Il y a de ces feux qui nous habitent
ne laissent ni braises ni cendres
mais une permanence de la brûlure
flamber comme seule alternative
La beauté n’est pas de tout repos
elle a les yeux ardents de l’insurrection
son souffle le rythme des séismes
réprimés sur les lèvres de l’irréparable
Nos mots pierres étoiles soleils ou galaxies
éblouis tombent dans un abîme de feu
irrésistible comme l’aimant de nos regards
où se déploie à vif l’art obscur du désir
Ainsi jusqu’à ce jour je n’ai vu dans tes yeux
que le pur mouvement de l’amour en fuite
commencement fluide ou peut-être pointe
d’une quête sans fin de la pierre de feu
Quand tes mots m’effleurent feu paume et pulpe
fleuve forêt souffle à fleur de pensée
tu me connais mieux que l’eau dont je suis née
ou les marées fauves de la lune fin août
Tu es la lumière crue qui me transperce
m’aspire passe part embrasure vive
tu m’es le vertige le recommencement
l’éternité l’éclair et sa déchirure
Je connais un pays si inaccessible
que pas un cœur n’a pu y prendre racine
une terre d’avant la pierre et la flamme
une île sauvage où la mort me sourit
Ton visage passe penche trop près du cœur
à l’orée secrète de mes yeux pleins de nuit
plus ta voix m’envahit m’emporte me rêve
plus me revient l’envie de t’inventer la vie
Parfois tout m’échappe le ciel et l’ombre
la fine dentelle ovale des branches
le dessin du givre sur tes yeux d’hiver
même ta voix blanche feu irremplaçable
Je ne me rappelle plus quand j’ai fondu ma vie
à ton ombre seule enlevé ce manteau
de chair comme un voile qui rend invisible
écarté les flammes qui me cachaient la vue
Puis le jour se lève avec sa peau de nuit
collée aux paupières le bleu de l’absence
et du froid sur les mots ni barque ni rives
la mer l’écriture l’infiniment libre
Une nouvelle année pareille à un livre
ouvert sur l’imprévu aux pages trop blanches
que tu voudrais remplir Icare éblouie
recommencer l’amour le silence et les mots