Incarnation de la lutte pour le droit à l’avortement en Pologne, Alicja Tysiac reprend son combat contre la puissante église catholique polonaise, arc-boutée contre l’interruption volontaire de grossesse (IVG). Son procès en appel contre le magazine Gosc Niedzielny (« l’Invité du dimanche ») édité par l’épiscopat polonais s’ouvre aujourd’hui. Le 23 septembre dernier, le tribunal de Katowice a condamné en première instance cet hebdomadaire et l’archevêché de Silésie à publier des excuses et à verser 10 000 euros de dommages et intérêts pour avoir diffamé Alicja Tysiac. Accusée d’être une meurtrière d’enfants, elle avait été comparée à Joseph Mengele, le sinistre docteur nazi du camp de concentration d’Auschwitz.

En 2007, cette femme de trente-neuf ans, mère de trois enfants, avait réussi à faire condamner la Pologne par la Cour européenne des droits de l’homme pour lui avoir interdit d’avorter. L’IVG est interdite en Pologne depuis 1993 sauf en cas de viol, de malformation du fœtus et de danger pour la santé de la mère.

Alicja Tysiac a été contrainte d’accoucher en dépit des risques sérieux et réels que cela comportait pour sa vue. « Il s’agissait avant tout de montrer que le droit à l’avortement thérapeutique n’est pas respecté en Pologne », avait-elle dit à l’époque.

Aujourd’hui, presque aveugle, dotée d’épaisses lunettes, elle ne voit pas à plus d’un mètre cinquante de distance. Handicapée à 100%, elle survit avec une pension d’invalidité qui dépasse à peine les 200 euros par mois.

« Une victoire d’Alicja à la cour d’appel serait une victoire pour les droits reproductifs des femmes en Pologne et en Europe et une victoire de l’État laïc sur la hiérarchie catholique polonaise conservatrice », explique la Marche mondiale des femmes contre les violences et la pauvreté, membre du comité de soutien d’Alicja.

Damien Roustel

– Source : L’Humanité.

Mis en ligne sur Sisyphe, le 19 février 2010

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