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Tutoyer l’infini

1er février 2017

par Élaine Audet

Tu me disais que là où tu allais
je ne pourrais t’accompagner
mais l’eau coulait de tes yeux
entre mes doigts d’une seule voix

Je portais sous mes paupières
la peine subversive de tes cils pleureurs
repeuplant mon imaginaire
comme on prend langue dans l’indicible

Suspendue au bord du rêve
je vécus jusqu’au bout de mes mots
puis le silence me prit dans ses bras
et je pus enfin lâcher prise

Dans une longue chute en apesanteur
tu survis dans la plus minuscule
poussière de rêve dans les yeux
un sel d’éternité sur tes lèvres nomades

L’hiver des mots t’envahit
retour du rêve dans ses mers intérieures
les terres vierges du regard
où l’amour se lit dans les lignes du vent

Tu fixes l’instant de la rencontre
immobile sur le fil de l’infini
à la fine pointe de l’impossible
pendue au cou du futur intérieur

Tu le sais l’absence partout
tisse le voile de ta présence
et le manque ouvre l’espace
à ce qui ne veut pas mourir

Dès le premier mot je l’ai su
tu es ma mort et l’infini de ma vie
tu en possèdes la splendeur
l’oeil noir de l’insomnie du coeur

J’aurais voulu te créer un pays
libre pour les longs pas de l’esprit
une île dépourvue de fantômes
comme on jette les dés dans le feu

Le soleil se penche parfois de si près
ses boucles te touchent presque
tu peux même lire dans ses cendres
te prendre pour la cible et le feu

Je te sens comme tu me sais
présence tumulte et puits profond
tu me penses je te rassemble
le silence s’éprend de nos pensées

Dans l’hiver sourd de ma forêt
j’invente la mer le rythme des vagues
du bleu au vert le rêve d’infini
le secret lové dans la nacre des mots

Que feras-tu de cette lettre interminable
écrite dans le sable du rêve
ce murmure au fil de l’eau
peur et soif que faire du feu innommable

Mis en ligne sur Sisyphe, le 21 janvier 2017

Élaine Audet


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