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L’intimidation ou “bullying” en milieu de travail

16 mars 2007

par Micheline Mercier

On se met en meute pour briser la personnalité d’un individu, l’écraser. La victime doit être forte physiquement et avoir un moral en béton pour ne pas sombrer dans une folie que les agresseurs qualifient de névrose pure ou épuisement professionnel (burnout).

Tout cela commence par de simples remarques plates du genre, elle parle tout le temps de ses enfants, non mais as-t-on envie de connaître l’état de ses études ? Qui est-elle pour parler de tel ou tel sujet ? Comment se fait-il que ?... C’est impossible qu’elle sache tout cela, elle en rajoute, c’est une menteuse. Elle vit seule ? Donc rien d’intéressant à dire. L’avez-vous vu parler avec telle ou telle personne ? Elle est sûrement en train de moucharder, c’est une grande gueule, personne ne peut l’endurer on ne peut pas se fier à elle...Etc. Dès qu’elle ouvre la bouche pour commenter tel ou tel sujet, on lui coupe la parole et on change constamment de sujet. Elle est insignifiante, dit-on. On ignore sa présence. On dénonce ses erreurs et on tait ses succès.

Elle demande une promotion ? On ne la voie pas à ce poste ou bien on ne peut s’imaginer être sous sa direction. En fait, le “bullying” est une crise de jalousie collective. Et, bull shit.... Ça se passe la plus part du temps entre femmes. Ça prend juste une personne qui a de l’influence sur les autre, quelqu’un qui a toujours le mot pour faire rire, une collègue populaire qui a de multiples connaissances, qui se sent indispensable et que ça chatouille d’être au second rang. Une personne qui veut être visible en tout temps et qui veut “prendre le plancher”. Souvent une femme derrière une autre un peu moins jolie ou un peu trop belle, un peu plus vieille ou un peu trop brillante. Les gens ont envie de rire, ça brise la monotonie des journées stressantes.

En fait, n’importe qui pourrait très bien être une victime de “bullying”, il suffit d’une seule personne qui se met à déblatérer des drôleries sur un tic nerveux, une coiffure démodée, un vêtement de moindre qualité, un talent particulier ou un problème d’apprentissage. Eh voilà ! La niaiseuse est née, on a quelqu’un sur qui se faire les dents.

Bref, l’important est que cela fasse rire les autres. Au moins au début de l’implantation du système d’intimidation. On la met de plus en plus de côté. Les collègues sortent dîner ? On ne l’invite pas. Elle a déjà la réputation de casse-pieds. On prévoit une sortie de fin de semaine ? Encore là elle n’y est pas, on dit qu’elle ne se mêle pas aux autres, on la traite de snob... Elle a déjà une réputation qu’elle ne connaît pas encore. Si elle se lève pour dénoncer l’injustice, on la traite d’éternelle chialeuse, de geignarde pire encore on feint de ne pas l’entendre pour ne pas l’écouter.

Les victimes de “bullying” l’ont probablement été à l’adolescence, à l’école et même en milieu familial. De charmantes personnes qui, devenus adultes, n’ont pas appris à reconnaître le côté sournois et malsain de ce type d’agressions. Quand elles se rendent compte de la situation dramatique où elles se trouvent, il est déjà trop tard. Le mal est déjà là, à ronger l’amour-propre d’un être parfois trop sensible pour se défendre.

On ne devrait jamais oublier que le “bullying” a un effet d’entraînement et peut suivre l’agressée durant toute sa vie professionnelle. Une victime de ce genre de comportement peut sombrer dans une profonde détresse, quitter son emploi ou être déstabilisée au point de songer au suicide.

Il y a des lois qui protègent contre toute forme de discrimination, de harcèlement ou d’abus. Les agresseurs savent assez bien contourner ces lois, puisqu’ils sont en position de contrôle et, comme ce type d’intimidation se passe presque toujours en gang, il est parfois difficile pour l’agressée de dénoncer car l’intimidation comporte assez souvent des menaces de perte d’emploi ou de certains avantages acquis par des années de durs labeurs. Je crois qu’il faut garder l’œil ouvert et être à l’écoute de ces victimes. Je crois aussi qu’elles doivent savoir qu’elles ne sont pas seules à vivre ces injustices et qu’il y a des ressources qui ont été mises en place pour contrer ce type de comportements abusifs.

Mis en ligne sur Sisyphe, le 16 mars 2007

Micheline Mercier


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