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vendredi 14 mars 2008 Pour éviter de se noyer dans la (troisième) vague : réflexions sur l’histoire et l’actualité du féminisme radical
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Le féminisme radical, par l’intensité du changement social systémique qu’il propose, sera probablement toujours un courant marginal. Il a toutefois pu compter sur la participation de milliers de femmes à travers l’histoire, malgré l’opposition que certains de ses postulats ont rencontrée et rencontrent toujours. Les critiques adressées actuellement au féminisme radical s’inscrivent dans un contexte de « déradicalisation » du féminisme, qui touche les écrits universitaires Nous répondons principalement à l’introduction conceptuelle formulée par Maria Nengeh Mensah, première théoricienne francophone québécoise à avoir consacré un ouvrage à la définition de la « troisième vague » du féminisme. Celui-ci regroupe des auteures et des auteurs qui discutent d’idées déjà influentes au Québec Dans ce texte, nous avançons qu’une typologie pensée en termes de vagues réduit, dévalorise et évacue la complexité ainsi que la diversité des idées qui parcourent l’histoire et l’actualité du mouvement féministe. À partir d’un point de vue féministe radical, nous souhaitons mettre en lumière quelques lacunes, problèmes et conséquences mis en évidence dans la promotion d’un « nouveau » féminisme, dit de « troisième vague », qui masque les discussions qui ont eu lieu et ont toujours cours entre féministes, de même que leurs divers apports à ce mouvement hétérogène (2). Notre analyse se veut également pensée en fonction de la scène féministe québécoise, même si nous mentionnons d’autres influences idéologiques qui la traversent, soit française, canadienne-anglaise et états-unienne (Pagé 2006). Cette dernière influence s’est avérée particulièrement importante dans le développement de la pensée féministe québécoise (Descarries-Bélanger et Roy 1988 ; Péloquin 2007), comme en témoigne l’impact de théoriciennes telles que Judith Butler dans la littérature féministe, même francophone, notamment avec le nouveau tirage (2006) de la récente traduction (2005) de Gender Trouble (3). Afin de nous interroger sur la pertinence de la catégorisation du mouvement féministe en termes de vagues, nous mettrons d’abord en lumière, à partir d’exemples tirés de l’histoire, l’existence d’analyses associées au féminisme radical à différentes époques, ce qui nous permettra de démontrer ainsi l’hétérogénéité des idées dans l’espace-temps. Nous analyserons ensuite la fausse association entre, d’une part, la pensée féministe radicale et, d’autre part, l’ensemble du féminisme de Des éléments de définition Il nous importe tout d’abord de définir dans le présent article ce qui pose problème, soit la notion de « troisième vague », en nous inspirant principalement des propos d’auteures et d’auteurs présentés par Nengeh Mensah, ainsi que des critiques d’auteures véhiculées durant des séminaires universitaires francophones et anglophones au Québec. Nous retenons les éléments communs de cette éclectique « troisième vague » dans le but de faciliter l’élaboration de notre argumentaire et non pour en réduire le contenu. Selon Nengeh Mensah (2005 : 15), les auteures et les auteurs associés à la « troisième » et « nouvelle » vague du féminisme ont en commun de :
La notion d’hybridité serait au coeur de la « troisième vague » (Siegel 1997 : 53-54), de même que l’idée qu’aucune définition de l’oppression ne vaut pour toutes Nengeh Mensah avance également qu’un rapport de rupture/continuité avec les autres « vagues » du féminisme caractériserait la « troisième vague ». Parmi les éléments de rupture, elle note la sexualité, qui constituerait un point de divergence important entre les théoriciennes apparentées à la « troisième vague » et celles qui sont associées à la « deuxième ». Certaines analyses féministes radicales à propos de la sexualité sont même qualifiées de « négatives » et « victimisantes » pour les femmes (Nengeh Mensah 2005 : 14). Les théorisations radicales sont, de manière plus générale, jugées « dogmatique[s] » et « essentialiste[s] » (Nengeh Mensah 2005 : 17). La volonté de féministes des années 80 de rompre avec certaines Enfin, selon Nengeh Mensah (2005 : 17), « les Québécoises francophones se situeraient davantage sur un axe de continuité avec la deuxième vague ». Elle précise ensuite que ces dernières cherchent à « dépass[er] des acquis appartenant à une autre génération de féministes », afin de se définir dans l’action politique « plus personnelle et quotidienne du type “ce que je fais, ce que je dis, ce que j’achète, c’est ma militance” » (Nengeh Mensah 2005 : 15 ; voir également Siegel 1997 : 57). En ce sens, la théoricienne rapporte que la remise en question des pratiques féministes est souvent associée à la « jeunesse militante », et soutient même que les Quelques idées fausses sur le féminisme radical : le cas québécois La conception populaire du féminisme associé aux années 60 et 70 se concentre souvent sur des stéréotypes, où l’ensemble du mouvement est généralement représenté par quelques évènements, gains et images spectaculaires. Cette réduction peut discréditer le bien-fondé des revendications, diminuer la reconnaissance de l’impact du féminisme sur la société québécoise et simplifier la diversité des idées qui avaient cours à l’époque. Le travail de conceptualisation d’une « troisième vague » n’aide en rien la déconstruction des préjugés et réduit les possibilités de construction de récits historiques inclusifs de toutes les pratiques et de tous les courants féministes. Un autre exemple de cette association problématique entre chronologie et idéologie réside dans l’équation unilatérale entre la « deuxième vague » et le féminisme radical, alors que, du moins pour le cas québécois, celle-ci n’a pas lieu d’être. En effet, il importe de comprendre le mouvement féministe de la fin des années 60 et du début des années 70 dans sa diversité. Ainsi, dans ce climat fertile d’idées, féministes radicales, marxistes, indépendantistes, libérales et séparatistes lesbiennes se côtoient, débattent, s’allient, s’affrontent, se confondent, s’influencent et se divisent. Le féminisme de la « deuxième vague » n’est donc pas le seul fait du féminisme radical. Cette époque marque également la création de la Fédération des femmes du Québec (FFQ) en 1966, organisation libérale dans son contexte de formation, qui a été vivement critiquée par des féministes radicales. Évidemment, plusieurs enjeux rassemblaient des femmes de divers horizons politiques. Pensons, entre autres, aux manifestations du 8 mars où libérales et radicales marchaient souvent côte à côte, ce que la mémoire sélective des médias ne permet pas toujours de reconnaître (Beauchamp 1987 ; Blais 2007). Les féministes québécoises ont également connu des divisions, au sujet notamment de la question nationale (Yanacopoulos 2003), des alliances et ruptures avec les féministes anglophones (O’Leary et Toupin 1982 : 71), des conflits avec les féministes marxistes (O’Leary et Toupin 1982 : 32-39), au sujet du séparatisme lesbien (Lamoureux 1986 : 96) et, de manière plus générale, des débats sur la marche à suivre et les moyens à employer pour améliorer ou révolutionner, selon le cas, les conditions de vie des femmes. Ainsi, les lignes se croisent et divergent, les féministes s’allient et se divisent. La déconstruction des idées fausses sur le féminisme radical, du moins tel que nous le définissons, mériterait un vaste travail d’analyse. Par souci de concision, En cherchant à rétablir la réalité historique et idéologique du féminisme radical, nous avons voulu nous solidariser avec nos consoeurs qui s’identifient à ce courant et les inviter à participer activement à ce repositionnement du féminisme radical, autant sur la scène universitaire que sur la scène militante. Sans pour autant * On se référera à la bibliographie du document original pour les références aux articles et œuvres citées entre parenthèses dans ces extraits. La revue Recherches féministes a autorisé la publication de ces extraits sur Sisyphe. Notes
– Source : La revue Recherches féministes a publié l’intégralité de cet article en 2007 (vol. 20, no 2, 2007 : 141-162). Les auteures sont de jeunes universitaires nées au tournant des années 80 et qui adhèrent au féminisme radical. Dans son numéro de mai/juin 2008, Recherches féministes soulignera son 20è anniversaire. Ce numéro spécial contiendra un CD contenant tous les articles de la revue depuis le premier numéro, cadeau offert aux abonnées et aux personnes qui achèteront la revue. Pour s’abonner ou commander un numéro : Pavillon Charles-De Koninck – La revue Recherches féministes est membre de "Erudit", portail de diffusion des revues savantes au Québec, et est accessible sur le web à l’adresse suivante : www.erudit.org. Mis en ligne sur Sisyphe, le 1er mars 2008 |