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mardi 24 avril 2018

Pour une conversation honnête au sujet du transgenrisme

par Diane Guilbault, présidente, Pour les droits des femmes du Québec (PDF Québec)






Écrits d'Élaine Audet



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À la suite d’une chronique de Nadia El-Mabrouk concernant les lois sur l’« identité de genre », un groupe d’universitaires et de militants n’a pas tardé à répliquer. Je crois nécessaire de réagir car plusieurs de leurs arguments reposent sur des affirmations sans fondements. Voyons cela comme le début d’une conversation qui aurait dû avoir lieu avant l’adoption des lois et des règlements.

La rapidité et les conséquences des changements

Parlons d’abord de la vitesse des changements que les auteurs récusent. Quoi qu’en disent Florence Ashley et Marie-Pier Boisvert, ils sont survenus à une vitesse époustouflante surtout compte tenu de l’importance des changements ainsi imposés à l’ensemble de la société. UNE plainte a été déposée en 2012, une entente a été signée en 2017 (1) avec la Commission canadienne des droits de la personne. Et cette « petite entente » dont la quasi-totalité des Canadiennes et Canadiens ne savent rien, a pour effet non seulement d’éliminer des formules de politesse, comme Madame, Monsieur, mais également a amené le gouvernement canadien à éliminer les renseignements sur le sexe qui sont demandés dans les formulaires gouvernementaux.

Or, cette information sur le sexe est essentielle pour un gouvernement qui dit vouloir éliminer les inégalités vécues par les femmes. Sans données, impossible de connaître la réalité et d’apporter les correctifs appropriés. Cela revient, de la part du gouvernement fédéral, à renier sa promesse de faire des analyses comparatives selon les sexes, pourtant réaffirmée lors du budget 2018 !

De plus, le gouvernement du Québec est en train d’emboiter le pas, car selon la ministre de la Justice, Stéphanie Vallée, c’est un engagement du gouvernement issu du Plan de lutte contre l’homophobie et la transphobie. Qui savait que ce Plan signifiait la fin des statistiques sexuées ? La ministre de la Condition féminine, responsable de l’analyse différenciée selon le sexe (ADS), a-t-elle donné son aval ? Et combien de groupes de femmes ont été consultés sur cet enjeu ?

Voilà un premier « petit changement », une atteinte directe au droit des femmes à l’égalité, obtenu à la suite d’une seule plainte et en moins de 5 ans. Pour point de comparaison, rappelons que le droit de vote des Québécoises été obtenu après plus de 20 ans de revendications, et que ni la réforme électorale ni la parité ne sont encore au rendez-vous, bien qu’on en parle depuis des lustres.

Autre changement obtenu avec une rapidité record, l’adoption de la loi qui permet de faciliter le changement de mention de sexe chez les enfants : une semaine en tout et pour tout pour déposer le projet de loi, faire la première lecture, la deuxième lecture, une consultation indigne de ce nom - parce que personne n’a eu le temps de réfléchir et d’analyser les conséquences - et bing ! bang ! boum ! Adoption d’un projet de loi aux retombées complexes et invisibilisées, sans égard au principe de précaution par rapport à la santé physique et psychologique des enfants.

Si la loi no 35 permettant le changement de mention de sexe chez les adultes sur une simple déclaration est passée moins rapidement, elle a été votée en 2013 dans la plus grande discrétion (2), de façon à ce que personne ne sache ce dont il s’agissait vraiment. Plusieurs député-es n’y ont vu que du feu !

Inégalités dans les sports

Ici aussi, les signataires y vont allégrement avec des demi-vérités. Il est faux de prétendre que l’hormonothérapie annihile tous les avantages physiques masculins : musculature, capacité pulmonaire, taille, force, capacité cardiaque, etc. Être né homme est un avantage physique indéniable (3). À ce sujet, les études sérieuses concluent dans ce sens (4). Les avantages strictement liés à la testostérone ont d’ailleurs été confirmés à la suite d’une recherche (5) demandée par le milieu des sports et publiée en 2017.

De plus, le CIO a approuvé, sur les recommandations de son médecin conseil, lui-même un homme qui se présente maintenant comme femme (6), un niveau de testostérone de 10 nm/l., c’est-à-dire 3 à 4 fois plus que le niveau des athlètes féminines ! Le CIO ne s’illusionne pas : à preuve, il n’y a aucune restriction pour une femme qui voudrait concourir contre des hommes. Les restrictions concernent exclusivement les athlètes masculins qui veulent concourir contre les femmes. Il faut lire la lettre ouverte de Ana Paul Henkel, ex olympienne, pour saisir le sentiment d’injustice vécu par les femmes athlètes (7).

Les enfants

Comme le disent Florence Ashley et al., le mémoire de l’Ordre des psychologues mentionnait la nécessité d’effectuer davantage de recherches. Les auteurs de la réplique admettent donc que ces recherches n’existaient pratiquement pas au moment de l’adoption de la loi !

Les changements irréversibles arrivent dès la prise de bloqueurs de croissance que les militants banalisent. À preuve, le fabricant du bloqueur de croissance Lupron (8) précise qu’il n’y a pas d’études démontrant la « réversibilité de la suppression de la fertilité ». Pensons-nous vraiment que des ados de 12-13 ans sont à même de prendre une décision éclairée concernant leur fertilité future ?

Soulignons que ce médicament est administré off label, (c’est-à-dire pour une utilisation non approuvée par Santé Canada) à des enfants qui n’ont aucun problème de santé physique.

J’invite d’ailleurs toutes les personnes qui répètent comme les auteurs de la réplique, que « les bloqueurs d’hormones [sont] sécuritaires et réversibles » à regarder Jazz, l’histoire d’un enfant transgenre né garçon, grande vedette d’une télé réalité (9). Jazz prend des bloqueurs de croissance depuis ses 10-11 ans et apprend, devant les caméras de télé et devant nous, qu’en raison des bloqueurs de croissance, son pénis est trop petit (pour toujours) et le chirurgien ne pourra pas s’en servir pour créer un simili vagin, lors de sa chirurgie dite de réassignation sexuelle. Un autre documentaire de la BBC, qui devait être diffusé par CBC mais dont la diffusion a été annulée à la suite des pressions des militants trans, mérite aussi d’être vu.

Si, comme Ashley et Boisvert l’affirment, « Lorsque les changements irréversibles sont indiqués, à la suite des bloqueurs d’hormones, l’identité de genre est déjà très stable, tel que le démontrent les études sur le sujet », comment expliquer qu’il y ait de plus en plus de personnes qui "détransitionnent" (10), c’est-à-dire, qui se réapproprient leur sexe de naissance, et qui regrettent les atteintes à leur intégrité physique ?

Rappelons qu’il n’y a aucun test diagnostic permettant de distinguer entre des jeunes qui ont une dysphorie de genre temporaire, comme c’est majoritairement le cas (11), et les autres chez qui la dysphorie persistera à l’âge adulte. Mais lorsqu’on mutile une adolescente, par exemple en lui faisant une double mammectomie, ce changement est bel et bien irréversible. Il est vrai que dans la novlangue développée par les militants, une double mammectomie est simplement une « top surgery » tandis que la pénectomie, plus rare puisque plus nécessaire pour les changements à l’État civil, est appelée « bottom surgery » ! De beaux euphémismes qui cachent la réalité.

Florence Ashley et Marie-Pier Boisvert n’expliquent pas non plus l’augmentation faramineuse du nombre de jeunes filles dans les cliniques pour problèmes d’identité de genre. Des études montrent bien qu’il y a là un phénomène de contagion sociale (12) mais dont les conséquences peuvent être permanentes si on va de l’avant avec des traitements médicamenteux et chirurgicaux.

Poser des questions sur l’éthique de telles interventions est une obligation morale pour notre société. Les parents ont, eux aussi, le droit de poser des questions et de vouloir protéger l’intégrité physique de leurs enfants. À ces inquiétudes, les militants répondent par des statistiques impressionnantes sur le suicide. Mais ils se gardent bien de mentionner que les auteurs de l’étude la plus fiable sur le suicide, celle du Williams Institute (13), font des mises en garde sérieuses quant à l’utilisation de leurs chiffres qui seraient notamment surestimés en raison de multiples facteurs liés à la méthode de collecte de données. Cette invocation constante des risques de suicide n’aide en rien les enfants dysphoriques et sert plutôt à faire taire tout questionnement sur le discours des militant-es trans.

Tout comme Mme El-Mabrouk, nous croyons que les personnes qui présentent une dysphorie du genre ont besoin de soutien et doivent être protégées contre la discrimination. Mais cela doit se faire par des moyens qui n’ont pas de répercussions négatives sur les personnes elles-mêmes, ni sur le reste de la société. Parce qu’il est important, il faut que le débat se fasse de façon honnête et c’est pour cette raison que nous aussi, nous nous attendons à plus de rigueur, d’objectivité et d’éthique de la part des militantes et militants universitaires et, j’ajouterais, de nos politiciennes et politiciens.

 Lire aussi : "Qu’est-ce qu’une femme ?"

Notes

1. https://www.chrc-ccdp.gc.ca/fra/contenu/communique-commun-une-militante-trans-obtient-satisfaction-dans-une-affaire-de-droits-de-la
2. Le projet de loi s’intitulait "Projet de Loi no 35 modifiant le Code civil en matière d’état civil, de successions et de publicité des droits". Seuls des représentant-es des groupes LGBT avaient été invités à se faire entendre.
3. http://www.wnd.com/2017/03/female-athletes-crushed-by-women-who-were-once-men/
4. https://www.stuff.co.nz/sport/other-sports/99434993/professor-of-physiology-says-transgender-athletes-have-advantage-in-speed-power "Biological sex differences : bones & muscles."
5. https://fairplayforwomen.com/biological-sex-differences/
Stéphane Bermon, Pierre-Yves Garnier. "Serum androgen levels and their relation to performance in track and field : mass spectrometry results from 2127 observations in male and female elite athletes." British Journal of Sports Medicine, juillet 2017. http://bjsm.bmj.com/content/early/2017/07/12/bjsports-2017-097792
6. Association canadienne pour l’avancement des femmes dans le sport. "IOC TRANSGENDER GUIDELINES". http://www.caaws.ca/ioc-transgender-guidelines/
7. "Open Letter to the International Olympic Committee" Ana Paula Henkel, Brazil, 14 février 2018, https://twitter.com/AnaPaulaVolei/status/963875382871998464
8. Lupron : "What’s the harm ?" https://4thwavenow.com/?s=Lupron&submit=Search
9. "I am Jazz." https://www.tlc.com/tv-shows/i-am-jazz/
10. http://nationalpost.com/news/world/the-new-taboo-more-people-regret-sex-change-and-want-to-detransition-surgeon-says
11. "Do trans- kids stay trans- when they grow up ? "http://www.sexologytoday.org/2016/01/do-trans-kids-stay-trans-when-they-grow_99.html
12. http://quillette.com/2017/10/06/misunderstanding-new-kind-gender-dysphoria/
13. American Foundation for suicide prevention. "Suicide Attempts among Transgender and Gender Non-Conforming Adults." pp. 3-4 http://williamsinstitute.law.ucla.edu/wp-content/uploads/AFSP-Williams-Suicide-Report-Final.pdf

Mis en ligne sur Sisyphe, le 22 avril 2018



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Diane Guilbault, présidente, Pour les droits des femmes du Québec (PDF Québec)


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