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Affaire DSK - "Amour à la française" ou sport de combat ?

8 septembre 2011

par Catherine Albertini, chercheure et membre de Choisir la cause des femmes

Si DSK a su faire acte de contrition auprès de certains de ses anciens collaborateurs du FMI, reconnaissant « une erreur de sa part », erreur susceptible de ternir l’image de cette institution perçue comme noble et prestigieuse par les médias et certains États, de ce qu’il reconnaît comme « erreur » nous n’en savons pas plus. Ni de sa signification, ni de ce qu’elle recouvre, « erreur » qui arrive à tout un chacun quand on est au mauvais endroit au mauvais moment et que l’on se fait pincer, errare humanum est, une forme d’auto-dédouanement en quelque sorte.

Si DSK pense qu’il lui suffit de présenter ses excuses au Parti socialiste et même à l’ensemble des Français ou aux citoyens du monde entier pour avoir sali l’image du FMI, du Parti socialiste, de la France, de l’Europe, de l’Occident et de Sarcelles, alors même qu’il s’est tu pendant toute la séquence judiciaire, obéissant scrupuleusement aux injonctions de ses avocats dont maître Brafman - qui se définit lui-même comme « l’avocat des types qui pensent que leur cas est désespéré » - pour retrouver les conditions de sa « reconstruction » et de sa « réhabilitation », après une « épreuve terrible », après avoir vécu « l’enfer », alors, nous atteindrions vraiment les sommets de l’obscénité.

Pour peu, ses fervents amis et partisans emploieraient à son endroit le vocabulaire ordinairement d’usage pour parler des victimes de viol. Or, même si le procureur de Manhattan a jeté l’éponge sur les sept chefs d’inculpation qui pesaient contre lui, il ne l’a pas pour autant blanchi, bien au contraire, puisque dans son rapport, il note « qu’il est peu vraisemblable qu’un acte sexuel aussi précipité puisse être consensuel ».

C’est sans doute cela « l’erreur de DSK », un viol dont on tait le nom, un viol euphémisé en « rapport sexuel précipité ». Car DSK ne saurait violer. Sa position le rend forcément désirable pour toutes les femmes, on ne peut que mentir quand on lui résiste et ses propres incohérences dans la séquence du Sofitel n’ont pas été retenues contre lui.

Dès son arrestation, il a invoqué la protection d’une quelconque immunité qu’il pensait associée à son statut, démontrant ainsi son sentiment absolu d’impunité. Il a nié ensuite farouchement qu’il se soit passé quoi que ce soit avec la femme de chambre Nafissatou Diallo dans la suite « présidentielle » du Sofitel de Manhattan. Puis, il fut contraint de reconnaître, les preuves ADN ayant entre-temps parlé, qu’il avait eu une relation sexuelle qualifiée de « consentie » avec Nafissatou Diallo alors qu’elle entrait dans la suite pour y faire le ménage. En 7 minutes chrono, entre 12h06 et 12h13, il faudrait que nous croyions au-delà d’un doute raisonnable qu’il a réussi à la séduire, à la convaincre des délices de « l’amour à la française », la pourchassant, lui arrachant ses collants et par là même sans « erreur » possible avec son consentement, lui bloquant la respiration, la sidérant pour finir par lui éjaculer à la face avec son joujou extra qui fait Crac Boummm Huuuu. Il s’agit non pas d’une relation sexuelle, comme nous le ressassent ad nauseam les médias, mais d’un combat sportif sexiste : un sport de combat. Avec un tel ami, les femmes n’ont pas besoin d’ennemis.

Non, DSK n’a pas à s’inviter dans les médias pour nous raconter son « cauchemar », s’il veut s’expliquer c’est dans un prétoire qu’il doit le faire. Il devra répondre à la justice américaine dans le procès civil qui l’oppose à Nafissatou Diallo qui a eu le courage de tenir bond, même et surtout car elle n’avait pas l’heur de connaître le système judiciaire américain et dont les « mensonges » sont périphériques à la séquence de 7 minutes dans la suite « présidentielle ». DSK devra s’expliquer aussi en France dans l’affaire Tristane Banon.

Non, la parole de DSK n’a pas plus de poids que la parole des plaignantes. Bien au contraire, puisqu’il avoue une « erreur ». Mais c’est devant la justice qu’il va falloir qu’il s’explique, pas devant les journalistes. Les femmes, toutes les femmes et notamment celles qui sont engagées dans la défense des victimes de viol ne pourraient que se sentir outragées par un tel cynisme et une si abyssale bassesse.

Lire aussi : "L’indécent retour médiatique de DSK", par Gisèle Halimi

Site Choisir la cause des femmes.

* Sur le passé trouble de DS, voir ceci.

Mis en ligne sur Sisyphe, le 6 septembre 2011

Catherine Albertini, chercheure et membre de Choisir la cause des femmes


Source - http://sisyphe.org/article.php3?id_article=3974 -