À Montréal, lundi le 23 octobre 2006 a eu lieu le lancement de l’ouvrage Abolir la prostitution du sociologue, chercheur, professeur, auteur et conférencier Richard Poulin. Plus qu’un état de la situation, parmi les visées de légalisation, les intentions de réglementation, les volontés de prohibition, ce livre, tel que le revendique son auteur, intervient en tant que manifeste traversé par un programme pour favoriser l’abolition de la prostitution.
Lors du lancement, Richard Poulin a résumé sa préoccupation abolitionniste et, pendant plus d’une heure, a répondu aux questions du public. Se basant sur la prémisse que les personnes prostituées sont des victimes, il envisage donc une lutte contre leur victimisation et un combat contre les proxénètes et les prostitueurs.
Aussi pendant l’événement, l’auteur a relevé la corrélation historique entre la prostitution et l’économie. Poulin parle alors d’un sujet sur lequel il planche depuis au moins deux autres de ses livres : la mondialisation (le laisser-faire économique) et son incidence sur la marchandisation humaine.
De plus, en accord avec les propos de son livre, il a précisé que c’est à tort que l’on prétend que la prostitution est « le plus vieux métier du monde ». Chez les Amérindiens, il n’y avait pas de prostitution. Avec le développement de marchés, d’échanges marchands, est apparu le système prostitutionel. Encore de nos jours, ses liens avec la guerre sont observables, la situation vietnamienne le prouve.
L’auteur a énuméré les causes structurelles de la prostitution : agressions sexuelles dans la jeunesse (amenant la fugue), appartenance à une minorité nationale ou ethnique (pour preuves, la proportion de prostituées amérindiennes dans les provinces de l’Ouest du Canada, ainsi que la prolifération de prostituées russes dans les pays de l’Est) et la banalisation de la prostitution. « La pauvreté est une circonstance favorable à l’entrée dans la prostitution, non la cause », a-t-il dit.
Ce n’est pas un hasard si le gouvernement accorde du financement au lobby pour la légalisation de la prostitution, c’est dans son intérêt ; l’image des femmes est affectée par cette institution historique d’oppression, c’est une insistance sur l’idée qu’un sexe (le féminin) doit être au service de l’autre (le masculin) et, surtout, c’est une source de revenus (à commencer par les municipalités qui deviennent des proxénètes en vendant des permis aux agences d’escortes).
Au lancement de son livre, Richard Poulin n’a pas hésité à remettre en question de nombreux arguments trop facilement acceptés, par exemple, la question du « libre choix » et du consentement. Il n’y a pas de réel consentement à la prostitution, a-t-il déclaré, que ce soit la prostitution juvénile ou la prostitution adulte. Convaincu, mais lucide aussi quant à l’énormité des enjeux économiques et misogynes en cause, le sociologue a demandé : est-ce utopique de vouloir Abolir la prostitution ?
Abolir la prostitution, éditions Sisyphe, Montréal, 2006, 128 pages
Mis en ligne sur Sisyphe, le 24 octobre 2006
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