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Pour une représentation équitable des femmes et des hommes en politique - Mémoire du Conseil du statut de la femme sur le projet de loi no 78

15 mars 2010

Québec, le 16 mars 2010 — Devant la Commission des institutions qui étudie le projet de loi no 78, Loi modifiant la Loi électorale concernant la représentation électorale et les règles de financement des partis politiques et modifiant d’autres dispositions législatives, la présidente du Conseil du statut de la femme, Mme Christiane Pelchat, a exprimé les préoccupations du Conseil à l’égard d’une représentation équitable des femmes et des hommes en politique.

« L’approche volontaire a peu de chances de réussir pour augmenter le nombre d’élues en politique, et le gouvernement en est conscient. Ça prend des mesures concrètes, a déclaré la présidente. Or, nous déplorons que le projet de loi ne fasse aucune mention d’un objectif de représentation équitable des femmes et des hommes, ni de mesures incitatives. Pourtant, c’était le cas en 2005, lorsque le gouvernement a présenté l’avant-projet de loi remplaçant la Loi électorale. »

Au cours des années, plusieurs mesures d’actions positives ont été mises en place afin de corriger les effets de la discrimination systémique envers les femmes. On peut penser, entre autres, à la Charte québécoise des droits et libertés amendée quelques fois, notamment pour y ajouter la grossesse comme motif ne pouvant faire l’objet de discrimination ainsi que des dispositions relatives à l’implantation de programmes d’accès à l’égalité favorisant l’équité en emploi entre les femmes et les hommes, ou encore à la Loi sur le patrimoine familial, à la Loi sur l’équité salariale, à la Loi sur l’accès à l’égalité en emploi et bien sûr, plus récemment, à la Loi sur la gouvernance des sociétés d’État qui oblige celles-ci à avoir des conseils d’administration paritaires d’ici 2011. Il doit en être de même pour la place des femmes dans la sphère politique, car en dépit de nombreux progrès en termes d’égalité, la société québécoise accuse un retard à cet égard. La présence des femmes dans les institutions démocratiques est essentielle, compte tenu de leur importance démographique et de leur apport à la société sur le plan social et économique. En effet, on compte 29 % de députées à l’Assemblée nationale, 16 % de mairesses et 29,3 % de conseillères municipales.

Reddition de comptes

Puisque le projet de loi prévoit d’augmenter le financement étatique des partis politiques, le Conseil croit que cette hausse doit être accompagnée de responsabilités additionnelles de leur part. En fait, il faudrait moduler le financement en fonction de l’atteinte de l’égalité entre les femmes et les hommes à l’Assemblée nationale. Les partis politique doivent avoir une obligation de rendre des comptes sur l’atteinte de l’égalité entre les femmes et les hommes à l’Assemblée nationale et au municipal en présentant un plan d’action à cet égard qui fait rapport annuellement au Directeur général des élections du Québec.

« Le projet de loi prévoit une croissance du financement de 64 %. Puisqu’il s’agit de deniers publics, le gouvernement est en droit d’exiger que ces sommes servent à une égalité entre les femmes et les hommes dans la représentation, comme il l’a fait pour les sociétés d’État », a affirmé Mme Pelchat.

Mesures financières incitatives

La solution vers un plus grand nombre de femmes élues passe par des mesures financières incitatives concrètes à l’endroit des partis politiques. Le Conseil réclame ce type de mesures depuis plusieurs années afin d’appuyer les partis dans leurs efforts pour amener un plus grand nombre de femmes à se porter candidates aux élections et à être élues.

Le Conseil propose donc, de nouveau, la création d’une prime au financement des partis politiques. Une telle prime doit représenter davantage qu’une reconnaissance tangible des efforts déjà accomplis pour présenter un plus grand nombre de candidates. Elle doit servir à mettre en œuvre des actions structurantes en vue de rechercher plus systématiquement des candidates et de les appuyer avant et pendant la période électorale.

À l’inverse de la loi française qui punit, la proposition du Conseil vise à récompenser et à appuyer les efforts des partis dont au moins le tiers des candidats élus sont des femmes en leur accordant une majoration du remboursement des dépenses électorales auquel ils ont droit du pourcentage égal au nombre de femmes élues dans leur formation. Par exemple, la présence de 35 % de députées dans un caucus entraînerait, pour ce parti, non seulement le remboursement des dépenses électorales auquel il a droit, mais en plus l’octroi d’une prime équivalant à 35 % de ce montant. Le pourcentage de majoration de remboursement va ainsi de pair avec le pourcentage d’élues. La prime maximale serait fixée à 50 %, étant donné que, si un parti y avait droit, sa délégation à l’Assemblée nationale serait composée d’au moins la moitié de femmes.

Le mémoire présenté par le Conseil du statut de la femme peut être consulté sur le site Internet au www.placealegalite.gouv.qc.ca.

Le Conseil du statut de la femme a pour mission de conseiller le gouvernement et d’informer la population sur les questions d’égalité entre les femmes et les hommes.

ANNEXE

Liste des recommandations du Conseil du statut de la femme

1. Que les partis politiques assument plus activement leur fonction de formation politique de leurs membres.

2. Que les partis politiques se dotent, au niveau des circonscriptions ou des districts municipaux, de comités de recrutement composés à parts égales de femmes et d’hommes.

3. Que les partis politiques soient tenus aux mêmes règles de financement pour les investitures locales que celles à la direction des partis politiques prévues dans le projet de loi.

4. Qu’un parti politique qui, à la suite d’une élection générale, compte au moins 30 % de femmes parmi ses députés reçoive un remboursement de ses dépenses électorales majoré du pourcentage de femmes élues dans sa formation politique, jusqu’à concurrence de 50 %. Que la Loi électorale stipule que cette mesure prendra fin lorsque le pourcentage des députées à l’Assemblée nationale aura atteint 40 % lors d’au moins deux élections générales consécutives.

5. Que la Loi électorale soit amendée de manière à permettre à une personne qui pose sa candidature à l’investiture d’un parti autorisé d’obtenir un congé sans traitement, à temps complet ou à temps partiel, selon son choix ;


     Que ce congé puisse être pris durant la période déterminée par le parti pour la tenue d’une investiture ;

     Que la protection de l’emploi et des avantages qui s’y rattachent, décrite dans la Loi électorale à l’intention des candidates et des candidats aux élections, s’applique de la même manière lors des candidatures à l’investiture d’un parti ;

     Que ce droit soit accordé sur la foi d’une attestation d’une instance officielle du parti à l’effet que l’employée ou l’employé a déposé son bulletin de candidature à une investiture.

6. Que la Loi sur les élections et les référendums dans les municipalités et la Loi sur les élections scolaires prévoient un congé sans traitement aux personnes qui posent leur candidature à une investiture d’un parti aux mêmes conditions que celles que nous proposons pour la Loi électorale.

7. Que la Loi électorale soit amendée de manière à :


     Créer deux types de dépenses des candidates et des candidats : 1) les dépenses électorales proprement dites et 2) les dépenses personnelles des candidates et des candidats qui incluraient notamment les frais encourus pour la garde d’un enfant ;

     Prévoir un plafond et un remboursement indépendants de chacun de ces types de dépenses jusqu’à concurrence d’une limite préétablie.

8. Que les partis politiques soient tenus de présenter un plan d’action favorisant l’élection de femmes et de faire rapport annuellement au Directeur général des élections.

 Pour information : Conseil du statut de la femme.

Mis en ligne sur Sisyphe, le 16 mars 2010




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