C’est en période de conflit armé que l’insécurité atteint ses niveaux les plus extrêmes. La pauvreté crée des conditions favorables aux conflits, et les conflits accroissent à leur tour la pauvreté. En Afrique, les conflits armés sont une cause majeure de pauvreté car ils entraînent des déplacements de population, la destruction des moyens de subsistance et la
désintégration des réseaux sociaux.
Dans de nombreux conflits, les attaques contre les civils sont une stratégie délibérée pour terroriser la population et occuper des terres. Forcer les gens à fuir en les privant de leurs moyens de subsistance est
une stratégie militaire. Une autre stratégie consiste à commettre délibérément des violences sexuelles contre les femmes et les jeunes filles afin de diviser les communautés.
Ces deux stratégies ont été utilisées pendant le conflit au Darfour (Soudan). Des centaines de milliers de Darfourien-nes ont fui le Soudan pour aller se réfugier au Tchad voisin. Ils vivent maintenant dans des tentes, ne devant leur survie qu’à l’aide humanitaire. Les femmes et les jeunes filles doivent quitter les camps pour aller chercher de l’eau ou du bois pour le feu, ce qui les rend vulnérables aux agressions par des groupes d’opposition armés, des bandits ou des hommes de la région. Elles ne sont pas non plus en sécurité dans les camps, où le niveau de violence est élevé.
Mariam, mère de deux enfants, a été violée dans le camp de réfugiés de Gaga, dans l’est du Tchad. Elle vit dans ce camp depuis le début du conflit au Darfour, il y a plus de six ans, et elle y travaille depuis trois ans
comme travailleuse sociale. Elle a été violée par un de ses collègues, un Tchadien. Celui-ci a perdu son travail, mais aucune enquête ni procédure officielle n’a été ouverte. Cet homme vit en liberté dans la ville
voisine, tandis que Mariam doit vivre avec les séquelles du viol : « Je ne vais même plus chercher de l’eau car j’ai l’impression que tout le monde me regarde. »
Assez souvent, les conflits ouverts ne sont pas suivis de la paix, mais d’une période marquée par une violence armée persistante, qui menace les civils, et en particulier les femmes. En République démocratique du Congo (RDC), les nombreux viols et actes de violence sexuelle contre les femmes se poursuivent malgré plusieurs accords de paix. La plupart de ces viols sont commis en toute impunité ou presque par des soldats et des membres de différents groupes armés.
Les négociations de paix sur l’est de la RDC, menées sous l’égide de la communauté internationale, n’ont pas suffisamment pris en compte le problème des femmes qui vivent dans la zone de conflit, et n’ont pas permis d’éliminer la violence généralisée contre les femmes et les fillettes. Pourtant, dans ses résolutions 1325 (2000), 1820 (2008), 1888 (2009) et 1889 (2009) sur les femmes, la paix et la sécurité, le Conseil de sécurité des Nations Unies a clairement demandé que les femmes participent aux processus de prévention et de résolution des conflits et aux efforts de
construction de la paix. Lors de la conférence de paix de Goma, en janvier 2008, les femmes de l’est de la RDC ont protesté : « La voix de la femme n’a pas toujours été entendue et prise à sa juste valeur [dans la
recherche de la paix]. Pourtant ensemble, avec les enfants, elle est la principale victime des formes de violences diverses. » (1)
Note
1. Amnesty International, République démocratique du Congo.
Nord-Kivu. Une guerre sans fin pour les femmes et les enfants,
Index AI : AFR 62/005/2008, site d’Amnesty International.
Source : Le piège du genre. Femmes, violence et pauvreté, Amnesty International, Novembre 2009 Index : ACT 77/009/2009. Document en PDF à télécharger depuis le site d’Amnesty International.
Mis en ligne sur Sisyphe, le 24 novembre 2009