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jeudi 13 avril 2006 Benoit XVI renouvelle sa croisade antilaïque
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Les pieuses éructations de Joseph Ratzinger sont inépuisables et sa désillusion répétitive. Lors d’une audience privée au Vatican, devant un conclave du Parti Populaire Européen (c’est-à-dire la droite réac., véritables valets du Vatican), l’ancien préfet de la Sainte Inquisition s’est alarmé de l’état d’une Europe gagnée par la laïcité. S’exprimer devant le PPE n’est pas anodin : parti majoritaire au Parlement Européen, le PPE est une oreille bienveillante acquise au prosélytisme papal, l’Europe étant un outil qui permet de courcircuiter les législations nationales. Ratzinger a ainsi déclaré que la laïcité est "cette culture qui est en train de se répandre dans toute l’Europe". Premièrement, la laïcité n’est pas une "culture" mais un principe juridique et philosophique, seul garant d’une coexistence pacifique des différentes formes d’adhésion ou de rejet des idéologies religieuses, et impliquant la liberté d’expression comme émancipation individuelle. Deuxièmement, la perfidie de Ratzinger considère en fait la laïcité comme un mal qui contaminerait l’Europe. Naturellement, le Vatican est le médecin qui convient pour soigner les européens de la tentation laïque et le PPE son plus dévoué pharmacien. Contre cela, les députés de droite ont été encouragés par le gourou à poursuivre le soutien "à l’héritage chrétien" et, ainsi, "contribuer de manière significative à la défaite" de la laïcité. Jean Paul II n’a pas dit autre chose dans ses innombrables attaques contre la laïcité dont l’abondance dissuade d’en faire une liste exhaustive. Benoît XVI ne saurait donc être stigmatisé comme un retour en arrière au sein de l’Eglise : il est le fidèle continuateur de générations de rigides célibataires romains, locataires à vie du trône de Saint Pierre. Bref, rien de neuf au Vatican. Même constat désabusé, mais tout aussi agressif, du chef de la secte catholique devant la relégation de "la manifestation de la conviction religieuse à la sphère du privé et du subjectif". Ranger la croyance religieuse dans la catégorie poussiéreuse des superstitions propres à chaque mystique n’est pas pour la redorer d’un vernis qui l’aiderait à résister à l’épreuve de temps ingrats. Séparer l’expression privée de la foi de son prosélytisme public est aussi insupportable au panzerpape qu’aux islamogauchistes pour lesquels le refus du port de l’uniforme de l’islam politique à l’école serait un acte raciste. Admirable conjonction des fanatismes religieux qui ne se nourrissent que du détournement des valeurs de progrès portées par les défenseurs de la laïcité. Car c’est, paradoxalement, au nom de la tolérance qu’est revendiqué le port du voile à l’école comme l’interventionnisme du catholicisme dans les débats de sociétés, idéologies toutes deux absolutistes et intolérantes face à l’altérité. Pire, bien que s’exprimant devant les papolâtres du PPE, Ratzinger n’a pas caché que ses propos s’étendaient à tous, catholiques comme non catholiques : "L’action de l’Eglise dans l[a] promotion [de ses principes] n’est donc pas confessionnelle dans son caractère, mais elle est adressée à tous, indépendamment des croyances religieuses." On admirera l’astuce qui consiste à ne pas présenter son action comme religieuse : conscient du discrédit croissant que subissent le recours à l’irrationnel et l’intransigeance politique affichés par le Vatican, le pape adopte un faux langage dont le succès est attesté dans la boutique concurrente, l’islam, où la takia berne de nombreux idiots utiles. En outre, au-delà de la stratégie du discours papal, stratégie de circonstance, c’est l’hégémonisme catholique qui s’y exprime, cette fois sans dissimulation : en indiquant que l’action de l’Eglise "est adressée à tous, indépendamment des croyances religieuses", la pieuvre catholique ne limite pas son discours aux seuls adeptes mais s’étend à l’humanité entière. Si le dieu des chrétiens est audible au-delà du cercle des christicoles, celui des musulmans, c’est-à-dire le même, est alors lui aussi fondé à parler aux infidèles. Ce qui, incidemment, légitime les menaces des fanatiques musulmans contre quiconque, même non soumis à Allah, ose ridiculiser les symboles de l’islam. Tous frères dans l’arriération monothéiste et son imposition aux mécréants, d’où la mode hypocrite de l’oecuménisme pour mieux se liguer contre l’ennemi commun, la laïcité (rencontres d’Assises, San’t Egidio, proposition de loi antiblasphème d’Eric Raoult à la demande d’une association musulmane, etc.). Le sermon débité aux parlementaires du PPE fait suite à maints évènements et déclarations qui martèlent sans répit le rejet de la laïcité, des libertés et de l’autonomie individuelle. En janvier 2003, Ratzinger, alors préfet de la Congrégation pour la doctrine de la foi, publie une "Note doctrinale sur certaines questions concernant la participation des catholiques dans la vie politique" dans laquelle les électeurs et les politiciens catholiques sont sommés de ne pas voter en faveur de législations contraires à l’enseignement de l’Eglise. Pour la fête de Toussaint de 2004, le clergé français organise une campagne de réévangélisation à Paris en installant, au mépris de la loi de 1905, un gigantesque instrument de torture en forme de croix chrétienne devant la cathédrale Notre-Dame à Paris, temple historique de la superstition et du fanatisme. En août 2005, lors des JMJC de Cologne, Benoît XVI expliquera aux jeunes que "c’est seulement de Dieu que vient la véritable révolution", dissuasion évidente de s’engager dans les luttes sociales et libératrices pour, plutôt, se recroqueviller dans le silence des sacristies. Etc., etc. Moins que jamais, le pape ne peut donc être rangé dans la rubrique des "extrémistes" ce qui, par contrepoint, alimenterait la fable d’un christianisme humaniste. Benoît XVI est rigoureusement identifiable au catholicisme avec son éternel absolutisme, son insubmersible intolérance et son indécrottable obscurantisme. Un an après une élection extrêmement bien accueillie par l’extrême droite, du FN au MNR en passant par l’Opus Dei, les Légionnaires du Christ et la Fraternité Saint Pie X, il n’est pas à craindre que la papauté succombe au modernisme. Source : Respublica 433, 3 avril 2006. Titre originale : « Benoit XVI renouvelle sa croisade antilaïque en visant l’Europe et ses valets du PPE ». Pour lire ReSPUBLICA http://www.gaucherepublicaine.org> www.gaucherepublicaine.org">en ligne ou s’y abonner. Mis en ligne sur Sisyphe, le 4 avril 2006 |