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Les Communes rejettent le projet de loi C-510 qui visait à criminaliser l’avortement

17 décembre 2010

par La Presse Canadienne et Sisyphe

OTTAWA, Presse Canadienne - Les députés du Québec, tous partis confondus, ont voté contre et fait rejeter le projet de loi qui visait à criminaliser le fait de pousser une femme à se faire avorter, mercredi à la Chambre des communes. Pour le Bloc québécois, cela illustre bien comment le Québec est différent du reste du Canada.

Par 178 voix contre 97, une majorité de députés ont donc fait rejeter le projet de loi C-510, qui n’avait manifestement pas le soutien du gouvernement, puisque le premier ministre Stephen Harper et plusieurs de ses principaux ministres ont voté contre.

Il s’agissait d’un projet de loi d’initiative parlementaire du député manitobain Rod Bruinooge, aussi président du caucus multipartite pro-vie au Parlement fédéral.

M. Bruinooge dit avoir mis son projet de l’avant après qu’une jeune femme de Winnipeg, Roxanne Fernando, a été assassinée par son petit ami. Il aurait supposément tenté de la forcer à avorter et l’aurait tuée après qu’elle eut refusé.

Le préambule du projet de loi se lisait ainsi :

« Loi modifiant le Code criminel (contrainte)

Attendu :

  • que le petit ami de Roxanne Fernando, une résidante de Winnipeg, a tenté de la contraindre à avorter de leur enfant à naître et l’a ensuite assassinée en raison de son refus ;
  • que de nombreuses femmes enceintes ont été contraintes à avorter et qu’elles ont subi, de ce fait, de graves blessures physiques, affectives et psychologiques ;
  • que la Cour suprême du Canada a reconnu dans l’arrêt Dobson c. Dobson que « [l]a grossesse représente non seulement l’espoir des générations futures mais également la continuité de l’espèce. L’on ne saurait imaginer phénomène humain plus important pour la société » ;
  • que le Parlement souhaite permettre aux femmes enceintes de poursuivre leur grossesse sans aucune contrainte,

    Sa Majesté, sur l’avis et avec le consentement du Sénat et de la Chambre des communes du Canada, édicte... » (voir le projet de loi).

    Le député manitobain avait soutenu que son projet de loi pour modifier le Code criminel n’influencerait en rien la légalité de l’avortement au pays.

    De nombreuses voix s’étaient pourtant élevées pour dénoncer le projet C-510 qui pouvait créer une brèche dans la loi et rouvrir le débat sur l’avortement.

    Sans surprise, tous les députés bloquistes et néo-démocrates ont voté mercredi pour rejeter C-510.

    Mais il y a eu division au sein des caucus libéraux et conservateurs. Dix députés libéraux se sont prononcés en faveur de C-510 et une poignée d’autres libéraux ont brillé par leur absence, dont leur chef, Michael Ignatieff.

    Alors que les conservateurs se présentent comme les grands défenseurs de la loi et l’ordre et adoptent la ligne dure envers les criminels, ils sont néanmoins plusieurs à avoir voté contre, dont le ministre de la Justice, Rob Nicholson, et la nouvelle recrue et ancien chef de la police provinciale de l’Ontario, Julian Fantino.

    Le chef du Bloc québécois, Gilles Duceppe, a estimé que le projet de loi n’avait aucun sens, puisque les femmes ne sont pas forcées à avorter par d’autres personnes, mais plutôt par de tristes circonstances, comme la pauvreté.

    Quant au consensus des députés québécois sur le vote, il s’agit d’un autre exemple, selon lui, des différences entre le Québec et le reste du Canada.

    « Je pense qu’il y a une réalité autre au Québec, et puis, que la mentalité populiste qui sévit malheureusement au Canada anglais amène des prises de position semblables », a-t-il expliqué, avant d’ajouter que le reste du pays n’a pas toujours été comme cela.

    Selon le leader parlementaire du Parti libéral, David McGuinty, il y a déjà tout ce qu’il faut pour ce genre de situation dans le Code criminel et il a qualifié le projet de loi de « superflu ».

    Lorsque le projet C-510 avait fait surface, le gouvernement avait énoncé sa position officielle selon laquelle il ne présenterait pas et n’appuierait aucun projet de loi qui rouvre le débat sur l’avortement.

    L’initiative de Rod Bruinooge a ainsi été rejetée malgré ses efforts des dernières semaines. Des citoyens du Québec ont récemment trouvé dans leurs boîtes postales des lettres de M. Bruinooge qui les enjoignait d’écrire à leur député pour qu’il vote en faveur de son projet de loi.

    Un député du Bloc québécois, Roger Gaudette, a aussi reçu une carte, dont l’origine n’était pas spécifiée, pour l’inciter à soutenir le projet.

    La Presse Canadienne, 15 décembre 2010

    Mis en ligne sur Sisyphe, le 16 décembre 2010

    La Presse Canadienne et Sisyphe


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