|
mardi 24 octobre 2006 Des monts et merveilles !
|
DANS LA MEME RUBRIQUE Lettre de Julie Miville-Dechêne Où va le Conseil du statut de la femme ? CSF et projet de loi 20 : une position contre les femmes ? La réforme Barrette est le prélude à un démantèlement annoncé (FIQ) Mépris du gouvernement Marois à l’endroit des sages-femmes - Leur modèle de pratique est menacé Le Conseil du statut de la femme plaide pour un accès ouvert à la première ligne médicale Louise Vandelac veut comprendre la « transformation sociotechnique du vivant » Dix-neuf jeunes femmes sur vingt "modifieraient leur corps" Manifestation concernant le procès d’une femme séropositive à Montréal le 1er mai Anorexie mentale - Dompter la douleur La télé, complice de la pandémie d’obésité chez les enfants La dépression au-delà des préjugés Écoute ton corps... Jusqu’à quel point ? Les animaux, nos cobayes Va-t-on déposséder l’Amazonie de ses ressources ? |
La nature m’ayant bien doté en monts et merveilles, j’ai, de prime abord, peine à croire que certaines femmes soient prêtes à subir les risques d’une opération, les douleurs générées pour avoir un buste parfait, bien galbé pour quelques années. Mais tout n’est pas ferme ou flasque au royaume de la Femme. Ma mère est morte d’un cancer du sein et, auparavant, elle avait subi une mastectomie radicale. C’était dans les années soixante-dix. On parlait bien peu de la reconstruction mammaire à l’époque. Je peux comprendre qu’elle se soit sentie mutilée par cette ablation d’une partie qui affirme au vu et au su de tous et de youtes la féminité. Je peux comprendre qu’une femme désire retrouver son corps. Se retrouver soi, en totalité. Le phénomène est, à mon avis, comparable à quelqu’un-e qui subit une amputation, mais il est investi d’une portée encore plus émotive parce que cette « amputation » est extrêmement symbolique. J’essaie aussi de comprendre les femmes qui, à leur grand désespoir, conservent les seins de leur enfance et qui voudraient s’offrir ce qu’elles croient être une absolue nécessité de séduction. Je peux comprendre ces femmes qui, après une grossesse et les affres et les bonheurs de l’allaitement, voient leur corps transformé, leurs seins et leur ventre flasques. Leur estime d’elle-même peut être atteinte et causer de grands dommages psychologiques ; il reste que le renforcement négatif de cette impression par de tierces personnes n’aide pas. On vénère la beauté et la jouvence éternelle partout : la télévision, les magazines (qui transforment même des corps d’une grande beauté avec les magies de l’ordinateur), la mode. Tout oblige la femme à rester jeune et belle. Celles qui dérogent à ce diktat sont ostracisées, se sentent rejetées ou sur le point de l’être. Quand on est obligé de combattre la Nature... Les prothèses mammaires en silicone ont été retirées du marché il y a quelques années parce qu’elles avaient causé des problèmes majeurs à certaines femmes. Santé Canada vient de permettre à nouveau l’installation de ces poches de silicone même si de sérieux risques sont toujours liés à ces implants mammaires. Inamed et Mentor, deux compagnies dont les implants sont de catégorie à risques élevés, ont obtenu le feu vert et les chirurgiens peuvent procéder à des opérations d’augmentation ou de reconstruction des seins grâce à un programme d’accès spécial, le PAS. Franchir le PAS semble assez facile. Santé Canada écrit : le dispositif peut présenter des bienfaits et les risques ont été réduits autant que possible. Mouais... Quels sont ces risques ? Parlons d’abord des risques connus : écoulement et éclatement sont les plus fréquents. Il faut aussi comprendre que ces implants ne sont pas permanents et que la plupart des femmes éprouveront des complications : rupture, douleurs, déformation. Infection grave, contraction capsulaire. Ouch ! Nicole Demers du Bloc québécois a dénoncé la décision de Santé Canada de remettre ces prothèses sur le marché. Le Réseau québécois d’action pour la santé des femmes (RQASF) juge la situation préoccupante. On ne connaît pas précisément tous les risques. Vingt ans se sont écoulés avant qu’on ne comprenne à quoi les femmes s’exposaient avec ces implants. Qui devrait être opérée et qui ne devrait pas l’être ? Quand est-ce qu’un sein est beau et quand ne l’est-il plus ? Peut-on arrêter le cheminement normal du corps humain ? Est-il justifié de le faire ? Quelles sont les bonnes raisons ? Y’en a-t-il de mauvaises ? J’ai déjà entendu l’histoire d’une femme à qui son mari avait offert en cadeau surprise l’opération... Tout un beau cadeau ! Et toute une surprise aussi ! Merci Père Noël ! Paméla Anderson y est-elle pour quelque chose ? La pornographie attise-t-elle ce désir chez les hommes ? On a vu ces femmes qui gonflaient leurs seins jusqu’à les rendre totalement anormaux. Du 52 DD !!! Pour quelles raisons ? Les seins ont toujours été un attrait sexuel des plus appréciés. Peut-être est-ce dû à l’inconscient qui rappelle le premier geste naturel du corps de la mère : la montée de lait et aussi, souvent l’allaitement, source de vie. Peut-être aussi le plaisir de l’enfant qui tète sa mère et qui en retire du plaisir et de la sécurité. Toujours est-il que plusieurs femmes sont insatisfaites de leurs seins. Plusieurs hommes aussi... Probablement que les pressions sociales et leur obligation de beauté et de jeunesse à tout prix sont derrière l’insatisfaction de plusieurs femmes et les incitent à subir ce type d’opération. La solution n’est pas simple, mais à mon avis, c’est la santé des femmes qui est le plus important. Je ne veux pas être alarmiste, mais soyons prudentes et examinons nos motifs pour demander une telle opération. Mis en ligne sur Sisyphe, le 24 octobre 2006 |