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Prostitueurs - Honte aux comportements honteux
Pour un quartier assiégé, la prostitution est loin d’être un "crime sans victime"

7 janvier 2010

Un texte d’opinion publié le 28 décembre dans un journal états-unien, le Baltimore Sun.



Les résident-es de Brooklyn se rendent un service louable en notant les numéros de plaque des automobilistes qui rôdent dans leur quartier en quête de personnes à prostituer. Comme l’a signalé récemment Peter Hermann, du Baltimore Sun, ces résident-es alertent la police qui vérifient ces numéros de plaque en regard de la description de chaque véhicule et écrivent à leur propriétaire immatriculé une lettre les avertissant que leur véhicule a été vu dans des circonstances suspectes.

Même si ces lettres, imprimées sur le papier officiel du Service de police, n’accusent les propriétaires d’aucun crime – il n’existe pas de loi contre la conduite à très basse vitesse sur une voie publique – la plupart des hommes qui la reçoivent comprennent le message. La simple perspective d’une dénonciation et d’une humiliation publique – sans parler des complications domestiques qui risquent de survenir avec leur épouse et leur famille – suffisent à faire réfléchir la plupart des amateurs de sensations fortes avant de retourner dans ce quartier.

Nous n’accordons aucune foi à la suggestion que le signalement de numéros de licence constitue une forme de « vigilantisme », où des citoyen-nes s’arrogeraient le droit de se faire justice. Les résident-es, qui connaissent leurs rues mieux que personne, ont raison de dire que la police ne peut être partout et a besoin de l’aide de la collectivité. Ils et elles assurent simplement cette aide en fournissant aux agents l’information nécessaire pour faire leur travail. Les groupes de surveillance de quartier, comme celui de Brooklyn, sont la première ligne de défense contre toutes sortes de crimes qui pourraient être évités si leurs auteurs savaient qu’on les surveille. La ville gagnerait, selon nous, à posséder plus d’organisations de ce genre.

Nous ne sommes pas impressionné-es non plus par les arguments de certains avocats de la défense, qui soutiennent que des lettres reçues de la police risquent de salir la réputation de gens parfaitement innocents qui s’adonnent simplement à se trouver quelque part où ils semblent être à la recherche de prostituées. À l’heure où des navigateurs GPS signalent aux automobilistes le moindre tournant, c’est plaisanter que d’affirmer que ceux qui longent insolemment le trottoir ne font que chercher une place de stationnement ou une adresse peu familière. De plus, la police ne fait qu’adresser une lettre aux conducteurs, elle n’affiche pas leurs noms dans Internet.

Si des efforts comme ceux entrepris à Brooklyn connaissent le succès, il faudra féliciter les résident-es d’avoir contribué à saper un système cruel qui exploite cruellement des femmes et des mineures, favorise le commerce de la drogue et contribue à une dangereuse diffusion de maladies transmises sexuellement, comme le VIH. La prostitution est loin d’être un « crime sans victime », comme le prétendent souvent ses apologistes : lorsqu’on prend en compte tous les coûts de ce commerce pour la société et la santé publique, c’est l’ensemble de la collectivité qui en subit les conséquences.

Si les prostitueurs potentiels qui cherchent du sexe à louer craignent la honte d’être exposés pour leur comportement honteux, qu’il en soit ainsi. Plus les résident-es et la police collaboreront à débarrasser leurs rues de tels prédateurs, plus il sera difficile pour les prostitueurs de bafouer impunément la loi.

(Traduction : Martin Dufresne)

  • Version originale dans le Baltimore Sun, le 28 décembre 2009.

    Mis en ligne sur Sisyphe, le 5 janvier 2010




    Source - http://sisyphe.org/article.php3?id_article=3482 -