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lundi 28 mars 2011

Prostitution - Une avocate féministe décrit le succès de la Suède contre la prostitution

par Mark Hasiuk, Vancouver Courier






Écrits d'Élaine Audet



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Question à choix multiples. Quel modèle suédois a sauvé d’innombrables femmes de la violence et de la mort ?

A) Elin Nordegren (autrefois connue sous le nom de Mme Tiger Woods)

B) Le casque de hockey Jofa que porte Hank Sedin à l’entraînement

C) Un ensemble de lois et de politiques utilisées en Suède pour contrer la prostitution

Réponse : C.

En 1999, après des décennies de légalisation de facto, le gouvernement suédois a criminalisé l’achat de sexe - mais non sa vente - et multiplié les services sociaux rendus aux femmes prostituées.

Cette approche, connue sous le nom du modèle suédois ou nordique, est à deux volets : la police cible les clients et les proxénètes, tandis que des travailleuses sociales aident les femmes qui le souhaitent à sortir de l’industrie de la prostitution.

Dans les années suivantes, le nombre de femmes prostituées en Suède a chuté de façon spectaculaire, passant de 3000, selon une évaluation gouvernementale de 1995, à environ 600 en 2008. Le succès de la Suède a engendré des lois semblables dans la Norvège et l’Islande voisines.

Autre nouvelle source d’espoir, le 8 mars marque cette année le 100e anniversaire de la Journée internationale des droits des femmes. Jeudi, la Bibliothèque municipale de Vancouver accueillera Gunilla Ekberg, avocate de renom d’origine canadienne et féministe qui a travaillé en étroite collaboration avec le gouvernement suédois, qui parlera de prostitution et de trafic des personnes.

Même si Ekberg enseigne aujourd’hui le droit relatif aux droits de la personne (à l’Université de Lund en Suède), elle a vécu à Vancouver de 1994 à 2001.

« Et chaque fois que j’y reviens, je suis stupéfaite et étonnée par ce qui se passe ici », dit-elle, au cours d’une entrevue téléphonique la semaine dernière. « L’industrie de la prostitution est florissante à Vancouver - la prostitution intérieure, mais aussi l’utilisation absolument horrible des femmes dans la prostitution de rue. »

Les observations d’Ekberg n’ont rien de nouveau. Les spécialistes de la prostitution partout dans le monde citent souvent le cas de Vancouver en exemple de « méthode à éviter ».

Son quartier du Downtown Eastside reste le point zéro de la prostitution de rue, malgré l’horreur encore très présente des crimes commis sur la ferme de Robert Pickton. La police de Vancouver ferme essentiellement les yeux sur la myriade de salons de massage de la ville (dont le personnel est principalement composé d’immigrantes asiatiques). Chacun de ces établissements verse à la mairie une redevance d’affaires annuelle de 226$. Malgré ses promesses de campagne électorale concernant la prostitution, le maire Gregor Robertson n’a rien fait depuis son élection en 2008, préférant prioriser les pistes cyclables et les poulets élevés dans les arrière-cours. Et vu le désintérêt de ses partenaires en application de la loi, un Bureau provincial de lutte contre la traite des personnes cruellement dépourvu de budget et de personnel mène bien peu de « lutte ». Et ainsi de suite.

Comparons ce fatras avec la Suède, où la prostitution est considérée comme une violation des droits de la personne.

Les hommes qui se font prendre à acheter une prostituée peuvent être emprisonnés pour une période maximale de six mois. Les amendes sont basées sur un pourcentage du revenu du contrevenant. Plus vous gagnez, plus vous payez.

Des unités spéciales de la police suédoise se concentrent sur la prostitution et sur la traite des êtres humains et travaillent en étroite collaboration avec les équipes gouvernementales de travail social et des groupes de femmes.

C’est une parfaite combinaison d’efforts et cela pourrait fonctionner au Canada.

Même si le modèle suédois mise sur un système très développé d’État-providence, au service d’une population relativement restreinte de neuf millions de personnes en regard des 34 millions de Canadiennes et de Canadiens, les résultats justifient et atténuent les coûts en cause.

Comme on l’a prouvé en Suède, une fois ce modèle adopté, le nombre de femmes prostituées diminue considérablement, réduisant d’autant les coûts d’application de la loi et des services sociaux. En outre, l’environnement hostile ainsi créé décourage le crime organisé - les principaux acteurs de la prostitution à l’échelle mondiale - de s’installer au pays.

Les sondages indiquent que la population suédoise endosse à très forte majorité ses lois musclées contre l’industrie de la prostitution, et ce malgré les efforts d’un lobby pro-prostitution minuscule mais très bruyant.

« Il s’agit de trois personnes », explique Ekberg, « qui sont très fortes en gueule et très aimées par les médias. »

Fascinant. Cette description s’applique également à Vancouver, où une poignée d’individus, y compris une politicienne fédérale, un professeur en herbe et un proxénète, tentent de dominer le débat sur la prostitution. Leurs arguments pro-légalisation (plus de sécurité et d’empowerment pour les femmes, etc.) ne tiennent pas la route en contre-interrogatoire.

Ces personnes prétendent que « des sites de travail intérieurs » offriront plus de sécurité aux femmes. Mais certains faits laissent entrevoir le contraire. À Amsterdam, une Mecque de la prostitution, des représentants gouvernementaux ont fermé des dizaines de maisons closes légales en raison de préoccupations sur la violence et la traite des personnes.

Ces personnes ont fait pression pour créer des bordels légaux à Vancouver pendant le règne du maire Sam Sullivan, en ignorant les personnes souffrant de toxicomanie et de maladies mentales qui allaient rester à grelotter sur les trottoirs du centre-ville tandis que les propriétaires de bordels se régaleraient de nouvelles recrues ayant une meilleure peau et moins de blessures.

Et, comme Ekberg le note à juste titre, aucune réforme juridique axée sur une décriminalisation n’arrivera pas à purger le crime organisé de l’équation. « Si vous avez une industrie légale, vous aurez également une importante industrie illégale. Quand on demande aux policiers de faire marche arrière face aux activités de prostitution, ils cessent d’intervenir où que ce soit. »

La première Journée internationale des droits des femmes a eu lieu durant une ère de grande inégalité. Si elles étaient des nôtres aujourd’hui, les grandes pionnières féministes du 20e siècle se rangeraient certainement aux côtés de femmes comme Gunilla Ekberg et rejetteraient, une fois de plus, une perversion de leur quête de justice et d’égalité.

 Version originale : Vancouver Courier, le 7 mars 2011

Traduction : Martin Dufresne



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Mark Hasiuk, Vancouver Courier



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