source - http://sisyphe.org/article.php3?id_article=4270 -



Élections Québec 2012
Sur le "vaisseau amiral" de la capitaine Marois

3 septembre 2012

par Micheline Carrier

    "Après tout, s’il n’y a plus de vaisseau amiral de la souveraineté, mais plutôt une flottille et que Québec solidaire en fait très sérieusement partie, j’en serai ravie." (Françoise David, Le Devoir, 25 août 2012)

Pendant toute la campagne électorale, les médias ont proposé à la population de l’aider à faire son choix en vue du scrutin qui se déroulera le 4 septembre au Québec.

Je me demande parfois s’ils ne l’ont pas mêlée plus qu’éclairée.

La boussole électorale, dont on croirait à entendre Radio-Canada, qu’elle est la 8e merveille du monde, en a diverti plusieurs et désorienté d’autres. J’ai fait l’exercice à plusieurs étapes de la campagne, et pas une seule fois la boussole ne m’a mentionné le parti pour lequel j’ai choisi de voter. Peut-être faut-il s’interroger sur la véritable utilité de cet outil de surveillance de l’opinion.

En me basant sur son programme, son équipe, sa cheffe et la conjoncture, j’ai choisi de suivre le “vaisseau amiral” de la capitaine Marois de préférence à la "flottille" proposée par d’autres formations politiques. Le Parti québécois me semble le seul en mesure d’affronter les paquebots des adversaires qui se présentent en rang serré sur la mer agitée du Québec de 2012. Cela n’enlève rien au mérite de la “flottille” qui a fait évoluer le débat politique depuis quelques années.

Je ne suis membre d’aucun parti. Je n’ai pas toujours voté pour le Parti québécois et je ne m’engage pas à voter pour lui le reste de mes jours. J’aurais aimé voir quelques ajouts à son programme, par exemple, la réforme du mode de scrutin. Toutefois, dans l’ensemble, ce programme rejoint suffisamment mes préoccupations et mes attentes de citoyenne pour que je lui accorde un appui sans équivoque.

C’est un programme réaliste. Il se fonde sur l’équité envers les citoyens et les citoyennes de toutes couches sociales et de toutes générations. Il propose de réduire les iniquités en faisant contribuer davantage à l’effort collectif ceux et celles qui en ont les moyens, et d’aider davantage ceux et celles dont les revenus sont faibles ou plus modestes. (Exemple, en abolissant la "taxe santé").

Le Parti québécois me semble aussi le plus apte à protéger le bien collectif en réévaluant les redevances perçues sur l’exploitation des ressources naturelles, et en soutenant les petites entreprises, ce qui contribuera à enrichir toute la population du Québec et à subventionner les services sans accroître indûment la dette publique.

La charte de la laïcité, que le PQ propose depuis quelques années, rencontre mes attentes. Je compte sur la future députée Djemila Benhabib pour faire cheminer ses collègues quant à la place du crucifix à l’Assemblée nationale. Il en est ainsi du projet de charte de la citoyenneté qui, loin d’exclure, pourrait faciliter l’intégration des personnes qui choisissent de venir vivre au Québec.

Le Parti québécois me semble aussi le mieux préparé à défendre la langue française et l’égalité des sexes, deux valeurs québécoises fondamentales, se plaît-on à répéter de tous côtés, mais qu’on malmène pourtant.

Outre les mesures qui touchent l’ensemble de la collectivité, les femmes sont concernées de façon plus particulière par la promesse du PQ d’améliorer les services de garde, la conciliation travail-famille, les soins à domicile et aux personnes âgées dans les établissements publics (les femmes sont plus nombreuses parmi les “aidants naturels” et leur espérance de vie est plus longue que celle des hommes), l’équité salariale ; de créer un État véritablement laïque (elles sont les premières à faire les frais des accommodements pour motifs de religion).

Sur la question nationale, on a mis en doute l’intention de Mme Marois de tenir un référendum sur la souveraineté au cours du prochain mandat du PQ. J’ai compris qu’elle voulait respecter la volonté de la population, quant au moment de tenir cette consultation, ce qui me semble une attitude démocratique.

Le Parti québécois a rassemblé une équipe exceptionnelle. Des personnes intègres et responsables, qui ont fait leurs preuves dans leur domaine respectif. Je ne doute pas qu’elles fassent tout pour mettre fin à la corruption et préservent le système de santé public des prédateurs de toutes tendances. Les différents groupes d’âge se retrouvent aussi au sein de cette équipe. J’aurais aimé y trouver plus de femmes, mais étant donné le sort qui leur est fait en politique - et la présente campagne en témoigne à nouveau -, l’hésitation de plusieurs est compréhensible.

Toutefois, la “fibre féministe” est suffisamment forte au sein de l’équipe péquiste pour qu’on lui fasse confiance. Je suis sûre que cette équipe saura servir à la fois les intérêts généraux de toute la population et les intérêts spécifiques des femmes dans un esprit d’égalité et de justice.

Quant à la capitaine du "vaisseau amiral", je ne cache pas l’admiration qu’elle m’inspire. Pauline Marois "a fait toutes les guerres" et elle en est sortie grandie, plus convaincue et plus forte. Comme plusieurs, je crois que Pauline Marois est la plus compétente des prétendants au poste de premier ministre. Elle a une expérience inégalée dans les affaires de l’État. Elle a dirigé une quinzaine de ministères, dont les Finances, le Revenu, le Conseil du trésor, la Santé et l’Éducation. En énumérant le parcours de Mme Marois, Jean Charest avait dit, à l’Assemblée nationale, en 2006 : « Un jour, sait-on jamais, un homme en fera autant. Permettez-moi d’en douter. »* Un doute prophétique…

Pauline Marois a démontré qu’elle était capable de travailler en collégialité et de tenir fermement la barre dans les tempêtes. Qualité rare chez une personne politique : elle est capable d’admettre ses erreurs ou maladresses. Ça nous change de certains prétendants qui parlent comme s’ils étaient des modèles de perfection et que le doute ne les habitait jamais.

Pauline Marois a été à l’origine des garderies à 7$, un programme qui fait l’envie à l’extérieur du Québec, et du changement constitutionnel qui a permis de définir les écoles sur une base linguistique plutôt que confessionnelle. Le “printemps québécois” aurait connu une issue différente, selon moi, si elle avait été l’interlocutrice du mouvement étudiant. Le PQ me semble le seul capable de donner suite aux espoirs que ce mouvement a suscité dans la population et de résoudre les problèmes qu’il a soulevés. Car il s’est mis à l’écoute des jeunes au lieu de les considérer comme des fainéants ou des terroristes.

Finalement, la conjoncture. Le 4 septembre, le parti qui a exercé le pouvoir pendant 9 ans risque d’être remplacé par du pareil au même, sinon par pire, à moins que les forces ne s’unissent derrière le seul parti progressiste qui peut accéder au pouvoir. Je suggère aux personnes dont le choix n’est pas déjà arrêté de prendre ce facteur en considération le jour du scrutin et d’aider le Parti québécois à former un gouvernement majoritaire.

Je serais hypocrite, « vieille féministe » que je suis, si je prétendais ne pas me réjouir de l’élection d’une première femme Première ministre du Québec.

J’éprouverai une grande fièreté que Pauline Marois soit la femme qui écrive cette page d’histoire. Elle le mérite plus que toute autre.

Crédit de la photo : jvote.ca

 Prenez 5 minutes pour entendre Jean-François Lisée parler de Pauline Marois ici.

Note

* À l’Assemblée nationale en 2006, Jean Charest encense Pauline Marois qui démissionne après qu’André Boisclair ait été choisi chef du Parti québécois. Voir sur Youtube.

Lectures suggérées :

 Le Devoir, Collectif d’hommes Élections - Faisons éclater le « plafond de verre »
 l’aut’journal, Québec solidaire : Le bien commun sacrifié sur l’autel des intérêts partisans
  Élections 2012 - Le NMQ appelle à choisir le projet de pays avant la partisanerie
 La Presse, Comme une seule femme
 La Presse - Pauline Marois : l’humilité de la survivante

Mis en ligne sur Sisyphe, le 29 août 2012

Micheline Carrier

P.S.

Lire aussi :

"La Marois" pour qui je vote, par Michèle Bourgon




Source - http://sisyphe.org/article.php3?id_article=4270 -