou peuvent devenir, de vraies femmes, et que pourtant vous soutenez les propositions d’auto-identification à l’égard du genre, alors à quoi croyez-vous ? Croyez-vous vraiment que les hommes devraient pouvoir utiliser les espaces féminins, concourir dans les événements sportifs féminins et être sélectionnés pour des postes et des fonds réservés aux femmes, simplement parce qu’ils en ont envie ? Croyez-vous vraiment que le sexe n’a pas d’importance, malgré le sexisme de notre société ? Ou croyez-vous qu’il est plus moral de prétendre croire en des choses auxquelles l’on ne croit pas, si les nier risque de causer de la détresse à une minorité vulnérable ? Peut-être croyez-vous que les réalités de la biologie sont insignifiantes, ou du moins de moindre importance, en comparaison des idées subjectives que ressent un genre socialement construit ? Ou que les sentiments de détresse vécus par une infime minorité d’hommes comptent pour plus que les droits et la sécurité des femmes de naissance, qui constituent la moitié de la population ? En d’autres termes, qu’est-ce que vous soutenez exactement et pourquoi ? Voilà les questions qu’il nous faut poser comme éléments d’un débat ouvert sur la meilleure façon de concilier les droits des femmes "de naissance" et les besoins de ceux qui s’identifient comme transfemmes. Pourtant, les militants trans rejettent ces questions activement et agressivement, en particulier parce que tout approfondissement de ces enjeux menace d’exposer le mensonge de base : celui qu’un homme est une femme dès qu’il dit en être une. Des décisions sont prises sans consultation, et des règles sont modifiées en coulisses, précisément parce que ce nouveau programme dépend totalement de l’ignorance des gens pour être approuvé et instauré. La loi protège encore l’identité sexuelle de toute discrimination. Donc, les nouvelles politiques qui donnent la priorité à l’identité de genre doivent être mises en œuvre pendant que la majorité du public n’en comprend pas encore toutes les implications. En effet, ceux qui cherchent à les imposer savent très bien que si elles étaient exposées en pleine lumière, la majorité des gens ne serait jamais d’accord. Les promoteurs du transgenrisme savent qu’ils n’ont simplement rien à gagner à un débat ouvert. En agissant de cette façon, quand arrive le temps de décider des droits des personnes, on peut soutenir que les choses fonctionnent déjà comme ça, que c’est le cas depuis un certain temps, et que « revenir en arrière » ne peut être envisagé. On est en train d’imposer des lois fondées sur un article de foi plutôt que sur l’évidence, et qui changent fondamentalement la manière dont nous nous organisons en tant qu’êtres humains, et cela se fait sans le consentement de la population générale, dont la majorité ne réalise pas ces enjeux. Pour ajouter à la confusion créée par le refus de discuter de tout cela, on maquille ensuite ces questions dans le langage des droits civils et du progressisme. On peut alors menacer et accuser d’intolérance les dissidentes qui signalent les attaques actuelles contre les protections basées sur le sexe et contre certaines libertés établies de longue date, comme la liberté d’association et d’expression. Les hommes de gauche en particulier ont profité de l’occasion pour traîner dans la boue les femmes réticentes à cette réforme. Pour ma part, je ne trouve pas du tout déraisonnable ma conviction que le sexe biologique est un fait immuable. Pourtant, même si, à mon avis, les sentiments internes et subjectifs au sujet du genre ne pèsent pas davantage et ne peuvent pas peser davantage que la biologie, je ne crois pas pour autant en l’infériorité ou en la méchanceté inhérente de qui que ce soit. Je n’accepte simplement pas la prémisse, c’est tout. Un homme n’est PAS une femme dès qu’il dit en être une. Traitez-moi d’intolérante si vous y tenez, mais cela ne sera pas vrai non plus. – Version originale : Medium, le 30 novembre 2017. – On peut lire Harvey Jeni sur MEDIUM et s’abonner à son fil Twittter @GappyTales Traduction : TRADFEM Mis en ligne sur Sisyphe, le 11 décembre 2017 Suggestion de Sisyphe : "Les droits des femmes sous le joug de l’identité de genre", par Diane Guilbault, présidente de Pour les droits des femmes du Québec. |
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