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Le Southern Poverty Law Center désigne les masculinistes comme organisations haineuses
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17 mars 2012

par Radfem News Service

Dans le plus récent numéro de son bulletin trimestriel « The Year in Hate and Extremism » (Une année de haine et d’extrémisme) (Numéro 45, printemps 2012), le Southern Poverty Law Centre (SPLC) désigne les militants masculinistes (aussi appelés « militants des Droits du Père ») comme une organisation haineuse. Le SPLC fait état de la misogynie virulente de ces organisations, de leur habitude de répandre de la propagande mensongère anti-femme et du fait qu’ils applaudissent et vont jusqu’à encourager des actes de violence extrême contre les femmes et les enfants, jusqu’à et y compris l’assassinat.

Dans le même numéro, le SPLC fait état des activités d’autres organisations haineuses opérant aux États-Unis, sous les titres suivants : « Georgia Militia Members to be Tried Later this Year in Movement’s Latest Murder Plot ; Son of Holocaust Memorial Shooter Discusses Family History of Racial Hate ; and Animal Rights Extremist Camille Marino Calls for Violence ».

Pour ceux qui ne le savent pas, le SPLC est une organisation à but non lucratif de défense des droits civiques. Elle se voue à la lutte contre la haine et le fanatisme, et cherche à obtenir justice pour les membres les plus vulnérables de la société.

« [...] Le SPLC a été créé pour veiller à ce que les promesses du mouvement des droits civiques deviennent une réalité pour tous et pour toutes. Depuis notre fondation en 1971, nous avons remporté de nombreuses victoires juridiques marquantes au nom des personnes exploitées, impuissantes et oubliées.

Nos actions en justice ont renversé le racisme institutionnel dans le Sud, mis en faillite certains des organismes prônant la suprématie blanche parmi les plus violents au pays, et obtenu justice pour des travailleuses et travailleurs exploités, des détenus maltraités, des enfants handicapés et d’autres victimes de discrimination. »

La méthode utilisée par le SPLC pour surveiller et renverser les groupes haineux comprend trois volets : il y a d’abord le suivi par le Centre des activités de groupes haineux et de terroristes opérant partout aux États-Unis et le dépôt de poursuites judiciaires innovatrices qui cherchent à détruire les réseaux d’extrémistes radicaux ; puis, l’organisation recourt aux tribunaux et à d’autres formes de plaidoyer pour remporter des réformes systémiques au nom des victimes de l’intolérance et la discrimination ; enfin, le Centre fournit gratuitement aux éducateurs des ressources qui enseignent aux enfants des écoles comment rejeter la haine, embrasser la diversité et respecter les différences.

Dans le bulletin qui vient de paraître, le SPLC consacre trois articles de fond à exposer, explorer et préconiser une surveillance des masculinistes.

Dans « Leader’s Suicide Brings Attention to Men’s Rights Movement » (« Le suicide d’un de leurs leaders attire l’attention sur le mouvement masculiniste »), un journaliste attaché au SPLC, Arthur Goldwag, décrit l’auto-immolation du masculiniste américain Thomas Ball Jefferson aux portes d’un tribunal du droit de la famille au New-Hampshire. Cet attentat devait servir et a effectivement servi d’appel aux armes adressé aux masculinistes et misogynes américains, qui se disent outrés par les décisions des tribunaux américains du droit de la famille. Ces tribunaux enquêtent souvent en profondeur sur les accusations de violence sexuelle, physique et affective au sein des familles. Or, la famille ou « sphère privée » a historiquement été pour les hommes le lieu d’un pouvoir arbitraire, où ils ont été autorisés à terroriser et blesser impunément des femmes et enfants, et à se défiler traditionnellement de leurs obligations financières en quittant la ville, niant leur paternité, ou pire encore.

Le geste extrême du responsable de la section Worcester de la Fatherhood Coalition du Massachussets était, d’une part, un acte de terrorisme domestique, illégal, mettant en danger des vies humaines et visant apparemment à intimider et contraindre les civils et le gouvernement. En effet, Ball a apparemment présenté son acte comme une déclaration de guerre adressée à l’appareil de droit familial, aux femmes et aux enfants :

    Dans une longue « Ultime Déclaration », qui est arrivée au journal Keene Sentinel après son décès, Tom Ball a relaté sa version d’une accusation déposée contre lui. Tout ce qu’il avait fait, a-t-il écrit, était d’avoir giflé sa fille de quatre ans et de lui avoir ensanglanté la bouche après qu’elle lui ait léché la main quand il l’a mise au lit. Une législation antiviolence familiale créée à l’instigation de féministes avait fait le reste, déplorait-il. « Le gouvernement fédéral a déclaré la guerre aux hommes, il y a 25 ans. Il est temps de vérifier à quel point ils tiennent à leur cause. Il est temps, les gars, de leur donner un avant-goût de la guerre. » Appelant à une insurrection tous azimuts, Ball a diffusé des conseils sur la préparation de cocktails Molotov et a exhorté ses lecteurs à s’en servir contre les palais de justice et les postes de police. « Il y aura des victimes dans cette guerre, a-t-il prédit. Il y aura des tués, des blessés, des prisonniers. Certaines de ces victimes seront dans leur camp ; certaines seront dans le nôtre. »

Violence planifiée

Comme on pouvait s’y attendre, l’« hommosphère », comme se désigne la cybercommunauté des masculinistes haineux, s’est très majoritairement ralliée à Ball en sympathisant avec son complexe de persécution et ses sentiments de bon droit masculin et de haine des femmes :

    Le suicide de Ball a ainsi attiré l’attention sur un monde souterrain de misogynes et d’ennemis des femmes, dont la fureur va bien au-delà de la critique du système judiciaire de la famille, des lois contre la violence familiale, et des fausses allégations de viol. Il existe littéralement des centaines de sites Web, blogs et forums consacrés à attaquer pratiquement toutes les femmes (ou, du moins, celles que ces hommes qualifient d’ « occidentalisées »). Cette soi-disant « hommosphère » inclut désormais aussi une page d’hommage à Tom Ball (« Il est Mort Pour Nos Enfants »).

Quelques semaines plus tard, l’hommosphère a répondu à l’assassinat de masse de 77 personnes par le masculiniste norvégien Anders Behring Breivik, qui s’indignait du « divorce sur demande » et a lui aussi galvanisé la misogynie de tous les hommes qui s’estiment lésés dans le monde entier :

    Ce genre de haine des femmes se voit de plus en plus dans la plupart des sociétés occidentales, et elle tend à aller de pair avec d’autres émotions antimodernistes : l’opposition au mariage de même sexe, à l’immigration non chrétienne, à la présence de femmes en milieu de travail, et même, dans certains cas, aux progrès social des personnes d’origine afro-américaine. Quelques semaines seulement après la mort de Ball, alors qu’on pouvait encore voir des traces de brûlure sur le trottoir de Keene, au New-Hampshire, cette dynamique a été une fois de plus clairement démontrée par le Norvégien Anders Behring Breivik.
    Le 22 juillet dernier, Breivik a abattu 77 de ses compatriotes, des adolescent-es pour la plupart, à Oslo et à un camp d’été sur l’île de Utøya, parce qu’il pensait qu’ils ou leurs parents étaient des sortes de libéraux « politiquement corrects » favorables à l’immigration musulmane. Mais Breivik était presque aussi volubile sur les sujets du féminisme, de la famille et des droits des pères, qu’il l’était pour s’en prendre à l’islam. « La menace la plus directe à la famille est le "divorce sur demande" », écrivit-il dans le manifeste qu’il a affiché en ligne avant d’amorcer son massacre. « Le système doit être réformé de telle sorte que le père se voit attribuer des droits de garde par défaut. »
    L’hommosphère l’applaudit avec enthousiasme. Un participant au magazine masculiniste en ligne The Spearhead (La pointe de javelot), voué à « défendre nos droits, nos familles et nos congénères masculins » afficha le commentaire d’appui suivant : « Existe-t-il une loi du talion plus adéquate que le fait de tuer les enfants de celles qui étaient si disposées à détruire les familles des hommes, à détruire la patrie des hommes ? »

Fausses allégations au sujet des femmes

Dans un deuxième article du bulletin du SPLC, « Men’s Rights Movement Spreads False Claims about Women » (« Le Mouvement des droits des hommes répand de fausses allégations au sujet des femmes »), les journalistes Mark Potok et Evelyn Schlatter décrivent la propagande la plus communément utilisée par les masculinistes américains pour inciter les hommes à la rage misogyne, encourager de nouvelles violences et obtenir de la sympathie pour leurs allégations de mauvais traitements par les femmes et le système judiciaire en cas de litiges de divorce et de garde – y compris des cas impliquant des accusations au pénal de harcèlement criminel, de viol et d’assassinat.

Par exemple, les masculinistes citent souvent de fausses statistiques sur l’incidence et la prévalence des crimes sexuels commis par des femmes et de leurs sévices contre des victimes masculines, affirmant que la situation est au moins aussi mauvaise pour les hommes (si ce n’est pire), alors que la recherche démontre systématiquement que les hommes constituent une écrasante majorité des auteurs de violences, comme l’agression sexuelle en général, le viol et le harcèlement des partenaires intimes, et que les femmes sont très majoritairement les victimes de ces crimes. Sans surprise, la recherche montre tout aussi systématiquement que lorsque des hommes sont violés, ils le sont presque toujours par d’autres hommes, et non par des femmes.

Les groupes masculinistes haineux se montrent également hyper-agressifs – et peu soucieux de la vérité – lorsqu’ils diffusent des statistiques fausses et démenties de longue date concernant « les fausses allégations de viol ». Voici un extrait de l’article :

    LEUR PRÉTENTION : Près de la moitié, sinon plus des agressions sexuelles signalées par les femmes n’ont jamais eu lieu. Diverses versions de cette prétention reviennent constamment sur des sites Web comme Register-Her.com, qui se spécialise dans la diffamation de femmes accusées d’avoir menti au sujet de leur viol. De plus, ces prétentions sont parfois le fait d’hommes impliqués dans des litiges judiciaires de garde d’enfants.
    LA RÉALITÉ : Cette prétention, qui a acquis une certaine crédibilité au cours des dernières années, est largement basée sur un article publié en 1994 dans les Archives of Sexual Behavior par Eugene Kanin, qui a conclu que 41% des allégations de viol sur lesquelles son étude s’est penchée étaient « fausses ». Mais la méthodologie utilisée par Kanin a été très critiquée, et ses résultats ne concordent pas avec la plupart des autres résultats obtenus par des recherches semblables. Ses recherches n’ont porté que sur une ville du Midwest (non identifiée), et il n’a pas même pas explicité les critères utilisés par la police pour décider qu’une allégation était fausse. La ville a également polygraphié ou menacé de polygraphier toutes les victimes présumées, une pratique désormais discréditée depuis que l’on sait qu’elle amène beaucoup de femmes à abandonner leur recours, même quand il est parfaitement fondé.
    En fait, la plupart des études qui suggèrent l’existence de taux élevés de fausses accusations commettent une erreur clé : le fait d’assimiler à des signalements mensongers les signalements décrits par la police comme « sans fondement ». La vérité est que ces rapports discrédités comme sans fondement comprennent très souvent ceux pour lesquels aucun élément de corroboration n’a pu être trouvé ou ceux dont la victime a été considérée comme un témoin peu fiable (souvent en raison de l’usage de drogues ou d’alcool ou de contacts sexuels précédents avec l’attaquant). Ces signalements dits non fondés comprennent également ceux où des femmes retirent leurs accusations, souvent en raison d’une crainte de représailles, de leur méfiance envers le système juridique ou d’embarras parce que des substances toxiques ou de l’alcool étaient impliqués. Les meilleures études dans ce domaine, celles basées sur un examen minutieux des allégations de viol, indiquent plutôt des taux de faux signalements oscillant entre 2% et 10%. L’étude la plus complète disponible a été menée par le British Home Office en 2005 et a révélé un taux de 2,5% pour les faux signalements d’agression sexuelle. La meilleure enquête réalisée aux USA, « Making a Difference » (2008), a conclu à un taux de 6,8%.

Enfin, dans l’article « Misogyny : The Sites » (Misogynie : Les sites), le SPLC cite une douzaine de sites Web et de blogs populaires chez les masculinistes, qui documentent abondamment la « stupéfiante » misogynie à laquelle se rallient les groupes haineux de défense des « droits des hommes ».

Bien sûr, les femmes et les filles qui ont été ciblées par ces groupes de haine misogyne – tant récemment que depuis des années – ne choisiraient peut-être pas le mot « stupéfiant » pour décrire une réalité qu’elles connaissent bien, et qui fait rage en ligne et sous forme d’une guerre réelle dans la vie des femmes depuis très longtemps. Pas plus que n’importe quel autre groupe ciblé ne serait « stupéfait » de l’existence de groupes haineux organisés qui diffusent régulièrement de la propagande politique contre eux en incitant à la haine de classe et même à la violence à leur égard. Par contre, ce qu’on pourrait trouver « stupéfiant », c’est que les organisations masculinistes n’aient pas été dénoncées et activement surveillées plus tôt par un organisme de défense des droits civiques reconnu à l’échelle nationale, alors qu’elles répondent clairement aux critères de « groupes de propagande haineuse » et méritent d’être surveillés et même poursuivis lorsque les faits le justifient, comme n’importe quel autre groupe haineux.

Du moins jusqu’à maintenant. Et la surveillance et le dépôt de poursuites contre des groupes haineux états-uniens est ce que le SPLC fait de mieux :

    La lutte contre la haine en Cour
    Au début des années 1980, le co-fondateur et avocat principal du SPLC Morris Dees a créé la stratégie consistant à utiliser les tribunaux pour combattre les groupes haineux organisés violents. Depuis lors, nous avons plusieurs fois obtenu des dommages-intérêts importants pour des victimes de violences dues à ces groups haineux. Ces causes sont entièrement financées par nos supporters : nous n’acceptons aucun paiement des clients que nous représentons.

    Les organisations qui ont fermé leurs portes après des verdicts écrasants rendus par des jurys dans les causes intentées par le SPLC comptent notamment White Aryan Resistance, United Klans of America, la milice White Patriot Party et Aryan Nations.

    Ces cas ont fait du SPLC et de Dees des ennemis vilipendés par le mouvement extrémiste. Notre siège social installé à Montgomery (Alabama) a été la cible de nombreux complots ourdis par des groupes extrémistes, y compris un incendie criminel qui a détruit nos bureaux en 1983. Plusieurs dizaines de personnes ont été emprisonnées pour avoir comploté contre Dees ou le SPLC.

Toute personne désireuse de donner de l’argent ou d’autres ressources au SPLC peut le faire par le biais du site web de l’organisme, par la poste ou par téléphone.

Veuillez noter que vous pouvez faire des dons de charité au SPLC et affecter spécifiquement votre don à un projet particulier, y compris celui de surveillance des organisations masculinistes. Il vous suffit d’indiquer le projet auquel vous souhaitez affecter votre contribution au moment de votre don.

Version originale : « Southern Poverty Law Center Names Men’s Rights Activists (MRAs) as Hate Group », 9 mars 2012.

Traduction : Martin Dufresne

Mis en ligne sur Sisyphe, le 12 mars 2012

Radfem News Service


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